Leysin a conservé son identité et son charme malgré une augmentation de sa population.

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LA fête des maires - Jean-Marc Udriot, Syndic de Leysin/VD

Se développer en préservant la qualité de vie

8 Mar 2023 | Articles de Une

A 1300 mètres d’altitude, juste au-dessus d’Aigle, dans le canton de Vaud, Leysin a conservé son identité et son charme malgré une augmentation de sa population. Avec une économie dynamique, une vie associative active et une offre sportive et culturelle riche, Leysin ne manque pas d’atouts. Pour Jean-Marc Udriot, son Syndic, la mobilité et une stratégie de développement «quatre saisons» sont les principaux enjeux à relever pour l’avenir.

– Pourquoi vous êtes-vous engagé en politique?
– C’était une manière de faire avancer les choses et de les corriger si besoin. Je suis hôtelier à la base et ma motivation première pour entrer au Conseil municipal était de créer un dicastère dédié au tourisme, car Leysin n’en avait pas! Le tourisme à lui seul ne pouvait pas faire l’objet d’un dicastère, donc on a ajouté les sports, les alpages et les forêts, ce qui est cohérent.

– Vous êtes Syndic depuis 2006. Ressentez-vous toujours le même enthousiasme?
– Ah oui! Et maintenant, je suis aussi député au Grand Conseil vaudois. J’ai toujours eu une vision très régionale pour Leysin, mais il ne faut pas réfléchir uniquement pour sa commune. A Leysin, nous avons toujours eu la chance d’avoir des citoyens qui s’engagent tant pour le Conseil communal que pour la Municipalité. Cependant, ce sera peut-être plus difficile à l’avenir, notamment en raison de la notion de responsabilité juridique, qui est pesante. Par ailleurs, on constate aussi que les gens déménagent plus facilement qu’autrefois et, surtout, qu’il faut avoir du temps. Je consacre bien 90 heures par mois à mes fonctions. Ce n’est pas le cas à Leysin, mais dans certaines communes, la rémunération devrait aussi être revue à la hausse, ce qui aiderait peut-être à l’engagement des citoyens pour la cause publique.

– Quelle analyse faites-vous de Leysin?
– Nous avons une population de 4000 habitants, dans un territoire entièrement de montagne, mais nous avons des besoins identiques à ceux d’une ville. Leysin repose sur quatre piliers: la santé, le tourisme, la formation et les PME, actives notamment dans la construction et le gros œuvre. Concernant la formation, Leysin compte quatre écoles privées internationales, dont la dernière qui vient d’ouvrir, Malvern College, compte déjà 50 étudiants et souhaite en accueillir 200 à terme. Aujourd’hui, les quatre grands secteurs économiques de Leysin se portent bien et génèrent des emplois. Le principal défi reste la mobilité.

– Qu’est-ce à dire?
– Leysin est actuellement desservi par les transports publics et cherche à améliorer la desserte avec le projet des Transports publics du Chablais de prolonger la ligne Aigle-Leysin. Le projet de 100 millions de francs a déjà été voté par la Confédération et la ligne pourrait être opérationnelle en 2030. On met aujourd’hui 28 minutes jusqu’à Aigle et la durée passerait ensuite à 19 minutes, avec une cadence à la demi-heure. Offrir une meilleure mobilité est important pour garantir les emplois et attirer de nouveaux habitants. Nous avons même nommé un délégué à la mobilité, tant cette question est importante.

– L’offre immobilière est-elle adaptée?
– Oui, il reste des logements pour des résidences principales. Il faut compter, pour un 4 pièces ou un 4,5 pièces, entre 1500 et 1600 francs. Pour permettre aux habitants de se loger, nous avons mis en place il y a deux ans un concept de loyer abordable original. L’objectif est d’inciter les propriétaires de logements vacants à baisser leurs loyers de 10% à 20% par rapport aux prix du marché, la différence étant prise en charge par la commune. A ce jour, nous n’avons eu aucune demande, ce qui tient à prouver que les gens trouvent à se loger sans trop de difficulté. Pour l’achat d’un bien, il y a encore quelques opportunités, même si les prix ont progressé de 15 à 20% en trois ans. Il faut compter maintenant environ 5000 francs le mètre carré. L’objectif n’est pas d’arriver à 6000 habitants, ce qui serait impossible, mais une population de 4500 ou 5000 personnes serait idéale. Nous avons les infrastructures adaptées, notamment le nouveau collège, inauguré il y a cinq ans, qui comprend 15 classes, une bibliothèque, une salle de gym, un réfectoire et les structures d’accueil pour la petite enfance. C’est un projet qui a coûté 14 millions. Nous avons aussi une crèche, avec suffisamment de places. Nous avions racheté il y a 15 ans environ le bâtiment où se trouvait la poste et nous l’avons transformé. Le rez-de-chaussée accueille la crèche et le premier étage six appartements à loyer très modéré, entièrement rénovés.

– Vous évoquiez le tourisme. L’offre d’hébergement est-elle suffisante?
– Il y a plusieurs projets d’hôtels en cours. Le plus avancé porte sur un établissement quatre ou cinq étoiles de 450 lits au cœur de la station. C’est un type d’hôtel qui nous manque actuellement. Ce projet a donné lieu à une démarche participative auprès de la population, qui l’accueille de manière très positive. Un autre projet porte sur la transformation d’un vieux bâtiment situé tout en haut de la station. Il s’agirait d’un établissement de 150 lits, avec un concept centré sur la nature.

– Quelle est votre politique environnementale ?
– Nous allons rénover la Maison de commune, vrai gouffre énergétique. Il s’agit d’un chantier de plus de deux millions, qui pourrait débuter l’année prochaine. Par ailleurs, la commune possède plus de 30 bâtiments, dont beaucoup sont vides. Nous allons décider ceux que nous allons vendre, démolir ou conserver, et pour quelles affectations. La Maison de commune sera équipée de panneaux solaires photovoltaïques, comme c’est le cas pour le nouveau collège. Dès lors que celui-ci produit beaucoup d’énergie entre juillet et août, nous avons tiré une ligne entre le collège et le centre sportif pour récupérer l’énergie, afin de refroidir la patinoire.
Nous sommes aussi en train de réaliser des études pour le chauffage à distance, mais aucune décision n’a encore été prise. Il n’est pas certain que cette solution soit adaptée à Leysin. Elle risque d’être très chère et pas forcément rentable. Actuellement, l’ensemble du territoire, jusqu’à 2000 mètres, est alimenté au gaz. Il faudrait déjà déterminer quels bâtiments raccorder au chauffage à distance.

– Quels sont les enjeux pour l’avenir?
– Nous disposons de deux centres sportifs, sur lesquels nous souhaitons capitaliser afin de développer notre stratégie «quatre saisons». Il serait dangereux de tout axer sur l’hiver et le ski. Au total, d’ici 20 ans, nous aurons investi 60 millions dans les deux centres sportifs. Les finances seront un autre enjeu important. Pour le moment, elles sont équilibrées, mais il nous faudra de nouveaux habitants avec des revenus stables.

– Un mot en conclusion sur l’offre sportive et culturelle?
– Leysin est riche d’une trentaine d’associations sportives et culturelles. Nous sommes très actifs, notamment dans le sport. Nous avons accueilli, par exemple, la Coupe du monde de VTT, les Jeux olympiques de la jeunesse en freestyle en 2020 et l’arrivée du Tour de Romandie cycliste. Pour la culture, citons l’exposition de sculptures en plein air Ailyos, dont je viens de prendre la présidence. Cette exposition, qui se tient de juillet à octobre, et pour laquelle nous collaborons avec Montreux Art Gallery, présente les œuvres d’une trentaine d’artistes suisses et internationaux. Elles sont exposées en pleine nature entre Aigle, Yvorne, Leysin, Les Mosses et Les Diablerets. N’oublions pas non plus le Festival de rock et musique électronique «Hautes Fréquences», fondé par de jeunes Leysenouds et qui rassemble plus de 4000 personnes.

 

Propos recueillis
par Virginia Aubert

Jean-Marc Udriot.