CULTURE - Ouvrage savant et didactique
Une promenade en héraldique vaudoise
Si l’héraldique évoque le temps passé des tournois médiévaux, elle n’en continue pas moins de susciter l’engouement à l’égard de son univers étrange, à la fois accessible à tous et chargé de mystère. Plutôt qu’un austère traité, Olivier Delacrétaz propose dans la fameuse série des «Cahiers de la Renaissance vaudoise», une promenade dans l’héraldique vaudoise. Une simple balade vraiment? Oui, mais avec un guide amoureux de son pays et de son histoire.
Les exemples sont tous, sauf exception nécessaire, choisis dans le patrimoine héraldique familial et communal vaudois. Pour assurer l’unité de la présentation, les trois cent cinquante blasons ont été redessinés par l’auteur. Enfin, de plaisants dessins humoristico-héraldiques agrémentent un ouvrage qui est vraiment une «Balade en héraldique vaudoise».
Intégré à un cours d’histoire, l’art du blason, science auxiliaire de l’histoire, réveille toujours l’intérêt des élèves, généralement fascinés par Harry Potter, le Seigneur des Anneaux ou bien encore la série Le Trône de fer. Lors d’un changement d’armoiries communales, nombre de citoyens manifestent avec vigueur leur attachement à ce symbole d’une identité collective qui résiste à l’écoulement du temps et subsiste souvent aux fusions communales, les localités pouvant conserver leurs armoiries.
Les enchantements d’un langage mystérieux
Olivier Delacrétaz, graphiste de formation, dessinateur de presse et héraldiste vaudois, dont les connaissances et la valeur artistique des créations lui ont valu d’être sollicité à maintes reprises pour la réalisation d’armoiries communales, décrit clairement l’esprit de l’héraldique, trace synthétiquement les grandes lignes de son histoire, donne les clefs principales du langage du blasonnement, ses règles strictes, mais aussi ses fantaisies.
Il raconte, expériences à l’appui, les problèmes concrets que pose la création d’armoiries. Il trace enfin quelques perspectives conclusives. Le livre se termine par un glossaire des mots essentiels. A la poésie graphique des «meubles», animaux chimériques et végétaux stylisés s’ajoutent les enchantements d’un vocabulaire insolite. Guivre, sinople, escarboucle, alérion, chantepleure, cyclamor, engouler, crancelin, engrêlé, triquètre, redorte n’auront plus de secret pour le promeneur arrivé au terme de sa balade pleine de charme, de couleurs, et de symboles.
Un exposé complet, simple et richement illustré
Que le lecteur ne s’attende pas à un impossible exposé exhaustif et définitif! Olivier Delacrétaz, en bon pédagogue, se limite à présenter brièvement, dans un environnement vaudois, les éléments principaux de l’art héraldique, indiquant, notamment au début de chaque partie, des ouvrages et des sites qui développent son propos qui se veut concis.
L’introduction de cet ouvrage qui fera date est consacrée à l’esprit de l’héraldique et aux mystères de sa longévité, aux approximations de cet art réputé pour sa rigueur, à la question du style héraldique, aux diverses approches et interprétations possibles, aux dérives ésotériques. La première partie de cet album aborde l’héraldique en tant que «science
auxiliaire de l’histoire», puis traite de la naissance et de l’évolution, dans ses très grandes lignes, de l’héraldique européenne.
Elle revient, plus en détail, sur la très remarquable renaissance vaudoise – et romande – de l’héraldique et sur les historiens et peintres héraldistes qui l’ont animée dès la fin du XIXe siècle. Elle examine les nombreuses armoiries successives de l’Etat de Vaud et, juste pour le plaisir, termine avec les blasons de quelques grands noms de l’histoire vaudoise.
Les règles de la composition
héraldique
La deuxième partie, la plus longue et la plus technique, néanmoins indispensable et tout à fait accessible à un esprit curieux, expose les règles de la composition des armoiries: l’écu; les émaux (couleurs et métaux) et les pannes (fourrures); les partitions, les pièces et les meubles; les marques; les brisures; les timbres, cimiers, supports, devises et autres ornements extérieurs à l’écu; l’héraldique ecclésiastique; le blasonnement (description précise du contenu de l’écu).
Dans la troisième partie, plus courte, Olivier Delacrétaz tire les enseignements de ses expériences en matière de création d’armoiries communales. La conclusion permet à l’auteur quelques réflexions sur les armoiries et les logos, sur les aspects fastes et néfastes de l’informatique, ainsi que sur le rôle des pouvoirs publics et sur l’avenir de l’héraldique. C’est donc un peu plus familier de cette science, souvent fasciné par la beauté des armoiries reproduites et par ce qu’elle représentent pour nombre de nos contemporains que s’achève cette belle promenade intelligente dans le monde de l’héraldique vaudoise.