Ne jamais remettre à plus tard l’enregistrement des transactions!

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Cas pratique

Soupçon de vol

28 Sep 2022 | Carrière et formation

Bea était engagée comme vendeuse dans un magasin de prêt-à-porter. Son directeur a remarqué qu’elle ne comptabilisait pas immédiatement tous les articles vendus. La soupçonnant tout de suite de vol, il a organisé des «Mystery-Shopping-Tests» réalisés par une société spécialisée. Il en est ressorti – trois fois sur quatre – que Bea n’enregistrait pas les transactions au moment de la vente. Elle a expliqué qu’elle enregistrait les articles plus tard, mais le licenciement avec effet immédiat a tout de même été prononcé. Le Tribunal l’a toutefois considéré comme abusif.

Selon l’employeur, l’absence de comptabilisation systématique des transactions de la part de Bea, au mépris des instructions, constitue un manquement suffisamment grave pour justifier une résiliation immédiate des rapports de travail. Bea explique que l’employeur incitait ses vendeuses à faire en sorte que chaque client achète au moins trois articles. Cela mettait une forte pression sur le personnel. Afin de donner l’impression d’être une meilleure vendeuse, Bea n’enregistrait pas immédiatement la transaction lorsqu’un client souhaitait acquérir un seul produit qu’il réglait en espèces et elle ne réclamait pas de reçu. Elle ajoutait donc à ces achats deux autres biens achetés par un autre client et simulait une vente groupée de trois articles.

La faute n’est pas la même pour le chômage

L’employeur invoque à l’appui de sa décision que Bea a aussi été pénalisée par le chômage. Une décision de l’Office du chômage de suspendre les prestations ne constitue toutefois pas une preuve de la gravité des actes reprochés, car la notion de faute en matière d’assurance chômage n’est pas identique à celle prévalant sous l’angle du droit du travail. De même, l’appréciation de la faute opérée par la caisse de chômage ne lie pas le juge civil. Pour le chômage, il suffit que le comportement général de l’assuré soit à l’origine de son licenciement pour que la suspension des prestations soit justifiée. Autrement dit, il n’est pas nécessaire qu’il existe un motif de résiliation immédiate du contrat de travail.

Commencer par un avertissement

Un licenciement immédiat peut être prononcé si les circonstances ne permettent pas d’exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail. Si le manquement reproché n’est pas très grave, la résiliation avec effet immédiat ne peut être prononcée que s’il a été répété malgré un avertissement.
Dans le cas de Bea, il n’a pas été établi qu’elle avait effectivement volé son employeur. Les seuls soupçons de vol ne sauraient justifier le licenciement immédiat.
Les reproches faits à Bea étaient donc susceptibles d’altérer le rapport de confiance, mais n’étaient pas assez graves pour mettre fin immédiatement aux rapports de travail. La poursuite des rapports de travail aurait par conséquent été possible, de sorte qu’un avertissement aurait dû précéder le licenciement immédiat, puisque rien ne permettait de conclure que Bea n’aurait pas modifié son comportement après une remise à l’ordre. Le Tribunal a par conséquent considéré le licenciement avec effet immédiat comme injustifié.

 

Nicole de Cerjat
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