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Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau

Post tenebras

3 Mai 2023 | Les 4 vérités de Jean-Marc Vaudiau

Nous ne faisons jamais toute la lumière sur nous-mêmes, et il semble même que ce soit impossible.

Nous sommes persuadés, soit par nature soit par éducation, que l’obscur est ce qui manque de lumière et qu’il suffit de l’éclairer pour en éloigner les ombres. Ce n’est jamais aussi simpliste et le moindre collectionneur sait fort bien qu’il lui faut protéger sa collection de la lumière comme d’autres menaces.
Un psychanalyste des profondeurs, de son côté, aurait des choses à dire au sujet de ce qui sommeille au creux de chaque être humain et qui, par son obscurité justement, se sent à la fois menacé et protégé. Sommes-nous si transparents à nous-mêmes? Pouvons-nous si aisément échapper à l’obscurité qui entoure notre propre être? Et est-ce même souhaitable? L’être secret en nous est séparé de l’être manifeste, de cet être immédiatement lisible pour tout un chacun, de cet être qui fait un avec son apparence. Or notre être secret ne l’est pas seulement pour autrui, il l’est aussi pour nous.
Nous ne faisons jamais toute la lumière sur nous-mêmes, et il semble même que ce soit impossible. La part d’obscurité? Elle n’est pas un obstacle à la lucidité, elle n’est pas non plus un droit à l’insouciance, mais elle est, paradoxalement, ce qui nous échappe tout en manifestant sa présence en nous. Il s’agit d’une présence étrange d’ailleurs, presque étrangère, qui nous laisse dubitatifs au moment où elle se manifeste avec le plus d’évidence, mais toujours sous le sceau du secret: une sorte d’énigme presque impossible à déchiffrer de part en part. Ce serait une erreur d’y voir une marque de faiblesse, car il convient de dissocier le secret du mensonge: ce sentiment que nous avons souvent d’échapper à nous-mêmes, de ne pas voir clair en nous, n’a rien à voir avec une vérité que nous voudrions nous cacher, ni avec une paresse qui nous maintiendrait en dehors de soi. Il s’agit de la condition humaine que d’être habité d’une part d’ombre qui se dérobe sans cesse, sans doute parce qu’elle nous dépasse.
A son propos, oserions-nous le mot de «transcendance»?