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Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau

Joseph K.

16 Avr 2025 | Les 4 vérités de Jean-Marc Vaudiau

Aujourd’hui, si quelqu’un
s’écarte du politiquement
correct, on dépose plainte et
on intente un procès…

Le personnage principal du «Procès» de Kafka, Joseph K., a cette pensée: si on m’accuse, c’est que je dois bien être coupable. Terrible pensée qui détruit ce qu’elle touche. La culpabilité du personnage trouve son origine dans l’accusation elle-même et non pas dans une problématique erreur, ni dans une faute qu’il n’a pas commise.
Il n’y a pas si longtemps, lorsqu’on était en désaccord avec une personne, on argumentait, on ouvrait le débat, on se jetait à la figure des arguments terribles, même par médias interposés, souvent de franches méchancetés, on se mettait en colère, on recevait des coups mais on en donnait aussi. Bref, on débattait parce que la confrontation d’opinions est au centre même de notre démocratie en perte de vitesse: on se combattait à la loyale, puis on allait boire un verre, avant de recommencer le lendemain. Ainsi se hiérarchisaient les désaccords et les empoignades.
Aujourd’hui, plus rien de tout cela. Si quelqu’un s’écarte du politiquement correct ou semble avancer une phrase qui paraît heurter la morale dominante, on ne se fâche pas, on ne lui dit rien, on dépose plainte et on intente quelquefois un procès. Joseph K., particulièrement s’il est blanc, mâle, âgé et hétérosexuel, est cité à comparaître devant le tribunal du Bien. Pourquoi, au juste? Une broutille, une maladresse, un regard, on ne le sait pas; on ne le lui dit d’ailleurs pas clairement, une rumeur suffit souvent. Il est jugé a priori. Le voilà abattu et parfois impuissant.
Mais le juge ne tranche pas, puisqu’il n’y a pas débat argumenté, il lève le sourcil, condamne ou acquitte. Il acquitte souvent il faut le dire, mais que reste-t-il d’un homme qui a dû passer à la question et en ressort blanchi? Un doute plane sur lui, sur sa famille, sur ses enfants, sur ses amis. «ll n’y a pas de fumée sans feu», se disent les gens de bien qui ne pensent à rien, les employeurs, les voisins, ceux pour qui deux et deux ne font pas toujours quatre. Sur les réseaux, certains me disent craindre d’intervenir ou se camouflent derrière un pseudonyme.

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