Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau
C comme chrétien
C’est dans les formes de communauté les plus modestes, les plus entachées de simplicité intellectuelle, que le christianisme assure sa vie historique.
Lorsqu’on demande à un bouddhiste ce qu’il pense de sa religion, il n’hésite pas à vous expliquer qu’elle est la plus tolérante de toutes et la plus formidable qui soit. A un musulman, la même question aboutira à un enthousiasme de croyant, «Allah est Grand». Un Juif, fier de sa religion, expliquera combien elle a toujours été profonde et unificatrice pour un peuple en butte à quantités de malheurs. Si vous le demandez à un chrétien, il vous répondra: «Heu… il faut mettre des nuances… il y a chrétien et chrétien… oui, mais la religion est ambiguë… la foi est personnelle».
Bref, pour le chrétien, le fait de se montrer hypercritique envers sa culture religieuse est la marque même de l’intelligence. Il est prêt à renoncer aux crèches de Noël et aux chants traditionnels pour bien signifier au monde entier qu’il n’est pas dupe, lui! Il existe en plus des freins externes comme l’individualisme et des courants sociaux divers qui poussent dans ce sens; et des causes internes, notamment la transformation des autorités spirituelles en vecteurs purement sociaux ou politiques.
En période de matérialisme, qui entraîne la multiplication des besoins artificiels et la recherche effrénée du confort, les gens sont demandeurs d’une dimension plus verticale et même d’une transcendance. Rien de naïf dans cette attente. Difficile cependant d’y répondre dans un monde occidental, fils des Lumières et passionné d’égalité, habitué à vivre sans religion. Or tout n’est pas politique, tout n’est pas social chez l’être humain.
Ce qui résulte de l’effacement progressif du christianisme, est que d’autres religions qui n’ont pas la peur de s’affirmer ni la pudeur de leur identité occupent la place désertée. Les revendications de ces religions de substitution – et parfois de ces sectes – se font conquérantes. Cependant, force est de constater avec un certain bonheur que c’est dans les formes de communauté les plus modestes, les plus entachées de simplicité intellectuelle, que le christianisme assure sa vie historique, y compris pour maintenir l’élan spirituel et le message religieux qui lui est propre.