culture - Exposition au musée Rath/GE
La géographie d’une vie
A travers une sélection de photographies, d’articles, d’ouvrages et de documents surprenants, (re)découvrez le parcours hors-norme d’Ella Maillart! Cette femme écrivain, sportive, voyageuse et photographe, née à Genève en 1903, n’a cessé de transmettre sa notion d’unité du monde. Plus qu’un hommage, cette exposition – réalisée en partenariat avec l’association Les Amis d’Ella Maillart et Photo Elysée -, a pour ambition de créer des ponts entre les générations. C’est pourquoi deux artistes contemporaines, Anne-Julie Raccoursier et Pauline Julier, ont également été conviées, faisant dialoguer leur travail avec celui d’Ella Maillart.
Guidés d’abord vers l’espace central du musée Rath (annexe du Musée d’art et d’histoire / MAH), les visiteurs abordent la vie et l’œuvre d’Ella Maillart à travers ses archives déployées en vitrine et sous forme d’une ligne de temps longue de douze mètres. Ces pièces révèlent le quotidien de la voyageuse, autant que ses talents d’écrivain. On ressent la richesse de ses expériences, son amour des grands espaces, ses qualités sportives, sans oublier son sens de l’humour. Sur les murs, une sélection de paysages et un choix de textes grand format ouvrent des fenêtres vers les contrées arpentées par Ella Maillart.
Entre voyages terrestres
et spirituels
Dès son plus jeune âge, c’est grâce au sport qu’Ella Maillart pallie une santé fragile: le ski en hiver, la voile en été et la montagne en tout temps. Son amour de la navigation, qu’elle pratique avec son amie Miette de Saussure sur le Léman d’abord, puis en Méditerranée, l’incite à participer, en 1924, aux régates des Jeux Olympiques de Paris.
Rêvant de quitter une Europe dévastée par la Première Guerre mondiale, Ella Maillart accumule les petits boulots. En 1930, à Berlin, elle rencontre des exilés russes et, après un séjour de six mois à Moscou et dans le Caucase, se décide à écrire son premier ouvrage «Parmi la jeunesse russe» (1932, Editions Payot). Cette même année, elle part découvrir le Turkestan russe. Elle fait le voyage de retour seule, sans permis et en évitant les postes-frontière. La publication du récit de ce périple, «Des Monts Célestes aux Sables Rouges», est un grand succès. Lorsqu’en 1934, Le Petit Parisien lui passe commande d’un reportage sur la Mandchourie (Chine), elle comprend que ce type de mission lui permettra de financer ses voyages. Elle retrace dans «Oasis interdites» sa traversée de la Chine en compagnie de Peter Fleming et, en 1947, dans «La Voie cruelle», celle qui l’a amenée aux confins de l’Afghanistan avec Annemarie Schwarzenbach (écrivain et photographe née à Zurich). Lors de ses voyages, Ella Maillart traverse des régions qui furent parmi les plus difficiles à atteindre et qui sont aujourd’hui les centres de gravité de la géopolitique mondiale.
Le début de la Deuxième Guerre mondiale surprend la voyageuse à Kaboul et elle décide de rester en Asie. A Tiruvannamalai, dans le sud de l’Inde, elle rencontre le sage Ramana Maharishi. Au contact d’une spiritualité où le voyage intérieur s’avère aussi fructueux que les voyages terrestres, elle pose les bases de sa notion d’«unité du monde». Sa curiosité et son intérêt pour d’autres formes de traditions sacrées composent alors sa quête spirituelle qu’elle évoquera dans «Croisières et caravanes», puis dans «Ti-Puss, ou l’Inde avec ma chatte».
Longue descente dans les Monts Célestes, Kirghizistan, 1932
La force de transmission
De retour en Suisse à la fin de la guerre, Ella Maillart s’installe à Chandolin en 1948. Le village valaisan devient son refuge et son chalet, qu’elle baptise Atchala en souvenir d’une colline sacrée indienne, son lieu de travail. Lorsqu’en 1951, le Népal ouvre ses frontières, Ella Maillart repart. Dans «Au pays des Sherpas», elle fixe en mots et en images les paysages grandioses autant que la métamorphose de ce pays, à laquelle elle assiste en direct. De 1957 à 1987, elle organise des voyages culturels, invitant les participants à se découvrir eux-mêmes à travers le monde qui les entoure.
Carla Angyal
Ella Maillart, 1953.
GROS PLAN
Se confronter au monde avec authenticité
L’une et l’autre des deux travées latérales du musée sont occupées par les œuvres d’Anne-Julie Raccoursier et de Pauline Julier. Ces artistes contemporaines relèvent un défi: grandes voyageuses elles-mêmes, leurs démarches, entre réalité et fiction, déconstruisent les clichés. Le travail d’Anne-Julie Raccoursier se compose d’interventions conceptuelles, de vidéos et d’installations. Son intérêt se porte sur les questions d’identité, de paradoxe, sur la culture du divertissement et ses rituels, ainsi que le mouvement. Pour elle, la figure d’Ella Maillart est celle d’une anticonformiste qui a choisi sa destinée et forgé sa vie en toute indépendance.
Quant à Pauline Julier, elle explore la façon dont histoires, rituels, connaissances et images créent et animent les liens entre les humains et leur environnement. Ses installations et ses films composent avec des éléments de différentes origines pour restituer la complexité de nos rapports à l’univers.
Davantage d’informations :
www.mahmah.ch/programme/expositions/ella-maillart