LA fête des maires - Gilles Dolivo, Syndic de Moiry/VD
«Nous sommes un village très soudé»
C’est une petite commune pleine de charme qui cultive un art de vivre villageois basé sur la convivialité. Blottie au pied du Jura entre l’Isle et Romainmôtier, Moiry s’étend sur 667 hectares, dont 50% accueillent des forêts constituées d’espèces thermophiles. La commune bénéficie d’une population stable, parfois en légère hausse, mais celle-ci risque d’être freinée en raison des possibilités de développement immobilier limitées suite à la révision de la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT), comme l’explique Gilles Dolivo, Syndic.
– Les habitants de Moiry sont surnommés les Epouéris, en référence à la peur du loup qui fréquentait les forêts. Aujourd’hui, le loup est-il de retour?
– Oui, mais de manière isolée et il ne fait que passer. Le loup est capable de parcourir 60 km en moyenne en une nuit. Il fréquente les crêtes du Jura. Nous avons aussi des lynx dans le coin.
– Comment évolue la population dans une petite commune comme Moiry?
– Dans notre cas, elle évolue par paliers depuis le début des années 2000. La population est passée de 230 à 260 puis, à la fin 2018, à 316 habitants, avant de redescendre à 300 actuellement. Nous avons enregistré le départ de 15 personnes au cours des trois dernières années.
La volonté de la commune est vraiment de permettre de vivre en harmonie. Nous sommes un village très soudé avec au moins une famille installée ici depuis le XIVe siècle et il y a une vraie volonté des jeunes de rester dans la commune.
A l’horizon 2050, la commune pourrait compter entre 350 et 370 habitants, ce qui serait bien. C’est une taille humaine, les gens se connaissent encore.
– Les infrastructures sont-elles adaptées?
– Oui. Nous avons par exemple une école à Moiry, avec trois classes. Mais, à moyen terme, l’école est condamnée, car les classes des communes vont être regroupées sur deux sites, afin de diminuer les frais de transport et de suivre les directives pédagogiques cantonales.
Nous avons un projet pour une réaffectation de l’école. L’idée est d’y installer les services de l’administration communale, de créer un café et peut-être des logements. Il faudrait, bien sûr, diligenter une étude pour voir si le projet est viable. Le budget serait de l’ordre de deux millions. C’est un montant envisageable pour la commune, mais bien que nos finances soient saines, nous n’avons pas une grande capacité financière.
– Comment explique-t-on la hausse de la population d’il y a une quinzaine d’années?
– Elle était due à la création de deux petits quartiers, l’un comprenant sept logements et l’autre six, ce qui représentait une trentaine de nouveaux habitants. Ces deux projets ont été réalisés par des investisseurs privés.
Aujourd’hui, avec la LAT, il n’y a plus de terrains à construire à Moiry. Heureusement, nous n’avons pas été confrontés à des situations difficiles d’habitants qui auraient gardé un terrain à vendre pour leur retraite ou pour leurs enfants.
Les seules possibilités de développement résident désormais dans le changement d’affectation de bâtiments ruraux inoccupés.
Nous sommes en train de faire analyser par des techniciens la compatibilité avec notre règlement des constructions d’un projet pour une grange. Il s’agirait d’un projet privé portant sur un bâtiment d’environ 1000 m3, qui pourrait accueillir six appartements.
Si le projet se faisait, les travaux pourraient commencer l’année prochaine et se terminer fin 2025. La commune compte une dizaine de bâtiments ruraux d’importance et si ce projet se concrétise, nous espérons qu’il incitera d’autres propriétaires à transformer leur bien. Pour le moment, ils évaluent la situation et se montrent prudents, car le changement d’affectation d’un bâtiment représente une charge fiscale importante pour un agriculteur.
– La commune est-elle essentiellement agricole?
– Moiry compte sept familles d’agriculteurs, dont deux producteurs laitiers. Les exploitations sont bio ou en production intégrée. La commune a aussi deux scieries, des commerces de proximité et de nombreuses petites sociétés actives dans des domaines très variés. Nous avons, par exemple, une thérapeute qui travaille avec les animaux, un couple qui tient un bed & breakfast, un salon de beauté, un ingénieur charpentier, une tatoueuse. Il y a aussi un boulanger qui travaille depuis cinq ou six ans avec notre four communal et qui a décidé de s’installer dans le village.
– Quels sont les projets en cours?
– Nous avons une eau de très bonne qualité et pas de pénurie. Mais des travaux d’entretien doivent être entrepris sur le réseau, afin de le mettre en conformité avec les normes incendie.
Par ailleurs, Moiry fait aussi partie de l’Association intercommunale pour l’épuration des eaux usées de la région Haute-Venoge/Veyron (EHVV), qui remplacera à terme les dix stations d’épuration communales actuelles par une seule station régionale.
– Quelle est la politique énergétique?
– Depuis 1995, nous possédons une installation de chauffage à distance, qui fonctionne avec des plaquettes forestières. Elle fournit en énergie les bâtiments communaux et une dizaine de clients privés. La prochaine étape de la transition énergétique est la pose de panneaux photovoltaïques sur certains bâtiments communaux.
– Vous évoquiez la volonté des jeunes à rester à Moiry. La vie est assez active…
– Concernant les jeunes, non seulement ils souhaitent rester, mais ils sont aussi très investis dans la vie locale, notamment sur le plan politique.
Nous avons plusieurs associations qui proposent toute sorte d’activités, notamment du tir, du badminton et du chant. Depuis un an, nous avons créé une Commission culturelle, afin de renforcer l’offre dans ce domaine. Nous avons organisé une nuit des contes et installé une cabane à livres, qui est déjà un succès.