«Le port de Gabicce», huile sur toile, Germaine Ernst, 1965.

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L’artiste Germaine Ernst à la «une» de l’Espace Arlaud de Lausanne

31 Jan 2024 | Culture, histoire, philosophie

Libre de toute tendance, l’artiste vaudoise a consacré sa vie à la peinture, à la gravure et au dessin. Traversée du 20e siècle avec une œuvre très personnelle à laquelle l’Espace Arlaud, à Lausanne, consacre une grande rétrospective.

Elle parcourt les paysages urbains et champêtres, voyage dans l’ici et l’ailleurs à coups de vigoureux contrastes ou de subtiles variations de valeurs ancrés dans son talent de coloriste qui joue des effets de lumière captés par toutes les saisons, tous les temps et jusqu’au fond de la nuit.
Suissesse née à Alger en 1905, disparue à Lausanne en 1996, Germaine Ernst passe sa vie dans la capitale vaudoise où elle étudie à l’Ecole cantonale du dessin auprès de professeurs tels qu’Abraham Hermanjat, imprégné de fauvisme, de Nora Gross et de Violette Diserens. C’est aux côtés de cette dernière qu’elle apprendra plus tard l’art de la gravure qui lui apportera sa première renommée. «Elle est d’abord cette artiste qui, passée aussi par les Beaux-Arts à Paris, engage son œuvre figurative dans une voie indépendante qui échappe aux tendances et aux écoles. Menue, mais au caractère bien trempé, tenace et combative, son implication dans plusieurs associations d’artistes atteste par ailleurs de sa volonté à faire reconnaître le statut d’artiste au féminin», relève Sébastien Dizerens, commissaire de la rétrospective.

Le Sud, un aimant

Au fil des trois salles de l’exposition qui présentent 235 peintures, gravures et dessins se succèdent les principaux thèmes qui ont inspiré l’artiste. Une multitude de paysages issus de ses voyages en Afrique du Nord, en Italie, en Espagne ou dans le Midi de la France, dans ces régions du Sud qui l’attirent comme un aimant et qui ont sans doute contribué à l’intensité lumineuse de sa palette.
Mais la part belle est aussi donnée à l’Arc lémanique et la campagne de Rovéraz, sur les hauts de Lausanne, où Germaine Ernst vit et crée. Vignobles en paliers, ruelles baignées de soleil, vertiges de vues nocturnes plongeantes, ports, chantiers en construction révèlent une justesse de traits qui imprègnent ses sujets d’une beauté graphique. S’ajoutent à cette œuvre prolifique et homogène des scènes de genre, des natures mortes, des portraits et sujets religieux, tandis que son regard des années 1970 porté sur les migrants, les démunis, les prisonniers, dénonce aussi par des tailles mordantes la misère, l’injustice et l’oppression.
Plus de soixante ans de création entre tradition picturale, gravure dont l’artiste maîtrise tout le processus et recherches personnelles, entre respect de l’autre et affirmation de soi. Interrogée en 1981 sur son processus de création par Bernard-Paul Cruchet, critique d’art et artiste, Germaine Ernst répond: «Je ne cherche pas, je vois».

«Le Renard», pointe sèche, Germaine Ernst 1934.

Collection d’estampes

En parallèle de l’œuvre de Germaine Ernst, l’exposition dévoile pour la première fois la collection d’estampes contemporaines constituée par la Fondation portant son nom, créée en 1988 et dont le but est de garantir l’avenir des créations de l’artiste, mais aussi de soutenir d’autres artistes. Une quarantaine des cent estampes acquises entre 2000 et 2017 mettent en valeur les diverses facettes de douze artistes, d’œuvres plus picturales (C. Bolle, F. Verdier, F. Pont) à des compositions plus construites (S. Kropf, C.de Montaigu, M. Leiter, O. Estoppey) ou plus intimes (E. Quinche, A. Evrard, C. Jacques), voire à des ensembles plus figuratifs (Mingjun, Luo, M.-J. Imsand).

 

Viviane Scaramiglia

Exposition «Des jours et des nuits,
Germaine Ernst, peintre et graveuse»

 

Espace Arlaud
2B, place de la Riponne
1005 Lausanne

 

Mardi au vendredi 12h-18h
Samedi-dimanche 11h-17h
Jusqu’au 31 mars 2024.