Pour une politique transversale et concertée de la vieillesse!

Le 1er juin 2023, la République de Genève a entamé une nouvelle ère. Dans son discours de Saint-Pierre, le Conseil d’Etat s’est engagé à relever les trois transitions majeures et interdépendantes de notre société: écologique, démographique et numérique. En effet, les changements climatiques et les épisodes caniculaires ont un impact notable sur la santé globale, notamment celle des seniors. En outre, un risque d’exclusion et des inégalités d’accès aux informations et aux prestations dans l’ère du tout-numérique sont apparentes. Le Conseil d’Etat a également promis de lutter contre l’isolement, créer des espaces de socialisation, renforcer la politique des proches aidants. Des objectifs certes louables mais qui doivent être accompagnés de mesures concrètes. «La FRKB, aux côtés de nombreuses institutions et associations, s’investit pour apporter des solutions permettant d’améliorer la qualité de vie des personnes âgées et lutter contre l’isolement social. Cela passe par des logements et des immeubles dont la configuration est adaptée aux seniors, mais aussi par des espaces publics et des équipements accessibles à tous», souligne Janine Berberat, vice-présidente de la FRKB et présidente de sa Commission du logement.

Les seniors, des acteurs sociaux à part entière

Le constat est sans appel: la population genevoise vit de plus en plus longtemps et en meilleure santé, d’où le nombre de personnes âgées en constante augmentation. Le vieillissement devient donc un enjeu sociétal qui concerne l’ensemble des secteurs: la santé, la cohésion sociale, la formation, le logement, l’aménagement, les infrastructures, la mobilité, l’économie. Par ailleurs, Genève bénéficie d’un riche tissu associatif et d’une grande offre de prestations pour les seniors. Mais l’offre atteint-elle sa cible? Les besoins réels sont-ils pris en compte dans la mise en place des prestations? Est-ce que les différents services sont suffisamment coordonnés dans l’accompagnement d’une personne tout au long de son parcours de vie? Face à ces questions, il apparaît qu’une vision politique globale, transversale et proactive de la vieillesse manque encore à Genève. En effet, le vieillissement est surtout abordé comme un problème, principalement sous les angles sanitaire et économique.
Une meilleure cohérence entre les politiques publiques – notamment dans une articulation santé-social – permettrait d’anticiper et de répondre aux défis qui nous attendent. Cette véritable politique de «la longue vie» permettrait également de révéler l’apport précieux des seniors comme acteurs sociaux et les opportunités qu’offre une société à plusieurs générations. En ce sens, Thierry Apothéloz, outre sa fonction de conseiller d’Etat chargé de la Cohésion sociale, se retrouve également pilote de la politique en faveur des aînés et des enjeux du vieillissement de la population. Il y a quelques mois, le magistrat a publié un livre «La force de l’âge»: «La réflexion actuelle ne se concentre que sur les questions de santé, mais on a la possibilité de faire beaucoup plus, très en amont. Il faut aussi réfléchir différemment en termes de logement: comment aider les aînés à rester à domicile, encadrés et soutenus?», affirme-t-il. Selon cette même vision – qui se veut positive et dynamique, les entités de la Plateforme réseau seniors Genève ont lancé en janvier dernier un appel aux autorités sous la forme d’un «Livre blanc: pour une politique coordonnée de la vieillesse à Genève». Cette publication, qui est le fruit d’une vaste concertation, souligne que pour parvenir à une société solidaire et soucieuse de ses seniors, tous les partenaires du terrain doivent unir leurs forces.

Fin avril 2023, la FRKB a livré «Meyrin 14» (bureau d’architectes 2DLC). La Fondation élargit – avec 32 appartements supplémentaires – l’offre du IEPA La Forêt.

Favoriser le maintien à domicile le plus longtemps possible

La législation en vigueur à Genève – tel le Règlement général sur le logement (RGL) ou le règlement concernant l’aménagement (RACI) – n’encourage pas l’adaptation du logement aux personnes âgées, à mobilité réduite ou en situation de handicap; ou alors, les aménagements nécessaires sont à la charge de la personne locataire. Il en ressort que la politique publique du logement n’est pas coordonnée avec les politiques publiques visant, autant que possible, la vie à domicile. Les professionnels de la construction, de l’aménagement du territoire et de l’immobilier ne sont pas suffisamment formés et/ou conscients des enjeux liés au vieillissement croissant de la population. Nous continuons à réaliser des logements pour une tranche spécifique de la société – celle qui est en pleine forme! – sans anticiper les différentes étapes du parcours de vie, ni les besoins différenciés d’une société à quatre générations.
La création de logements pour seniors avec encadrement social est devenue une nécessité, car elle répond à un besoin majeur de la population. C’est le cas des appartements proposés par la FRKB. Entre habitation hors de toute structure et EMS, ces logements permettent de rester chez soi dans les meilleures conditions possibles. Salles de bains, cuisines et autres équipements sont conçus ou rénovés pour faciliter les gestes du quotidien. L’encadrement des appartements est assuré par l’Institution genevoise de maintien à domicile (IMAD), laquelle offre un ensemble de prestations.
Créée en 1969, la FRKB est l’une des cinq Fondations immobilières de droit public (FIDP) genevoises; elle s’adresse aux personnes encore autonomes mais nécessitant un certain encadrement. Pour être admis dans un appartement de la FRKB, les candidats doivent répondre à plusieurs critères comme ceux d’avoir atteint l’âge de l’AVS, d’être domiciliés à Genève au minimum pendant deux années successives (durant les cinq dernières années) et de disposer de ressources financières modestes. La FRKB acquiert, construit et exploite des immeubles répartis à travers le canton. Elle gère aujourd’hui onze immeubles, correspondant à 817 logements. La Fondation s’inscrit dans l’objectif de l’Etat de constituer un parc de logements d’utilité publique. Outre les rénovations et transformations, la FRKB mène une politique de prospection continue visant à la construction d’immeubles, ainsi qu’à l’implantation d’immeubles avec encadrement pour les personnes âgées (IEPA) au cœur de projets immobiliers promus par des partenaires publics et/ou privés. Par ses activités, la Fondation répond aux besoins définis par la Direction générale de la Santé (DGS), tout en cherchant à mettre en adéquation les propositions de logement avec les usages des seniors.

Poursuivre la réflexion…

«Du fait que la FRKB dispose, pour partie, d’un parc immobilier ne répondant pas toujours aux nouvelles normes de la Loi sur l’organisation du réseau de soins en vue du maintien à domicile (LORSDom), davantage de souplesse dans les procédures d’attribution des logements serait bénéfique, estime Janine Berberat. Certaines personnes, avant l’âge de l’AVS mais nécessitant un accompagnement, ont besoin de logements bon marché. En difficulté, elles se retrouvent chez des amis, de la parenté ou sont ‘placées’ dans des structures coûteuses pour la société, comme des chambres d’hôtel, en attente de leur 65e année. Ces personnes pourraient bénéficier d’appartements vacants, parmi lesquels des deux-pièces en mains de la FRKB. Le problème est que les dynamiques de financement sont trop scindées à Genève; il est grand temps d’y remédier!». Le Conseil d’administration de la FRKB – qui est composé de membres représentatifs des partis siégeant au Grand Conseil et désignés par l’Etat de Genève – a un pouvoir d’influence certain. Faisons le vœu que ses propositions soient écoutées, avec en ligne de mire, une meilleure transversalité entre les départements étatiques!

…et viser le concret

La FRKB va investir dans ses projets de rénovation, de surélévation et de nouvelles constructions plus de 90 millions de francs au cours des quatre prochaines années: c’est dire l’importance que le Conseil de Fondation donne aux enjeux sociétaux, tant pour répondre à la demande croissante que pour donner aux seniors des conditions d’habitat de qualité. La Fondation peut remplir sa mission pour l’intérêt général grâce aux appuis du Conseil d’Etat, du Grand Conseil, de la Direction générale de la santé (DGS), de l’Office cantonal du logement et de la planification foncière (OCLPF) et des partenaires financiers. Florian Barro, président de la FRKB, est satisfait de la convergence réunie autour des projets de la Fondation et de la réussite déjà confirmée des constructions réalisées au Lignon, à Bernex-Saule, au Bois-de-la-Chapelle ou encore à la route de Meyrin. «Il n’y a pas de personnes âgées, elles ont simplement été jeunes plus longtemps…», note-t-il en guise de conclusion.

Véronique Stein