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Les quatre vérités de Jean-Marc Vaudiau

Les cohortes noires du Bien

10 Jan 2024 | Les 4 vérités de Jean-Marc Vaudiau

Le totalitarisme moderne, le «soft
Goulag», s’appuie sur les réseaux
sociaux qui se chargent d’exciter
la meute des impatients.

«Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît». La réplique de Michel Audiard, datant de 1963, a fait le tour des popotes. Aujourd’hui, 60 ans plus tard, l’auteur aurait à s’adapter à l’air du temps: «Les cons, ça interdit tout». La chasse est ouverte à tout ce qui sort de la bien-pensance et les cohortes noires du Bien frappent partout. L’alerte avait été donnée lorsque «Tintin au Congo» avait fait l’objet de signalements.
Bien sûr, la censure concernant les œuvres culturelles est antérieure à Hergé, mais tout le monde avait lu Tintin et donc pouvait s’en faire une idée. Politiques, sexuels, religieux… les motifs de censure sont légion. La mise à l’Index croît avec la bigoterie. Quelque 3362 références de livres ont été interdites et retirées des établissements publics aux Etats-Unis. Essentiellement phénomène d’imprimerie, la censure se heurte au paradoxe qu’avec Internet, on peut avoir accès à tout: on censure ce qui se déverse généreusement sur la place publique.
L’affaire du grossier Depardieu est symptomatique: le document diffusé sur «France  2», «Complément d’enquête» ,   montre un être détestable, ordurier. Un sale type qu’on sait poursuivi pour viol et agression sexuelle. On songe aux victimes. Mais le voilà coupable sans que cela ait été validé par la justice. Durant des siècles, c’était les régimes totalitaires qui présumaient les individus coupables; les démocraties, elles, garantissaient la présomption d’innocence jusqu’au jugement, y compris aux puissants. Or le totalitarisme moderne, le «soft Goulag», s’appuie sur les réseaux sociaux qui se chargent d’exciter la meute des impatients. C’est en meute qu’on y hurle pour «se» faire justice.
Et lorsqu’un service public comme la RTS opte pour la censure et décide de ne plus diffuser de films avec Depardieu en vedette, on se demande au nom de quel principe totalitaire elle agit. Elle n’a pas à penser pour son public captif, contraint à l’engraisser! Je pense aujourd’hui que 200 francs de redevance est encore trop cher payer.