La fête des maires - Anne-Françoise Morel, maire sortante de Jussy
«Nous avons pu moderniser l’administration communale»
A l’heure de passer le relais, Anne-Françoise Morel, ex-maire de Jussy depuis le 1er juin, dresse le bilan d’un mandat marqué par les défis, mais aussi par une profonde modernisation de l’administration communale. «Ce que je retiens avant tout, ce sont les rencontres humaines et la solidarité entre communes», dit-elle.
– Quel souvenir gardez-vous de la législature achevée le 1er juin?
– J’ai dû faire face à beaucoup de choses pas faciles. Il y a eu la Covid, un gros incendie qui a détruit une ferme et nécessité le relogement des habitants en urgence ainsi que l’installation, également dans l’urgence, d’une famille de réfugiés ukrainiens. Il y a aussi eu un drame: un jeune Jusserand a été tué. C’était quelqu’un de connu dans la commune, pompier volontaire, et la mairie a géré en lien avec la famille la partie officielle avec la cérémonie.
Et pour finir, juste une semaine avant la fin de mon mandat, l’arrivée de caravanes de gens du voyage qui se sont installées sur un terrain privé. C’est une situation difficile à gérer et les habitants ont de la peine à comprendre que la mairie ne puisse pas agir. Le maire n’a pas tous les pouvoirs.
Il y a vraiment eu beaucoup d’événements en cinq ans. J’ai pris la décision d’arrêter mon activité politique. J’avais quand même de petits regrets, mais je crois que ce n’est plus le cas maintenant. Cependant, les rencontres avec les gens me manqueront. En tant que maire d’une commune, on est amené à voir beaucoup de monde d’horizons complètement différents et c’est toujours très intéressant. J’ai aussi beaucoup apprécié le contact et la solidarité entre les Exécutifs des communes voisines. Des élus m’ont téléphoné ou envoyé de petits messages de soutien dans certaines situations.
– Quelles ont été vos principales réalisations?
– Quand j’ai commencé mon mandat de maire, j’avais envie de moderniser tout le côté administratif. Nous avons réussi à nous adapter aux nouvelles demandes du Service des affaires communales (SAFCO). Au début, la démarche a été difficile à faire comprendre, certains habitants de la commune trouvaient que c’était une erreur d’engager du personnel. Mais aujourd’hui, même un de mes collègues très sceptique a vu l’intérêt de la démarche. Je pense que souvent l’on ne se rend pas compte de la quantité de travail administratif qu’il y a dans une mairie. Pour répondre aux demandes des habitants et des différents services de l’Etat, il faut une infrastructure solide. Il est important de séparer les fonctions. C’est vrai, autrefois il n’y avait que le maire et une secrétaire, mais aujourd’hui, ce n’est plus possible. Par ailleurs, les dossiers sont toujours plus complexes et une commune a besoin de collaborateurs pointus. Un membre de l’Exécutif n’a pas forcément toutes les connaissances voulues pour répondre à tout, dans tous les domaines. Et puis, dans une commune de la taille de Jussy, tous les conseillers administratifs ont un travail; ils ne peuvent pas toujours être à la mairie.
– Des projets en cours pour la nouvelle législature?
– J’ai démarré deux projets qui malheureusement n’ont pas pu aboutir, mais se poursuivront lors de la nouvelle législature. Le premier concerne l’achat d’une ancienne maison que l’on veut transformer en maison communale, mais en raison du temps nécessaire à finaliser plans et autorisations, surtout lorsqu’il s’agit d’un bâtiment dépendant de l’Office du patrimoine et des sites, il n’a pas été possible de terminer.
Le deuxième projet, qui a démarré, porte sur l’agrandissement de la caserne du local des pompiers et de la salle des fêtes. Ces deux sujets ont demandé beaucoup de temps et il reste encore des problèmes comme la circulation, un vrai serpent de mer compliqué à résoudre.
– Quelles sont les avancées dans ce domaine?
– Elles sont quasi inexistantes. Nous sommes un peu les oubliés du canton. Nous sommes préoccupés par la construction de l’autoroute Thonon-Machilly. C’est pourquoi, avec des communes de la région et la ville de Genève, nous demandons, entre autres, qu’une étude d’impact sur la Suisse soit faite par la société qui a obtenu la concession. Nous avons le sentiment que la France ne se préoccupe pas de l’impact de l’autoroute sur les petites routes de toute cette région de la rive gauche. A partir du carrefour des Chasseurs, il n’y a pas de liaison avec l’autoroute en direction de la douane de Thônex-Vallard, ce qui signifie que les automobilistes prendront les petites routes. Parallèlement, la circulation ne fait qu’augmenter à nos petites douanes. La fermeture de la douane de Pierre-à-Bochet n’améliore pas la situation. De notre côté, nous avons essayé de fermer la douane de La Renfile au moyen d’une barrière durant la nuit, mais les habitants étaient moyennement convaincus. Nous avons deux douanes dans la commune, alors pourquoi fermer l’une plutôt que l’autre? En fait, la douane de Monniaz est située sur une route cantonale, donc la commune n’a pas de pouvoir sur les horaires de fermeture, qui dépendent du Canton. Celui-ci ne veut pas fermer cette douane, car bien qu’il prétende que la pénétrante est la route qui vient de Thonon en passant par Anières et Corsier, force est de constater que les automobilistes passent ailleurs, la route étant engorgée.
Il n’y a pas de solution miracle, mais une idée serait d’augmenter les transports publics en développant plus rapidement que prévu les trains à deux étages du Léman Express.
Cela étant, on évoque toujours le trafic des personnes qui viennent travailler en Suisse, mais il y a aussi les Genevois qui vont faire leurs courses en France.
Pour apaiser la circulation dans le village de Jussy, nous avons créé des zone 30, installé des ralentisseurs et obtenu des contrôles radar, ce qui aide. Mais maintenant ce sont les petits hameaux qui se plaignent, tel Lullier, car les gens commencent à passer par là pour aller plus vite et ne pas traverser le village.
– Qu’en est-il de l’immobilier?
– La commune a encore du terrain en zone 4B, donc constructible, mais il est en bordure d’un petit ruisseau, ce qui implique des contraintes et complexifie le projet. Nous avons établi un pré-projet, mais avec très peu d’appartements. Nous cherchons donc une solution, l’objectif étant de proposer des logements à loyer abordable. Il y a plusieurs projets privés dans la commune, notamment à Lullier avec deux réalisations qui se terminent, mais ce sont des PPE.
– Globalement, l’intercommunalité a-t-elle bien fonctionné?
– Oui, très bien. Nous avons, par exemple, créé un service de gardes ruraux avec les communes de la région. Trois gardes ruraux intercommunaux tournent à vélo pour sensibiliser les gens et, parfois, mettre des amendes.
Nous avons eu des rapprochements, notamment avec Meinier, lors de la création de la crèche il y a plus de dix ans. Nous avons également mis nos jardins d’enfants en commun, les habitants souhaitant surtout des crèches. Dans un jardin d’enfants, les petits doivent rentrer à la pause de midi. Pour la rentrée scolaire de septembre, nous allons garder les enfants pour le déjeuner; les parents devront venir les chercher après, mais ce sera déjà une aide pour un parent qui travaille à mi-temps.