Les vignes qui courent le long des vallées riantes du Valais…

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LA fête des maires - Claude Crittin, Président de la commune de Chamoson/VS

«Nous sommes typiques du territoire suisse»

31 Mai 2023 | Articles de Une

Au cœur d’un paysage de vignes et de montagnes, la commune de Chamoson, en Valais, offre un cadre de vie exceptionnel qui séduit de plus en plus d’habitants souhaitant profiter notamment du développement du télétravail. Soucieuse de préserver l’environnement, la commune a mis en place des mesures en faveur de la biodiversité et intensifie ses efforts pour davantage de sobriété énergétique, comme l’explique son Président Claude Crittin.

– Vous effectuez votre troisième législature en tant que président de la commune. Comment êtes-vous venu à la politique?
– En parallèle de mon activité professionnelle dans le commerce de vins, j’ai fait une carrière militaire de milicien jusqu’à l’âge de 42 ans. Ensuite, il y a 14 ans maintenant, on m’a proposé de rejoindre le Conseil communal, ce que j’ai fait. J’ai effectué une première législature en tant que vice-président et ensuite deux législatures de quatre ans chacune comme président. Je suis à mi-mandat de la troisième.
A l’armée, j’étais commandant de compagnie, ce qui implique d’avoir une certaine influence sur la communauté pendant un laps de temps donné. J’ai retrouvé une démarche un peu similaire en politique, où l’on peut s’engager et agir pour la communauté. C’est une grande marque de confiance de la population de Chamoson que de confier ainsi les clefs de la communauté à des élus qui ne sont pas des professionnels de la politique. Je vis ma fonction comme un honneur.

– Quel est le principal défi à relever quand on est à la tête de Chamoson?
– Le défi le plus inhabituel réside ici dans la gestion du territoire de la commune, une bande de terre qui s’étend du bord du Rhône jusqu’aux montagnes. Ce territoire réunit toutes les configurations que l’on retrouve en Suisse avec son mode de vie séculier: l’hiver, la population vivait dans la plaine et l’été, à la montagne. Cette situation se retrouve dans l’aménagement du territoire. Conformément à la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT), nous avons révisé notre Plan de zone et nous venons de le déposer. Nous sommes en train de passer de la situation des Trente glorieuses à la réalité d’aujourd’hui et à celle de demain. L’époque antérieure était marquée par l’individualisme: chaque personne voulait sa villa. Actuellement, on s’oriente vers une gestion commune du territoire, ce qui implique une certaine densification et incite à restituer des terrains à l’agriculture. Dans notre nouveau plan de zone, nous prévoyons que 60 hectares soient dézonés ou gelés. Par ailleurs, à l’avenir, dans le village, il faudra construire sur les parcelles de petits immeubles et non plus une villa unique.
Le nouveau plan va être mis à l’enquête et les habitants devront dire s’ils l’acceptent ou non. On verra si l’intérêt général l’emporte. Cela étant, la densification d’une parcelle peut aussi être plus intéressante pour un propriétaire sur le plan économique.

– Comment l’immobilier a-t-il évolué ces dernières années?
– Le paysage a été sculpté par les vignes, ce qui nous a permis d’échapper à la vague de construction qu’ont connue la plupart des communes environnantes. En direction de Sion, par exemple, tout est densément bâti. Les prix ont nettement augmenté au cours des dix dernières années. Le prix du mètre carré dans le village était de 200 francs en 2013, contre plus de 400 francs actuellement.

– La population progresse. Qui sont les nouveaux habitants?
– En effet, nous enregistrons une hausse régulière d’environ 100 nouveaux habitants par an. Aujourd’hui, la population est de 4200 personnes. Je dirais que les gens découvrent Chamoson par hasard; le village ne fait pas partie des endroits où l’on pense d’abord à s’installer. C’est un écrin entouré de falaises de 2000 mètres de haut, qui se situe en retrait, sur la rive droite ensoleillée du Rhône, à quelques minutes des axes de mobilité, mais qui dispose de tous les services dont on a besoin. Les gens tombent amoureux du village et de la commune et décident d’y vivre. Il y a par exemple des personnes qui habitaient auparavant l’Arc lémanique et qui viennent vivre ici pour la qualité de la vie. En revanche, nous n’avons pas de population internationale comme à Genève ou à Lausanne.

– Avez-vous constaté un regain d’intérêt pour Chamoson après la pandémie et l’envie de certains de quitter les villes?
– Je dirais plutôt que le profil des nouveaux habitants a changé. Avant la Covid, il s’agissait de futurs retraités. Dans un couple, généralement l’un des deux allait prendre sa retraite d’ici quelque temps ou il venait de le faire, tandis que l’autre avait encore quelques années à travailler. Ils s’installaient dans la commune et celui ou celle qui avait encore une occupation professionnelle faisait la navette. Depuis la pandémie, nous recevons davantage de jeunes, grâce notamment à la possibilité de télétravailler. C’est du reste une démarche que nous encouragerons en installant des espaces de coworking dans les bâtiments communaux.

– Comment se passe l’intégration de ces nouveaux habitants?
– Très bien, car c’est vraiment un choix de leur part. Ils ont envie de vivre dans une communauté de taille moyenne, où les gens se connaissent et se parlent. De notre côté, nous faisons tout pour faciliter leur insertion. Nous organisons une réunion tous les quatre mois pour les nouveaux arrivants. Je donne toujours cet exemple: quand j’habitais dans le canton de Vaud et que je faisais mes courses à la Migros, je circulais entre les rayons avec mon caddy sans regarder les gens. Ici, au contraire, à la Migros du village, on se regarde, on se salue, on discute…

– Qu’en est-il des grands projets?
– Ces quinze dernières années, nous avons été très occupés avec les travaux de sécurisation du village face aux laves torrentielles. Nous avons été aidés financièrement par le Canton et la Confédération, mais il s’agit d’un investissement d’environ 20 millions. Il y a deux ans, nous avons terminé la construction de l’école et de l’unité d’accueil pour écoliers (UAPE) pour un budget de 17 millions de francs. Nous sommes l’un des village du Valais avec le plus d’enfants par habitant et comptons une centaine d’élèves de secondaire et quelque 350 en primaire. L’ancienne école, qui datait de 1890, était devenue trop petite. Elle sera rénovée et transformée pour accueillir la crèche, l’administration communale et des salles pour les associations. Il s’agit d’un budget de six millions et ce sera le dernier gros chantier de ce cycle d’investissement.

– Comment faites-vous face, financièrement?
– Nous ne sommes pas une commune riche, mais nous avons une marge d’autofinancement de près de quatre millions. D’un point de vue fiscal, nous sommes un peu plus chers que les autres communes, mais c’est inévitable compte tenu de la configuration du territoire. Maintenant, nous sommes entrés dans une phase de réduction des dettes après les gros investissements que nous avons consentis.
Pour le reste, nous allons à l’essentiel. Nous n’allons pas créer d’infrastructure de loisirs lourdes,par exemple, mais utiliser le terrain de jeu de la nature environnante.

– Quelle est la politique de la commune en faveur de l’environnement?
– Nous avons supprimé 40 hectares de forêts afin de créer de nouveaux espaces mélangeant arbres et ouvertures, car la forêt avait gagné sur les pâturages. Ces travaux, qui se terminent bientôt, vont permettre de favoriser la biodiversité. Avec 420 hectares de vignes, nous sommes une commune viticole et les vignerons passent par étapes au bio. Sur le plan énergétique, nous avons défini trois grands axes: le chauffage à distance, l’isolation et la rénovation des bâtiments, sans oublier l’installation de panneaux solaires.
Nous allons généralisé le chauffage à distance dans certaines zones des villages de Chamoson et Saint-Pierre-de-Clages. L’ancien réseau fonctionne encore au mazout. Notre objectif est donc d’en changer et nous réfléchissons à la solution à adopter. En effet, on voit que le bois a ses limites, puisque maintenant on importe des pellets du Canada. Comme nous sommes situés sur le plus grand cône d’alluvions de Suisse, nous pensons plutôt nous orienter vers la géothermie, plus durable et plus rentable. Il y a plus de douze ans, le bonus à la rénovation a été introduit. C’est un succès puisque nous avons déjà investi l’équivalent d’un million de francs.

– Vous avez évoqué la viticulture. Chamoson est connue pour son œnotourisme.
– Nous comptons 30 caves et 23 caveaux-restaurants. Nous n’avons pas de tourisme de masse, mais de petits groupes d’amis ou d’amateurs de vins qui viennent passer une bonne soirée. Nous avons de plus en plus de touristes alémaniques. Le Parlement valaisan a voté un Plan de développement régional (PDR) de 12 millions en faveur du tourisme, ce qui permettra notamment de développer et de mettre à niveau les infrastructures.

 

Propos recueillis
par Virginia Aubert

Claude Crittin.

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