éVéNEMENT - Ecrivain franco-russe de premier plan
Andreï Makine à Genève
Prix Goncourt en 1995 pour son roman «Le testament français» (Editions Gallimard Folio), l’écrivain russe devenu français Andreï Makine est l’invité, ce mercredi 8 mars, de 12h30 à 14h, de la librairie Payot (Rues-Basses) à Genève, pour parler de son nouveau roman, «L’ancien calendrier d’un amour» (Editions Grasset). Une rencontre exceptionnelle avec un romancier qui est aussi un grand spirituel.
Il est né dans un pays qui n’existe plus, l’Union soviétique, mais il est l’héritier et le continuateur d’un pays, la Russie, qui existe toujours et a même résisté à 70 ans de communisme. Un pays de foi intense, d’inquiétude spirituelle, de mysticisme à fleur de peau. Né le 10 septembre 1957 à Krasnoïarsk, en Sibérie, Andreï Makine est un auteur totalement inclassable, un grand spirituel doublé d’un poète qui vit et évolue dans un monde à part, celui de l’amour et de la tendresse, celui de l’individu éternellement menacé par la violence et l’instinct de mort du collectif, du «troupeau» comme disait Jean-Jacques Rousseau.
Prix Goncourt pour son roman «Le testament français», Andreï Makine ne cesse de surfer entre les mondes avec une sorte de sensibilité douloureuse et tragique. Il rêve d’amour et d’absolu, mais la vie le ramène sans cesse, lui ou ses personnages, à la dureté impitoyable et à la violence du monde tel qu’il est. Elu à l’Académie française en 2016, il ne cesse de parler de sa Russie natale, qui est au cœur de tous ses livres, tout en faisant résonner une petite musique infiniment plus vaste, un message universel qui s’adresse aux hommes et aux femmes du monde entier et de toutes les cultures. Il se tient en fait au carrefour des mondes et des époques, la guerre et la paix ne cessant de s’enchevêtrer dans une espèce de danse insaisissable et souvent monstrueuse, avec sa logique propre, idéologique et étatique, qui broie les individus et les consciences.
L’amour au milieu de la guerre
«L’ancien calendrier d’un amour», qui vient de paraître, raconte encore et toujours la même histoire: un jeune homme qui rêve d’amour et qui le trouve brièvement, avant d’être happé dans les déchirements et les abominations de ce que l’on a appelé la révolution bolchévique. Quelques instants d’amour et de bonheur, miraculeux, intenses, inoubliables surtout, qui marqueront ensuite le sens de toute une vie. Quelques moments de grâce au milieu d’une guerre interminable, quelques fulgurances miraculeuses qui témoigneront de cette aventure infiniment brève et précieuse qu’est la vie de chacune et de chacun d’entre nous.
D’un côté, l’aspiration au bonheur individuel et, de l’autre, la violence de la société et de l’Etat qui est toujours «le plus froid des monstres froids», comme disait Nietzsche. Livre après livre, Andreï Makine ne cesse de raconter le drame de tous ces gens qui n’aspirent qu’à vivre leur vie, mais se retrouvent happés par la violence du pays dans lequel ils se trouvent. Makine a gardé le rythme et la force de sa langue maternelle russe, mais il écrit aujourd’hui en français avec une douceur et une légèreté incroyables: ses livres sont des poèmes en prose, d’une simplicité et d’une beauté sans pareil.
«L’ancien calendrier d’un amour» est un roman sensible et émouvant, mais le chef-d’œuvre d’Andreï Makine, à lire absolument, c’est «La vie d’un homme inconnu» (Editions du Seuil). Le siège de Léningrad, la mort partout, le désespoir et, au-delà de tout, l’amour…
Il faut lire aussi ses livres proprement spirituels publiés sous le pseudonyme de Gabriel Osmonde, à commencer par «Alternaissance» (Editions Pygmalion), un roman philosophique profond. Un être humain, constate-t-il, vivra peut-être 20 000, 30 000 ou 40 000 journées dans sa vie. Une durée de vie très limitée mais des rêves infinis! Comment vivre ces journées, ou plutôt chacune de ces journées? Comment vivre chaque jour corps et âme, dans une sorte de bonheur et de reconnaissance? Comment ne pas passer à côté de sa vie?
Robert Habel
Andreï Makine sera à la Librairie Payot,
7, rue de la Confédération, Genève,
mercredi 8 mars de 12h30 à 14 h.