Thierry Barbier-Mueller, administrateur-délégué de la SPG, en compagnie des cinq finalistes du Prix : Fanny Desarzens («Galel»), Valentin Decoppet («Les Deshérités»), Louise De Bergh («Hermès Baby»), Emmanuelle Robert («Malatraix»), Karin Suini («La promesse de l’Ogre»).

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«Hermès Baby» primé par le Prix littéraire SPG

Quatre femmes liées par le destin

5 Oct 2022 | Culture, histoire, philosophie

Le Prix littéraire SPG du premier roman romand a été décerné fin septembre à Louise De Bergh pour son ouvrage «Hermès Baby», paru aux Editions Romann. Dans cet ouvrage, l’auteur conte le destin d’une lignée de femmes en proie au désir de créer. Y parviendront-elles? Une question qui en amène une autre, plus large: comment l’héritage de nos ancêtres – avec sa part de traumatismes – marque-t-il notre identité?

Louise De Bergh suit quatre générations de femmes issues de la même famille, artistes et mères que tout rassemble, sauf le nombre d’années. Quatre générations qui évoluent entre la Vienne du début du XXe siècle et le Paris contemporain, en passant par Katmandou dans les années 70. Chapitre après chapitre, le lecteur suit les vies tumultueuses de Adèle, Dora, Elise et Françoise: l’arrière-grand-mère, la grand-mère, la mère et la fille portent un lourd héritage familial, gâché par les non-dits, les amours déçus et la tristesse. Cette souffrance transmise silencieusement de génération en génération provoque en elles un profond mal-être. «Cette chaîne éternelle est le lot de nombreuses familles», souligne Louise De Bergh. Mais cela n’est pas une fatalité et le personnage de Françoise montre que l’on peut rompre le silence destructeur et impulser une force créatrice à son existence».

Matrilinéarité et trait de dessin

L’art et l’artisanat sont des thèmes centraux de «Hermès Baby». Pas étonnant si l’on connaît le parcours de Louise De Bergh, qui étudié l’histoire de l’art à la Sorbonne, avant de voyager à Madagascar, où elle s’initie au travail du cuir (de poisson…). Une pratique qui lui donnera envie de devenir maroquinière et de s’installer sur les rives du Léman en ouvrant son atelier L&Cuir. Plusieurs artistes ponctuent son roman, dont le peintre Egon Schiele, contemporain de Klimt dans la Vienne Art Nouveau, qui représente l’unique héros masculin et orchestre le destin des quatre femmes. «L’artisanat, tout comme l’écriture, dépasse le travail des mains: les deux impliquent le corps et l’esprit dans un engagement total», poursuit la femme écrivain, qui accorde une place essentielle à la sensorialité et à la matérialité. Pour rédiger et créer (de l’art), rigueur et régularité sont indispensables».
Parmi les personnages célèbres cités dans le roman, on retrouve Françoise Sagan (1935-2004), à laquelle le titre fait d’ailleurs référence, puisqu’elle affectionnait sa petite machine à écrire suisse. L’Hermès Baby – le mythique modèle de machine à écrire est, comme le relève l’auteur, «un objet qui a la capacité de poser des mots et de donner naissance». Donner naissance, c’est bien ce que Louise De Bergh a fait. En réalité, ce fut même une double gestation, puisqu’elle a conçu son roman en même temps que son premier enfant: «Je pense qu’une créativité décuplée anime les femmes pendant leur grossesse», dit celle qui, dans son «temps libre» est blogueuse littéraire (voir: www.mespetiteschroniques.com). «Les livres ne sont pas forcément un moyen de s’échapper, conclut la jeune femme. J’aime l’idée qu’ils permettent d’accéder à une forme de vérité et ceux de Françoise Sagan en sont l’illustration parfaite». Quant aux mots de la lauréate du Prix SPG, c’est certain, ils ont un pouvoir libérateur. Une belle fiction qui résonnera en chacun(e) de nous.

 

Véronique Stein

GROS PLAN

Neuvième édition

 

Le Prix littéraire SPG du premier roman romand met en lumière et récompense une première œuvre littéraire d’un auteur romand, rédigée en langue française et éditée par une maison d’édition suisse. Ce prix a été créé en 2014 sous l’impulsion de Thierry Barbier-Mueller, administrateur-délégué de la Société Privée de Gérance (SPG). La généreuse somme de CHF 5000.- est accordée à l’écrivain dont l’ouvrage est sélectionné.