«L’Information Immobilière» est parue

L’écrivain Julien Green était sensible à ce qu’il appelait parfois le mystère de la ville, c’est-à-dire ce lieu de vie si complexe et presque insaisissable qui recense toute la réalité, à la fois économique et politique, mais avant tout humaine, relationnelle et esthétique, d’une société. La revue romande trimestrielle «L’Information Immobilière» se penche à son tour, dans son numéro qui vient de paraître, sur ces mystères que sont Berlin, Milan, Kilamba (en Angola) ou New York. La revue explore aussi l’œuvre foisonnante de l’architecte italien Renzo Piano.

«L’information Immobilière» parle d’immobilier au sens le plus large et le plus intéressant: la construction, l’urbanisme, l’architecture, le design, l’art, le jardinage, les modes de vie. Un cocktail riche et diversifié que l’on retrouve dans son dernier numéro qui propose de bien agréables moments de lecture et de réflexion. Au centre de plusieurs articles, cette étrange réalité qu’est la ville. D’où vient la ville? Quelle nécessité, quelles métamorphoses incessantes, quel rôle structurant et même vital dans la vie des sociétés? La ville est-elle forcément au cœur de l’aventure humaine, est-elle le lieu naturel de la vie des hommes?
Comme l’expliquent les auteurs du dossier consacré aux nouveaux défis de la ville, «on compare souvent la ville à un organisme vivant. De la même manière qu’en biologie, les êtres évoluent en fonction de leur environnement, la cité doit s’adapter à l’air du temps. Le confort de ceux qui l’habitent en assurent le fonctionnement, lui garantissant la survie économique et sociale par son pouvoir d’attraction. Né dans les années 60, le concept de ville nouvelle fantasmait ce succès. L’urbanisme apparaissait comme la réponse à tous les problèmes».

Le Corbusier, non merci!

Désenclaver les centres-villes, construire la ville (les HLM, les murs à mourir de tristesse) à la campagne, réinventer les fonctions de base de la vie sociale (loisirs, détente)… Les lendemains qui chantent, en l’occurrence, ont été comme ailleurs des lendemains qui déchantent et qui ont provoqué une espèce de défiance, qui n’en finit plus, sur les capacités de la société à réinventer la ville de manière consciente et volontaire, de manière rationnelle et logique. Le Corbusier n’est-il pas passé par là, avec sa folle envie de la table rase (à Paris notamment) et sa croyance dans la machine à habiter et à vivre? La ville idéale n’est-elle pas plutôt celle qui a été façonnée par l’histoire longue, la cité élaborée peu à peu, au fil du temps et des générations? Les habitants d’une ville ne sont-ils pas reliés à tous ceux qui les ont précédés et ne vivent-ils pas aussi un peu pour tous ceux qui viendront après eux?
«L’Information Immobilière» explique en tout cas que la ville est une réalité dense et intense, une réalité profonde qui ne cesse et ne cessera de se réinventer. Les années 60 sont désormais loin derrière nous, avec leurs promesses et leurs illusions, mais la ville continue son petit bonhomme de chemin. De nouvelles réalités sont apparues, de nouvelles envies, des contraintes qui peuvent devenir autant d’espaces de liberté. «La voiture qui régnait sur les villes va être bientôt bannie, poursuivent les auteurs du dossier, le réchauffement climatique impose un urbanisme et une architecture en phase avec la nature. Ailleurs dans le monde, en Asie plus particulièrement, des chantiers titanesques pour loger des millions d’habitants surgissent malgré tout de nulle part. Avec la promesse, à chaque fois, de bâtir la ville la plus high-tech, la plus confortable et la plus durable».
Les villes, en fait, existent telles qu’elles sont ou telles qu’elles voudraient être, comme l’explique un autre article de «L’Information Immobilière». On découvre Kilamba, une ville à 20 kilomètres de Luanda, la capitale de l’Angola habitée par cinq millions d’habitants, soit un tiers de la population du pays. Kilamba est une ville nouvelle lancée en 2008 par le président dos Santos, avec ses ambitions délirantes de 750 tours, toutes construites, qui devait tout bouleverser mais qui reste quasiment une ville fantôme, à peine peuplée par 70 000 habitants alors qu’elle en ambitionnait au moins un demi-million. Et puis on retrouve Berlin, réunifiée et plus vibrante que jamais. On se balade aussi à Milan et à New York, l’éternelle résiliente.

Renzo Piano

Architecte star depuis un demi-siècle, créateur du fameux Centre Pompidou à Paris, Renzo Piano figure aussi au menu de cette livraison de la revue publiée par le groupe romand SPG-Rytz. On se promène dans ce que la rédaction appelle «ses vaisseaux», tant ils sont portés par le mouvement, l’espace et la lumière. Palais de justice, gratte-ciel, hôpitaux, salles de concert…
Dans la ville qui ne dort jamais, c’est-à-dire toutes les villes de tous les pays du monde, passé, présent et futur poursuivent leur valse qui n’aura pas de fin.

Robert Habel