Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau
Que faire du corps?
Pour les gnostiques,
l’esprit est enfermé dans un
corps-prison.
Les gnostiques ont été, depuis le IIe siècle de notre ère, des gens qui ont voulu répondre à cette question: pourquoi ce monde nous semble-t-il si étranger? La reconnaissance de l’existence du Mal leur a fait dire qu’il existait deux éléments irréconciliables: d’un côté le corps et de l’autre l’esprit. L’esprit est enfermé dans un corps qui se révèle une prison. Le but des gnostiques est la délivrance de la parcelle divine de l’Homme, aliénée dans un monde matériel corrompu. L’Homme est un dieu déchu qui a oublié sa condition originelle. Il faut éveiller les élus en leur rappelant leur origine céleste. Les éveillés, les initiés, les Wokes!
La théorie du genre est centrale dans le wokisme, dit Jean-François Braunstein, qui compare ce courant à une religion: «Elle permet de se débarrasser du corps». Lorsque le corps ne correspond pas à la conscience qu’on en a, c’est à lui à se plier à la volonté de libération que lui impose l’esprit. Le transgenre serait ainsi celui qui aurait su porter à son sommet l’idéal d’émancipation; il devient le modèle de l’éveil, le héros! Pierre-André Taguieff précise: «L’idéal d’une émancipation radicale inclut le rêve d’un total effacement des limites». Le corps est peu à peu devenu le principal obstacle à la construction de soi, imaginaire répandu aujourd’hui.
L’idée d’un genre séparé du corps n’est pas sans rappeler les gnostiques qui, comme les Wokes, considéraient comme additionnelle notre existence matérielle. L’Homme est un être affaibli, déterminé par son corps, qui pleure sa liberté céleste! Et ce monde illusoire est tenu pour plus vrai que le monde réel, fondé sur l’identité corporelle des sexes. Pour ancrer dans l’imaginaire ce principe farfelu, et parfois carrément risible, on va supprimer du langage tout ce qui rappelle la différence de sexes: en corrigeant la langue (pronom iel), on pense transformer la réalité! Cette guerre à la réalité, guerre à laquelle nous sommes requis de participer sous peine d’être soupçonnés du pire, nous exile de notre condition: notre corps, c’est aussi nous.