/

Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau

Le piège de Thucydide

19 Juin 2024 | Les 4 vérités de Jean-Marc Vaudiau

Le monde s’achemine-t- il
inexorablement vers un
conflit armé, comme l’a prédit
Thucydide?

Thucydide est le premier grand historien. Il nous arrive de la Grèce antique et nous a donné le formidable récit de la Guerre du Péloponnèse, c’est-à-dire de l’affrontement de Sparte et d’Athènes. Il émet l’hypothèse que les Spartiates, sans l’avoir jamais admis, ont craint la montée en puissance d’une cité rivale, Athènes, et que la raison du long conflit armé qui a opposé les deux cités était le développement d’un enchaînement mécanique qui conduit à s’affronter militairement. D’aucuns ont considéré que cette structure conflictuelle se répètait dans l’histoire et que ce conflit grec était exemplaire des relations internationales. C’est ce côté inévitable qui constitue un piège pour les Nations.
D’autres ont ajouté que la dimension économique était absente de la vision antique, et que la rivalité aujourd’hui était économique. Mais il est clair que le retour du nationalisme dans plusieurs endroits du monde s’ajoute au piège. Depuis plus de dix ans, remettant à l’honneur le piège de Thucydide, le politologue américain Graham Allison a commencé à nous alerter sur les risques de guerre entre la Chine et les Etats-Unis. De fortes divergences sur de multiples dossiers opposent les deux puissances et la Chine va devenir sous peu la plus importante puissance économique du monde. Par ailleurs, le cas de Taïwan constituerait à lui seul un casus belli. Les motifs d’en venir aux armes sont légion entre ces deux Nations. Les risques d’un affrontement armé direct avec Washington sont tangibles. Et l’invasion de l’Ukraine par l’armée de Vladimir Poutine a mis brutalement en lumière d’autres risques d’alliance tout aussi dangereux.
La question est alors la suivante et chacun aura à cœur d’y répondre: le monde s’achemine-t-il inexorablement vers un conflit armé, comme l’a prédit Thucydide? Tomberons-nous dans le piège ou verrons-nous le retour de deux blocs dont chacun, sans intervenir militairement, s’évertuera à pousser vers l’avant son propre avantage, tout en fragilisant les positions de son adversaire?