Le Conseil d’Etat doit présenter au Parlement une version révisée du projet de Loi sur l’énergie.

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Spécial énergie - Fabien Anex, nouveau président de l’USPI Vaud

«Valoriser les énergies vertes avec les professionnels de l’immobilier»

12 Juin 2024 | Articles de Une

Fabien Anex, directeur de M&B gérance immobilière à Lausanne, est le nouveau président de l’Union suisse des professionnels de l’immobilier Vaud (USPI Vaud). Elu le 30 mai, il succède à Louis Martin qui a siégé onze ans au Comité et a présidé l’association depuis 2021. Agé de 42 ans, locataire, Fabien Anex arrive à ce poste riche d’une longue expérience professionnelle et de vie. Il est membre depuis neuf ans du comité de l’USPI Vaud et envisage une présidence de trois à quatre ans.

Ancien rugbyman, marathonien (il a couru New York en 2023), pompier bénévole durant huit ans, président d’une société villageoise de jeunesse pendant quatre ans, chef scout, huit ans trompette dans la Fanfare du Jorat, membre du Conseil de l’Abbaye de Vucherens durant seize ans, trésorier depuis 2006 de l’association des commerçants de la rue où se situent ses bureaux, Fabien Anex est un homme ouvert sur les autres et sur l’engagement associatif.
Il se destinait à la police de sûreté, après un CFC d’employé de commerce à Moudon et une maturité professionnelle commerciale, financée en travaillant comme ouvrier d’usine. En 2003, il découvre le monde de l’immobilier lors d’un stage au sein de ce qui s’appelait alors la régie Michaud & Burkhard SA. Sa rencontre avec Daniel Burkhard, qui la dirigeait, l’a amené là où il est aujourd’hui.

De gros dossiers

Fabien Anex arrive à la tête de l’USPI Vaud alors que de gros dossiers sont en cours. Le Conseil d’Etat doit présenter au Parlement une version révisée du projet de Loi sur l’énergie, dont la consultation s’est achevée en novembre. L’application de la LAT par le canton, parfois problématique, et les divergences quant au périmètre d’application du droit de préemption des collectivités publiques illustrent la difficulté à combattre la pénurie de logement dans un contexte où le pragmatisme n’est pas le maître-mot.
S’il est favorable à une révision de la Loi sur l’énergie, Fabien Anex souligne que les mesures d’assainissement des bâtiments doivent être financièrement et techniquement réalisables. Il souhaite une plus grande collaboration avec l’Etat et les communes dans la création de logements et veut renforcer l’engagement politique de l’USPI Vaud, aux côtés de la Chambre vaudoise immobilière (CVI) et d’autres associations économiques.
«Pour nous, professionnels de la gestion immobilière, l’assainissement énergétique du parc bâti est une opportunité de valoriser nos compétences et notre expérience pour accompagner les propriétaires dans la planification et l’exécution de leurs travaux. Nous sommes conscients de l’ampleur de la tâche et favorables à l’encouragement de cette phase de transition», souligne Fabien Anex. Pour autant, l’USPI Vaud rejette le projet de loi tel qu’il a été présenté: «Le projet doit être revu si l’on veut que l’assainissement des bâtiments puisse réellement se réaliser», analyse-t-il.

Isoler sept immeubles par jour

Rénover 40 000 bâtiments et remplacer 90 000 chauffages en quinze ans signifie changer seize installations et isoler sept immeubles par jour. «On peut s’interroger sur la capacité des entreprises à faire face à une telle demande et sur la disponibilité des matériaux nécessaires», relève-t-il. Par ailleurs, les administrations déjà surchargées pourront-elles absorber le surcroît de procédures nécessaires à l’octroi des autorisations de construire?
L’Etat devrait chiffrer le coût de ces travaux pour proposer un programme de subventions qui soit à la hauteur de l’ambition. «Le projet de loi manque totalement de transparence quant aux chiffres. Cela nous empêche notamment d’aborder de manière concrète les questions de financement, de répercussion sur les loyers et d’effets sur la fiscalité», constate-t-il.
Il estime à plusieurs dizaines de milliards de francs le coût des mesures prévues par le projet de loi, alors que les subventions se limiteraient à 120 millions de francs par année, dont la moitié provient de Berne. «C’est clairement insuffisant, d’autant que la lutte contre le réchauffement climatique est l’affaire de tous, propriétaires, collectivités publiques et locataires. Chacun doit en supporter le coût à parts égales», juge-t-il. Et de plaider pour que l’Etat propose aux propriétaires des conventions par objectif qui tiennent compte de leur situation financière et du volume d‘émissions de CO2 du bâtiment, pour fixer des objectifs par palier.

Pour des partenariats privé-public

Fabien Anex entend poursuivre les actions de son prédécesseur en matière de formation continue. «Le rôle du professionnel du conseil immobilier est crucial dans la réussite de la transition énergétique. Après avoir identifié les priorités techniques et architecturales avec l’aide de spécialistes, il doit examiner le financement du projet, les solutions de prêt, les avantages fiscaux et les possibilités de subventions, sans oublier l’impact sur le droit du bail, les démarches administratives ou les spécificités propres aux PPE». Pour cela, indique Fabien Anex, la branche peut s’appuyer sur ImmoDurable, la première formation dans ce domaine, mise en place par l’USPI Formation de la faîtière USPI Suisse.
S’agissant du droit de préemption des collectivités publiques et de la pénurie de logement dans le canton, Fabien Anex soutient les partenariats privés-publics. «A l’heure actuelle, et sauf erreur de ma part, le droit de préemption n’a pas apporté le moindre logement supplémentaire sur le marché locatif, affirme-t-il. Les collectivités publiques doivent favoriser le partenariat privé-public, qui a le grand avantage d’aboutir rapidement à la création de nouveaux logements sans risque financier pour les communes, car ce risque est supporté par le développeur».
«Pour agir efficacement contre la pénurie, et par conséquent sur le niveau des loyers, les autorités doivent consacrer leurs efforts sur les mesures d’encouragement à la production de nouveaux logements: l’accélération des procédures d’autorisation de construire, l’ouverture à plus de compromis entre la protection du patrimoine, les économies d’énergie et les préoccupations urbanistiques», plaide-t-il.
Il se félicite que l’avis de droit que l’USPI Vaud et l’Association des développeurs immobiliers vaudois (ADIV) ont sollicité l’an dernier pour clarifier la question des communes qui acquièrent une parcelle sans avoir les moyens d’y bâtir, mais la transfèrent à un maître d’ouvrage d’utilité publique, a mis en évidence une dérive de l’outil de préemption. A la suite de cette intervention, le gouvernement vaudois a complété le règlement d’application de la loi afin de mieux cadrer son usage.

Les moyens de l’action

Si le canton veut conserver son attractivité et abriter un million d’habitants d’ici une vingtaine d’années, il devra trouver des solutions permettant à l’économie privée de produire suffisamment de logements de qualité, tout en assurant le lien entre les lieux de domicile et de travail. «Nous pouvons apporter notre pierre à l’édifice en ce qui concerne le logement, mais il faut nous donner les moyens de le faire», souligne Fabien Anex.
La garantie de la propriété n’a jamais autant été mise à mal que ces dernières années, assure-t-il. Le droit d’initiative populaire doit être cadré, afin que des plans légalisés, ayant suivi tout le processus démocratique, ne puissent plus être remis en cause par des citoyens. «Le phénomène du ‘Nimby’ (Not in my backyard ou «Pas à côté de chez moi) montre que les solutions classiques d’aménagement du territoire avec des zones légalisées ne suffisent plus à assurer la sécurité du droit», regrette-t-il.

 

Cesare Accardi

Fabien Anex.

GROS PLAN

L’USPI Vaud regroupe 110 membres, gérant plus de 334 000 objets immobiliers. Ces entreprises représentent plus de 2500 collaborateurs, actifs dans la gérance d’immeubles, l’administration de propriétés, le courtage, l’expertise et le développement immobilier.