Surélévation de l’immeuble de la Rue de la Prulay à Meyrin.

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logement - Fondation Parloca Genève

Le propriétaire immobilier comme acteur social

30 Août 2023 | Articles de Une

Que deviennent les immeubles à l’échéance du régime HLM? Le mieux qui puisse leur arriver est d’être rachetés par la fondation Parloca. Cette entité qui fête ses trente ans possède seize immeubles dans le canton de Genève. Elle se distingue par son approche large du rôle de propriétaire, par le soin apporté à l’entretien et la revalorisation de son parc immobilier et la modicité des loyers perçus. Elle est à nouveau à la recherche d’immeubles à acquérir.

Il y avait une fois une loi fédérale… cette accroche de conte de fée résume l’origine de Parloca, en 1993. S’appuyant sur les aides inscrites dans la Loi fédérale sur la construction et l’accession à la propriété (LCAP), différents acteurs de l’économie genevoise créent cette fondation sans but lucratif, dont les buts sont de mettre à disposition des logements de qualité à des conditions avantageuses. C’est ainsi que Parloca a racheté au fil des ans des immeubles en fin de régime HLM, en les soustrayant au marché spéculatif, tout en conservant les loyers sociaux qui y étaient pratiqués.
Aujourd’hui, bien que la LCAP ne soit plus en vigueur, Parloca reste animée de la conviction qu’être propriétaire, ce n’est pas être assis sur un tas de pierre qui rapporte des dividendes, mais c’est un engagement social, comme le dit Robert Hensler, ancien chancelier d’Etat, avocat et président de la Fondation depuis 2010. Celle-ci possède désormais seize immeubles représentant un parc de quelque 1400 logements dans cinq communes genevoises: Chêne-Bourg, Lancy, Meyrin, Onex et Vernier.
Si Parloca n’a pas d’actionnaires à rémunérer, elle doit générer les ressources nécessaires à l’entretien et à la rénovation de son parc immobilier. «Des immeubles bien entretenus suscitent le respect des locataires, qui peu à peu s’impliquent dans le maintien d’un bon état général», souligne Christian Borner, directeur de la Fondation.

Robert Hensler, ancien chancelier d’Etat, avocat et président de la fondation Parloca.
Christian Borner, directeur de la
fondation Parloca.

Entretenir, c’est bien; moderniser, c’est mieux

Sans attendre le resserrement des normes d’efficience énergétique des bâtiments intervenu l’an dernier, Parloca a investi dès les années 2010 dans l’enveloppe extérieure de ses immeubles et a mis en œuvre les actions du programme Eco 21 de SIG. «Nous avons des édifices vieux de soixante ans. Quand vous les visitez, ils semblent neufs», relève le directeur de la Fondation. «Par ailleurs, l’indice de dépense de chaleur (IDC) de certains d’entre eux est déjà conforme aux valeurs qui seront exigées en 2030». Des seize immeubles de la fondation, seuls quatre sont encore chauffés aux énergies fossiles. «Ce n’est qu’une question d’années avant que tout notre parc ne soit raccordé aux réseaux de chauffage à distance», assure Christian Borner.
Le remboursement des avances faites par la Confédération, une saine gestion de la Fondation mise en place dès 2010, ainsi que la baisse des taux hypothécaires au début des années 2010 ont donné à Parloca la marge lui permettant d’investir environ quatre millions de francs par an en rénovation. «Comme nous avons travaillé avec nos fonds propres, il n’y a pas de dette à honorer», précise Robert Hensler. «Dans le cadre de trois projets de surélévations réalisés entre 2017 et 2021, nous avons fait la preuve que l’on peut amener un immeuble assimilable à une passoire énergétique au niveau Minergie à un coût acceptable pour le propriétaire et sans procéder à des hausses de loyers», complète Christian Borner.
Et les intérieurs? Pour ne pas causer de gêne aux locataires, la Fondation rénove les appartements au départ de leurs occupants. «Comme nos loyers de base sont très bon marché, l’augmentation de loyer après travaux, correspondant au prix fixé par l’Office du logement dans le cadre des autorisations de construire, reste largement en dessous du prix moyen des logements des quartiers où nous sommes présents», commente Christian Borner.

La surélévation comme
valorisation

Pour Parloca, la responsabilité sociale du propriétaire s’étend également au choix des mandataires. Alors que dans les appels d’offres de l’Etat, le facteur coût pèse pour 60% dans l’évaluation des soumissionnaires, ce qui aboutit à écarter des fournisseurs locaux et suscite parfois la grogne des métiers du bâtiment, les mandataires de la Fondation doivent avoir pignon sur rue à Genève, employer du personnel stable et ne peuvent pas sous-traiter les travaux. Certes, cela a un coût, relève le directeur, mais c’est le prix à payer pour rester un acteur social et économique responsable.
La surélévation des immeubles est pour Parloca une autre manière de valoriser son bien, au service de la collectivité. Trois surélévations ont eu lieu à ce jour, qui ont permis de créer 62 logements. Un nouveau projet est d’ailleurs en cours d’étude à Onex. «En tant que propriétaire d’immeubles principalement situés dans des communes suburbaines, nous estimons que la réalisation de surélévations permet d’apporter de la mixité sociale dans ces périmètres. Cette mixité est par ailleurs souhaitée par les communes concernées», détaille Robert Hensler.
Cette démarche a été récompensée en 2017 par le Prix cantonal du développement durable. «Ce prix récompense la surélévation de cinq immeubles à Meyrin, à travers laquelle nous avons aussi retravaillé les extérieurs, avec un impact positif sur une portion de cette ville», relève le président. En outre, Parloca est parvenue à proposer les nouveaux appartements à des loyers inférieurs à ceux validés par le Canton. La même année, Parloca recevait un prix du magazine «Bilan» pour l’assainissement énergétique de ces mêmes immeubles.

Une nouvelle étape

Le souci d’équité pousse la Fondation à faire la chasse à ceux de ses locataires qui, profitant des loyers de base avantageux, sous-louent leur appartement avec profit, ce que la loi ne permet pas. Robert Hensler est fier d’avoir obtenu début juillet une décision du Tribunal des baux et loyers qui condamne les locataires pris sur le fait à rembourser à Parloca le trop-perçu.
Après la rénovation des enveloppes de ses immeubles, Parloca aborde désormais une nouvelle phase qui vise à rendre ses bâtiments plus autonomes sur le plan énergétique. Des études sont en cours pour doter les toitures de ses édifices de panneaux solaires et d’installer des bornes de recharges pour véhicules électriques dans les garages souterrains, une prestation que l’on n’attendrait pas dans des logements bon marché.
Et puis, en 2021, Parloca a acquis pour la première fois un immeuble neuf, dans le quartier de l’Etang, à Vernier. «Cette acquisition a ouvert un nouveau chapitre pour notre Fondation. Nous ne sommes plus cette entité qui ne détient que des barres d’immeubles des années 1960, c’est important en termes d’image», explique Christian Borner. «Le Conseil de Fondation a la volonté d’accroître le parc immobilier dans la continuité de notre approche sociale, confirme Robert Hensler; mais ces dernières années, avec les taux bas, les investisseurs étaient prêts à payer des prix que nous ne pouvions pas envisager. Aujourd’hui le marché évolue et nous le suivons attentivement».
Alors, bon anniversaire à Parloca pour ses 30 ans d’activité, et bon vent pour la suite!

 

Cesare Accardi

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