Esquisse du projet retenu pour le futur Musée de la bande dessinée.

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culture - Le Musée de la BD se dessine

Cité de Calvin, capitale de la BD

22 Fév 2023 | Culture, histoire, philosophie

Deux siècles après l’invention du 9e art par l’auteur genevois Rodolphe Töpffer, le projet de Musée de la bande dessinée à la Villa Sarasin, près de Palexpo, franchit un cap décisif. Le bureau genevois d’architecture YKRA vient de remporter l’appel d’offres pour la restauration et la scénographie muséale de l’auguste demeure, à forte valeur patrimoniale, sise au Grand-Saconnex. Le coût de la réalisation prévue pour fin 2025 est estimé à 6,25 millions.

Les contours du futur musée de la bande dessinée se précisent. L’Etat de Genève, la Ville du Grand-Saconnex et l’Association pour un musée de la bande dessinée (AMBDI) née en 2019, qui collaborent sur le projet, ont reçu quelque quatre-vingt réponses de bureaux suisses et étrangers à leur appel d’offres. Sur quinze dossiers retenus, le choix s’est porté sur le bureau d’architecture genevois YKRA, connu pour ses scénographies qui cassent les codes traditionnels. L’art de la narration et de la théâtralité de Youri Kravtchenko et du chef de projet Raphael Bonbon esquisse un concept muséal autour d’une «boîte à outils» ouverte, flexible et réversible, où tous les possibles s’offrent à la créativité, en écho à la pratique artistique de la BD. Dans la foulée, la Villa Sarasin (1832), inscrite au patrimoine, verra son enveloppe restaurée, ses revêtements renouvelés et ses circulations intérieures fluidifiées. «Construite sur le modèle palladien, la maison déjà originellement colorée se prête à une colorimétrie intéressante», indique l’architecte, prêt à s’attaquer avec enthousiasme à l’avant-projet. Comptant une surface utile d’environ 1375 m2, l’édifice comprendra en sous-sol un atelier et le stockage des éléments d’expositions, ainsi qu’un service de bar et restauration qui activera la cuisine professionnelle existante.

Le comblement d’un manque

En attendant que la Confédération reconnaisse le 9e art comme une discipline à part entière, à l‘heure où la BD suisse connaît une vitalité extraordinaire, il est réjouissant que Genève exprime un peu de fierté par rapport au patrimoine de la bande dessinée lié à Rodolphe Töppfer. Considéré comme le père du genre, le créateur genevois est évoqué dans les musées de la BD à travers le monde. «Le fonds de la Bibliothèque de Genève est d’une richesse qui vaut sa valorisation et sa mise en rapport avec la production contemporaine», relève l’AMBDI, présidée par Zep et qui réunit plusieurs auteurs, tels Albertine, Chappatte, Exem et Tirabosco.

«Soutien au terrain inventif émergent et confirmé, étendu à d’autres domaines graphiques comme l’illustration de presse, le musée aura aussi pour ambition de développer des activités autour de ce médium accessible mais exigeant», indiquent les trois parties prenantes.

Le projet initié par le Canton s’inscrit dans sa politique du livre et ajoute une pierre au dispositif existant, allant du Prix Töppfer et du Prix BD Zoom aux filières de formation dédiées, assurées par la HEAD et l’Ecole supérieure de bande dessinée (ESBDI) lancée en 2017. Le Département cantonal de la cohésion sociale (DCS), qui englobe la culture, va déposer au printemps un projet de loi de subventionnement au Grand Conseil, tandis qu’une Fondation de droit privé est en cours de constitution, afin de recueillir des fonds et contribuer au financement et au fonctionnement de l’institution. En charge du DCS, Thierry Apothéloz souligne «le fort potentiel de ce musée en matière d’accès à la culture pour le plus grand nombre et de renforcement du lien social». Bien que décentrée, la villa entourée d’un jardin, proche de Palexpo, a remporté l’adhésion générale, notamment pour sa capacité d’extension difficilement imaginable en ville. Rendez-vous au musée, à l’horizon 2025!

Viviane Scaramiglia