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lectures - Pour la route ou la plage

Trois livres à emporter en vacances

18 Juin 2025 | Culture, histoire, philosophie

L’été arrive, avec ses envies de lecture sur la plage et sous le soleil. Un écrivain prophétique et franchement apocalyptique, Jean Raspail; un romancier en quête spirituelle, Paulo Coehlo, et deux auteurs qui adorent et recensent toutes les cuisines du monde.

«Jean Raspail, aventurier de l’ailleurs»,
par Philippe Hemsen, préface d’Erik Orsenna,
Editions Albin Michel.

Jean Raspail, aventurier
de l’ailleurs

Il aimait les espaces infinis, les terres rudes et légendaires, les contrées mystérieuses et farouches. Il traquait les signes des civilisations disparues et des peuples engloutis, les traces les plus infimes de l’aventure humaine. Décédé le 13 juin 2020 à Paris, à 95 ans, Jean Raspail, explorateur et écrivain, aurait eu 100 ans le 5 juillet prochain. C’est sa vie et son œuvre – des récits de voyages, des romans – que Philippe Hemsen, déjà auteur d’une biographie de Stephen King, raconte dans un ouvrage très documenté et rigoureux, «Jean Raspail, aventurier de l’ailleurs».
Un titre légitime qui ouvre l’horizon, mais un titre ambigu qui dilue l’essentiel, un peu comme une forêt foisonnante qui cacherait l’arbre unique, à savoir le roman d’anticipation, devenu un best-seller mondial, qui a fait la gloire de Jean Raspail, «Le Camp des saints», paru il y a plus d’un demi-siècle, en 1973, et plus actuel que jamais. «Ce livre, pour moi, cela a été à la fois un tremplin et une casserole», confiait Jean Raspail en 1993.
Ce que raconte «Le Camp des saints», c’est tout bonnement la fin de l’Occident, envahi par des masses de migrants venus du Gange sur des rafiots pourris qui débarquent un beau jour sur les côtes françaises, entre Cannes et Saint-Tropez, ces hauts-lieux de l’élégance et de la douceur de vivre. Minée par la mauvaise conscience et malade de culpabilité, la France laisse entrer ces milliers de misérables et, par une sorte de rupture civilisationnelle et de vivre-ensemble à l’envers, se soumet à la loi du nombre et abdique tout son héritage historique, culturel, identitaire, ainsi que son sens de la grandeur et du panache.
«Ce ne fut pas la fin du monde, mais, tout au plus, la fin d’un monde», commentait Jean Raspail qui n’en voulait pas aux migrants, mais à la société française dans son ensemble, un peu comme le vice-président américain J.D. Vance qui dénonçait récemment à Munich les Européens incapables de défendre leurs valeurs de démocratie et de liberté.
Dominée par «Le Camp des saints», l’œuvre de Jean Raspail est aussi celle du dépassement de soi et du rêve au-delà de tout. Elle se déploie souvent – c’est un peu sa faiblesse – sur le seul registre de l’imaginaire pur et du renoncement à toute action réelle. Son biographe, Philippe Hemsen, s’attarde, parmi une quinzaine de romans, sur «Qui se souvient des hommes…», les hommes en question étant les Alakalufs, assassinés quasiment un à un par les colonisateurs (une sorte de contrepoids non-dit au si embarrassant «Camp des saints»!), et sur «Moi, Antoine de Tounens, roi de Patagonie», épopée d’un avoué français (1825-1878) qui, en 1860, s’était proclamé monarque, sous le nom d’Orllie-Antoine 1er, d’un vaste empire en Amérique du sud.
Philippe Hemsen rappelle aussi l’extraordinaire, la poignante cérémonie que Jean Raspail avait organisée à la mémoire du roi Louis XVI, le 21 janvier 1993, à 10h22, sur le lieu et à l’heure de son martyre, à Paris, pour commémorer le bicentenaire de son assassinat par les révolutionnaires français.

 «Les Valkyries», par Paulo Coelho,
Editions Flammarion.

Les Valkyries

C’est un pays très réel et tout à fait imaginaire, un espace où les mondes se rejoignent et laissent entrevoir un paysage spirituel, mystique, qui devient comme une porte d’accès à ces fameuses «réponses aux questions sans réponse» dont parlait Malraux. Auteur du roman initiatique et best-seller mondial «L’Alchimiste», en 1988, l’écrivain brésilien Coelho raconte dans «Les Valkyries» le voyage qu’il fit avec sa femme, Chris, dans le désert de Mojave, en Californie, l’année de la parution de «L’Alchimiste». Ils vont rencontrer Vahalla, la première des Valkyries, une troupe de femmes sillonnant ce grand espace nu et silencieux, sauf pour ceux qui veulent voir et écouter. Etabli à Genève depuis une vingtaine années, l’auteur poursuit sa quête spirituelle au cœur de la ville, avec le bruit du désert comme une petite voix intérieure.

«L’Epicerie du monde»,
par Pierre Singaravélou et Sylvain Venayre,
Editions Fayard.

L’épicerie du monde

C’est une invitation au voyage, une invitation savoureuse qui permet de faire et de refaire indéfiniment, chez soi ou au restaurant, le tour du monde. Pizzas, sushis, hamburgers, roquefort, curry, beurre de yak, ketchup, sandwiches, rhum, champagne… Ce sont toutes les cuisines du monde, toutes les créations, toutes les spécialités que les deux auteurs passent en revue dans ce livre dense et agréable à lire. Car si la mondialisation concerne surtout l’économie et la politique, où elle est d’ailleurs rarement heureuse – n’en déplaise à son prophète de pacotille Alain Minc -, elle s’applique aussi au champ des plaisirs de la table et à l’infinie diversité des saveurs. L’épicerie du monde, c’est l’histoire contemporaine à travers les goûts, les traditions, les rituels. C’est l’imagination dans l’assiette et la rencontre joyeuse des peuples et des cultures.

 

Robert Habel

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