Philosophie immobilière

Les logements prennent toute la hauteur de leur valeur. Véritables coffres-forts inviolables, ils sont devenus le placement le plus sûr dans l’univers des actifs à durabilité immuable. L’argent se gagne et se perd au gré de la générosité ou de la cupidité du croupier d’affaires. L’art se négocie au gré des sciences aléatoires et des humeurs changeantes des marchands. A force d’en retrouver dans les greniers et les caves, les Van Gogh, les Vinci, les Picasso vont-ils exploser ou couler leur cote? La demande exponentielle en matières rares est temporelle, à la merci du nouveau matériau qui culbutera tous les autres.

L’inflation des prix trouvera tôt ou tard son mur de la raison, le changement climatique des attentes, des tendances et des besoins en modifiera sérieusement sa trajectoire. Le calcul des probabilités amène de la poésie, du rêve et des cauchemars en Bourse, les gourous disjonctent dans leurs prévisions et leurs injonctions. L’esprit tranquille, argument publicitaire plus que nécessaire, part en Chartreuse retrouver calme, paix et sérénité. Quitter le monde du Dieu Dollar pour vivre d’eau pure et de pain levé séduit la foule et devient majorité.

Le logement à loyer hypothécaire se réveille en sanctuaire. La frugalité et la conscience des biodiversités anéantissent la société de consommation. L’humanité dé-consomme, elle dévalue et déconstruit ses valeurs d’évolution. La mobilité se fait à pied ou à cheval, la voiture et les autoroutes rentrent définitivement au garage de l’histoire. Où donc mettre à l’abri les milliards? Dans le logement, pardi! Là où l’on habite, regarde la télé, mange, dort et s’ennuie. Acheter la loyauté, la fidélité, la qualité des locataires; le nouvel eldorado unique des investisseurs fait son prix. Les bons locataires, soigneux, honnêtes et vertueux, il faudra payer pour les avoir.

Pécub