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Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau

Le mal banal, forcément banal

30 Avr 2025 | Les 4 vérités de Jean-Marc Vaudiau

Le mal est d’autant plus banal
qu’il se grime avec les habits
du bien, utilise son langage.

Je relis Hannah Arendt, «Eichmann à Jérusalem », qui relate le procès du criminel nazi qui a organisé les terribles déportations. Le génocide des Juifs par les nazis s’est appuyé sur bon nombre de porteurs d’eau, et Arendt juge que Eichmann est un «banal» salopard. Il n’est pas une figure démoniaque, mais plutôt un être veule, dépourvu de pensée. Tollé dans le monde de 1962-1963, à la suite de ce portrait d’un être borné et insignifiant, qui se targue d’avoir obéi aveuglément aux ordres de sa hiérarchie. S’en ensuivit une virulente polémique: on a reproché à H. Arendt d’inclure l’extermination des Juifs dans l’ensemble des exterminations humains dues aux divers totalitarismes, et de ne pas en faire un hapax, un cas unique. Le mal n’est peut-être pas aussi banal qu’elle l’a pensé, et il ne faut pas être trop inclusif.
La prédiction de Pasolini en 1976 – donc seulement 13 ans après le livre de Arendt – prend aujourd’hui des échos inquiétants: «Le fascisme peut revenir sur la scène à condition qu’il s’appelle antifascisme». On y est avec les défilés de ces «antifas» qui, sous couleur de combattre le racisme, se montrent clairement antisémites et hurlent des slogans anti-juifs. Aujourd’hui c’est ainsi que je comprends, hors du contexte du nazisme d’alors, le mot de Arendt: la banalité du mal. Le mal est d’autant plus banal qu’il se grime avec les habits du bien, utilise son langage. Les luttes émancipatrices sont perverties car dans le théâtre urbain, les masques trompent les naïfs. Le raisonnement simpliste est le suivant: «Le racisme est partout même là où il n’est pas; les Blancs sont par essence racistes; ils ont un passé patriarcal et colonial; si on fustige ce racisme, notre idéologie antisémite se propagera facilement grâce au complexe de culpabilité». Ben voyons!
L’ultragauche est une machine à empiler les dogmes. Cette gauche radicale à l’agonie adopte l’antisémitisme et le racisme antiblanc comme bouées de sauvetage dans le naufrage intellectuel et moral qu’elle connaît. Elle profite de nos faiblesses; elle nous donne le change. C’est banal. Comme le mal.

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