Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau
Genève de gauche et Genève de droite
La gauche et la droite sont-elles dépassées?
Les élections genevoises approchent et les partis serrent les rangs: il y a ceux de droite et il y a ceux de gauche. On les repère facilement aux valeurs qu’ils prônent, au langage qu’ils utilisent, aux couleurs qu’ils affichent. Et puis il existe plusieurs petits partis start-up qui ne se veulent ni de droite ni de gauche: ils espèrent aimanter des électeurs par un leurre, celui qui fait croire que les dossiers sont bloqués parce que la division gauche-droite est paralysante. «Nous sommes pragmatiques et non pas idéologiques», disent-ils.
La gauche et la droite sont-elles dépassées? Depuis la Révolution française, ce clivage offre un raccourci analytique à nul autre comparable pour saisir l’attitude face à une foule d’enjeux politiques: les grandes luttes sociales, notamment celles concernant le droit de vote, le développement des partis politiques, le rôle des femmes, la laïcité, la montée des syndicats, la construction de l’Etat providence, la fiscalité. Partout dans le monde où la démocratie tend à s’imposer, la division gauche-droite s’affermit parce que cette opposition semble produite par la démocratie elle-même. Même la lutte contre le terrorisme s’organise autour du clivage traditionnel, parce qu’elle touche au problème de la sécurité, condition de l’Etat démocratique.
Mais alors pourquoi prétendre s’en distancer? Faire de la politique autrement lorsqu’on ne sait déjà pas faire de politique? Paraître se placer en surplomb, au-dessus de l’arène où les traditionnels conservateurs se battent contre les perpétuels progressistes, et ainsi s’attribuer l’image innocente de partis neufs, sans dogme et sans parti pris? Un parti sans parti pris n’existe que dans les contes de fées. Dans la pratique, c’est-à-dire dans le monde politique sans indulgence, dans l’univers du combat, chaque décision prise, chaque vote est de gauche ou de droite. Mais c’est dans ce zigzag informe où l’on est tantôt de droite et tantôt de gauche qu’on fait croire aux électeurs ingénus qu’on n’est ni de droite ni de gauche.