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immobilier commercial - Marché de bureau: un paysage contrasté

Le taux de vacance continue à croître

15 Jan 2025 | Articles de Une

Le taux de vacance continue d’augmenter, l’activité de construction neuve a atteint son point le plus bas et une reprise est attendue sur le marché des investissements: voilà les grandes lignes de la nouvelle étude de Jones Lang LaSalle (JLL) sur l’immobilier de bureau en Suisse. Le rapport dresse un tableau complet du marché des surfaces de bureaux à Zurich, Genève, Berne, Lausanne, Bâle et Zoug. Outre les chiffres clefs et les principaux changements observés dans les régions les plus importantes, l’étude offre également une analyse sur la disponibilité de surfaces conformes aux normes ESG et présente un aperçu succinct du marché de l’immobilier de bureau européen.

Les cinq marchés suisses les plus importants.

Pour les cinq plus gros marchés de l’immobilier de bureau en Suisse – Zurich, Genève, Berne, Bâle et Lausanne – l’offre de surfaces de bureaux disponibles a augmenté de 9% par rapport à l’année précédente, totalisant
995 500 m2 à la fin 2024. Cela signifie que le volume de surfaces de bureau disponibles n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Depuis fin 2019, époque où le télétravail était encore peu répandu dans de nombreux endroits, le taux d’offre moyen dans les cinq plus grands marchés de bureaux suisses est passé de 4,1% à 5% au 31 décembre 2024 (+0,9%).
Malgré l’achèvement de 1,16 million de m2 de nouvelles surfaces de bureau depuis 2020, l’augmentation de l’offre reste modérée, avec 231 000 m2 supplémentaires sur la même période. L’activité de construction a atteint un pic en 2020 avec environ 343 000 m2 de nouvelles surfaces de bureau, puis a diminué graduellement pour atteindre 57 000 m2 en 2024. Une reprise progressive de la création de nouvelles surfaces est attendue entre 2025 et 2027.
Les dynamiques de marché varient considérablement selon les régions. Genève se démarque avec la plus forte croissance, affichant une moyenne de 2% du stock entre 2019 et 2024, qui devrait s’accélérer à 2,3% d’ici 2027. Berne connaît une hausse significative de l’activité de construction, mais sa croissance future, estimée à 1,1% par an, ne dépassera que légèrement la moyenne suisse. A l’inverse, Zurich et Bâle prévoient respectivement 71% et 58% de surfaces neuves en moins d’ici 2027 par rapport à la période 2019-2024. Globalement, pour les cinq principaux marchés, la croissance annuelle moyenne du stock de bureaux est prévue à 1% jusqu’en 2027, soit une baisse de 26% par rapport à la période précédente, reflétant ainsi les disparités régionales et les tendances divergentes du marché immobilier de bureau suisse.

A Genève, les loyers «prime»
augmentent

L’activité immobilière de bureau à Genève en 2024 affiche une légère progression, avec un taux d’offre atteignant 6,2%, contre 6,1% l’année précédente. Les bureaux vacants dans le quartier central des affaires de la ville ont également augmenté, laissant un total de 40 400 m2 de surface inoccupée (+7100 m2). Les taux de disponibilité dans les sous-marchés du Central Business District (CBD) rive droite (2,7%) et du CBD rive gauche (4,7%) ont ainsi augmenté par rapport à l’année précédente (passant respectivement de 2,4% et 3,8%). Néanmoins, la demande d’espaces de bureau dans le centre-ville reste tout aussi robuste qu’auparavant.
L’augmentation de l’offre est principalement due aux espaces de bureau dans des immeubles récemment rénovés et à la mise sur le marché de plusieurs espaces de bureaux de plus petite taille dans le quartier des banques genevois. Le loyer «prime» à Genève a continué de progresser et s’élevait à CHF 975.- par m2 par an à la fin de 2024 (en hausse de 8% sur un an). L’activité observée récemment laisse prévoir une nouvelle hausse des prix des loyers dans le segment des bureaux «prime».
La plupart des locataires à la recherche d’espaces de bureau dans le CBD de Genève sont confrontés à deux contraintes majeures. Premièrement, les espaces de bureau contigus de plus de 1000 m2 ou de plus de 250 m2 sur un seul étage sont une denrée rare. Deuxièmement, il y a une pénurie de bâtiments dans le CBD capables de répondre aux critères stricts de durabilité des entreprises soucieuses de l’avenir. Les chercheurs d’espaces de bureau sont donc contraints de se tourner vers les offres immobilières en périphérie de la ville.

L’activité reprend en périphérie genevoise

L’offre d’espaces de bureaux disponibles dans le sous-marché de La Praille/Acacias/Lancy a légèrement augmenté ces derniers mois, car le projet Surville (+2300 m2) a été achevé et certains espaces dans le quartier de Pont-Rouge sont devenus vacants. Cependant, courant 2024, le taux de disponibilité est resté globalement stable à 5%. Le bâtiment Alto à Pont-Rouge a accueilli quelques entreprises du secteur financier en tant que locataires.
Une activité dynamique a également été perceptible dans la région de l’aéroport, où la signature d’un bail pour 6000 m2 de bureaux dans le bâtiment Link à Blandonnet a particulièrement retenu l’attention. Le taux de disponibilité dans ce sous-marché s’est ainsi contracté pour atteindre 15,3% actuellement, contre 15,9% un an plus tôt. Un taux de vacance constamment supérieur à 9% a été enregistré dans le sous-marché de Plan-les-Ouates jusqu’à la fin de 2022, mais s’est réduit et stabilisé à un peu plus de 7% depuis l’année dernière.

Augmentation du taux de vacance dans la région lausannoise

La ville de Lausanne maintient une offre limitée, avec un taux de vacance de 1,9% fin 2024. La pénurie persiste dans le CBD, où seulement 12 300 m2 de surfaces sont disponibles pour un taux de vacance de 1,5%. Ce manque de disponibilité continue d’exercer une pression sur le loyer «prime», qui est resté stable à CHF 520/m2 par an (loyer économique). La rénovation complète de l’Hôtel des Postes, prévue pour fin 2025, apportera une offre de bureaux moderne et haut de gamme au cœur de la cité. Le projet prévoit quelque
15 000 m2 de surfaces de bureaux, ce qui contribuera à dynamiser le centre-ville et à répondre à la demande croissante de bureaux de qualité dans le CBD. Le taux de vacance global dans la région de Lausanne a augmenté, atteignant 3,8% en 2024 contre 3,2% en 2023. Cette augmentation s’explique par la livraison de plusieurs projets majeurs dans l’Ouest Lausannois/Crissier, dont la construction d’un nouveau quartier écologique à Chavannes-près-Renens.
Dans le district de Vidy, l’offre a encore baissé, avec un taux de vacance de seulement 1,2%. Seules de petites surfaces de moins de 1000 m2 sont à louer dans cette région de Lausanne. De même, la commune de Pully ne dispose plus que de quelques surfaces de moins de 500 m2, entraînant un taux de vacance de 1,1%. Cela démontre le dynamisme des régions moins centrales, plus discrètes, mais offrant des surfaces de haute qualité et un excellent cadre de vie.

Loyers proposés dans différentes régions.
Part de surfaces répondant aux critères ESG de l’offre de bureaux disponibles.

Les quartiers de Renens/Malley en pleine expansion

Un certain nombre de nouveaux projets immobiliers sont actuellement en construction dans le quartier de Malley à Lausanne et dans la commune adjacente de Renens, et plusieurs baux ont déjà été signés, par exemple pour 10 000 m2 dans le complexe Central Malley, dont l’achèvement est prévu pour 2026. Le premier projet de construction neuve – le bâtiment A3 – a déjà été préloué à 80% un an avant son achèvement.
Malgré une hausse significative du taux de vacance à Lausanne West/Crissier (+15 600 m2), la demande reste intacte. Cette augmentation s’explique par les livraisons récentes d’importants bâtiments, notamment le bâtiment Closel et le Quartier Horizon, avec respectivement encore 4000 m2 et plus de 7000 m2 de bureaux disponibles. Par ailleurs, en dépit d’une disponibilité particulièrement élevée à Lausanne Ouest/Crissier (15%), cette zone continue d’attirer des entreprises à la recherche de bâtiments labelisés, modernes et bien connectés. Ces nouveaux projets, contribuant à la modernisation de l’Ouest lausannois, sont des options attrayantes pour les entreprises, même si l’absorption des nouvelles surfaces prendra du temps.

Une demande qui reste soutenue en Suisse

Dans l’ensemble, la demande de surfaces de bureau est toujours importante. Cependant, la commercialisation des espaces vacants dans les bâtiments anciens, éloignés des gares, demeure un défi. A l’inverse, le marché absorbe relativement rapidement les surfaces de bureau modernes, flexibles et conformes aux normes ESG, bénéficiant d’une bonne connectivité. Cela se reflète notamment dans l’offre limitée dans ces localisations. Dans le premier district de Zurich, 3% des surfaces de bureau sont disponibles, contre 1,5% dans le CBD de Lausanne et seulement 0,4% dans le centre-ville de Berne. Le CBD de Genève affiche une offre plus importante, avec 3,9% de disponibilité. A Bâle, le taux de vacance atteint 9,2% dans le centre-ville.

Le marché des transactions

L’étude de JLL souligne l’important contraste en termes de perspectives pour l’immobilier de bureau en Suisse. D’une part, les taux de vacance ont récemment légèrement augmenté et les investisseurs restent prudents en raison de l’incertitude sur les besoins futurs en espaces, liée à des concepts de travail plus flexibles. D’autre part, une croissance économique comme de l’emploi robuste soutient la demande et le marché des bureaux suisse a prouvé sa forte résilience. De plus, les loyers sont protégés contre l’inflation et, contrairement au marché locatif résidentiel, le risque d’intervention politique sur le marché commercial est limité.
De nombreux fonds et fondations de placement ont procédé à des augmentations de capital au second semestre 2024 et aborderont la nouvelle année avec des liquidités importantes. Leur stratégie d’investissement devrait se concentrer sur les biens «core» situés dans les zones d’attraction des centres urbains, ne nécessitant pas de rénovation et répondant idéalement aux critères de durabilité requis. Ces dernières semaines, une plus grande disposition à payer, couplée à un intérêt globalement plus large, a été perceptible. Cette tendance, associée à un environnement de taux d’intérêt plus bas, devrait conduire à une compression des rendements et à une augmentation des volumes de transactions cette année. Jan Eckert, CEO Suisse & Head Capital Markets DACH chez JLL, commente:
«De nombreux acteurs du marché sont optimistes pour les mois à venir et souhaitent profiter de l’environnement d’investissement amélioré pour réaliser des transactions. Nous observons cette tendance tant dans la quantité que dans la qualité des offres reçues. Les perspectives à court terme sont plus favorables qu’elles ne l’ont été depuis trois ans».

La durabilité a le vent en poupe

Comme l’année précédente, le rapport de fin 2024 a pris en compte les surfaces de bureau disponibles dans des bâtiments ayant obtenu une ou plusieurs des certifications suivantes: BREEAM, DGNB, Greenproperty, LEED, Minergie, SNBS, 2226 ou Site 2000 watts. Certains bâtiments répondant à des normes de durabilité élevées, mais non certifiés, ont également été inclus dans l’enquête. Depuis l’année dernière, l’offre de surfaces de bureau conformes aux normes ESG a augmenté, tant en termes absolus (+85 500 m2) qu’en pourcentage du stock total de bureaux vacants (34,3% aujourd’hui contre 30,8 % un an plus tôt). Cette augmentation absolue et relative s’observe sur tous les grands marchés suisses, à l’exception de la région de Zoug. Quelque 84% des surfaces de bureau conformes aux normes ESG disponibles se trouvent sur les deux plus grands marchés de bureau suisses: Zurich et Genève. Les espaces de bureau durables représentent une part substantielle de l’offre totale de bureaux vacants, soit 37,7% à Zurich et 52,9% à Genève. On peut également observer qu’il n’y a toujours que peu de bureaux conformes aux normes ESG disponibles dans les emplacements les plus centraux. Alors qu’un total de 34,3% des surfaces de bureau à disposition en Suisse répondent aux critères de durabilité, la proportion dans les centres-villes et les CBD n’est que de 7,6%.
Ainsi, les espaces de bureau répondant à des normes de durabilité élevées sont importants pour un nombre croissant d’entreprises. Le caractère central de l’emplacement et une bonne accessibilité figurent également parmi les exigences les plus fortes des entreprises en recherche de site. La quantité actuelle de surfaces de bureau disponibles répondant à ces deux critères est tout aussi rare qu’auparavant, de sorte que de nombreuses entreprises en quête de bureaux doivent faire des compromis.

 

Carla Angyal

Pas moins de 84% des surfaces de bureau conformes aux normes ESG disponibles se trouvent sur les deux plus grands marchés de bureau suisses: Zurich et Genève.

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