cas pratique
Interdiction de renoncer à une créance
Cathy adresse un courrier aux filles de son employeur leur annonçant que vu l’état de santé de leur père, elle ne pense plus pouvoir rester dans l’entreprise et qu’elle attend dès lors sa lettre de licenciement. Elle précise qu’il s’agira de lui payer son salaire durant le délai de congé, ainsi que les vacances non prises et les heures supplémentaires effectuées.
Une semaine plus tard, l’employeur meurt. Les filles présentent alors une convention de cessation des rapports de travail prévoyant le licenciement, le versement de trois mois de salaire correspondant au délai de congé et une gratification exceptionnelle de CHF 11 000.- pour solde de tout compte. La convention est signée et exécutée. Quelques mois plus tard, Cathy invoque le caractère inéquitable de la convention en prétendant au versement d’un montant, correspondant à l’ensemble de ses créances.
Quel salaire pour quel travail?
Par prestation de travail à rémunérer, on entend toute occupation humaine qui tend de manière planifiée à la satisfaction d’un besoin. Il ne s’agit pas nécessairement d’un comportement actif. Une simple disponibilité à travailler doit déjà être qualifiée de prestation de travail, dans la mesure où elle profite aux besoins de l’employeur. Ainsi, le service de disponibilité ou de piquet est une prestation de travail, car le travailleur ne fournit pas sa prestation de manière désintéressée, mais en vue de la prestation principale rémunérée. Ce qui est rémunéré est le fait d’être entravé dans la jouissance de son temps libre. L’indemnité pour le service de piquet peut être inférieure au taux de salaire de base et les parties au contrat peuvent prévoir qu’elle sera intégrée dans le taux de salaire pour l’activité principale.
Rien ne justifie de renoncer
aux créances
Selon le Code des obligations, le travailleur ne peut pas renoncer, pendant la durée du contrat ni durant le mois qui suit la fin de celui-ci, aux créances résultant de dispositions impératives de la loi ou d’une convention collective. La loi prohibe une renonciation unilatérale à des droits qu’elle protège. Une renonciation du travailleur ne serait possible que dans le cadre d’une transaction, mais à condition qu’il y ait une équivalence appropriée des concessions réciproques. Il est donc nécessaire que les prétentions auxquelles chaque partie renonce soient de valeur comparable. Ainsi, une quittance pour solde de tout compte est une déclaration unilatérale de volonté. Si elle est signée par le travailleur dans la période de protection, la renonciation aux prétentions résultant de dispositions impératives de la loi ou d’une convention collective n’est pas valable. Si, par contre l’accord prévoit une contrepartie appropriée fournie par l’employeur, elle sera valable. Autrement dit, il faudra une équivalence des «sacrifices».
Une transaction comporte des concessions réciproques
L’accord signé par Cathy ne fait que régler les modalités de la fin du contrat, soit essentiellement ses prétentions à l’issue des rapports de travail. Ainsi, Cathy a simplement affirmé qu’elle n’avait pas de créances résultant du contrat de travail au-delà du montant de CHF 20 000.- au total proposé par les héritières de l’employeur. Il s’agit juste d’une quittance pour solde de tout compte et non pas d’une transaction, puisqu’elle ne comporte pas de concessions réciproques de valeur comparable. Plus précisément, l’employeur, par ses héritières, n’a proposé aucune contrepartie équitable.
Comme il n’est pas possible de renoncer à une créance en droit du travail, la convention n’est donc pas valable et Cathy peut exiger l’intégralité de ses revenus et indemnités. Les héritières de l’employeur devront ainsi verser un montant correspondant notamment à une indemnité pour vacances non prises, pour le travail effectué durant les jours fériés et pour le service de piquet de nuit.
Nicole de Cerjat
Société suisse des employés de commerce / Service juridique
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