Emmanuel Poularas et ses deux fils, Kevin et Steven.

/

ENTREPRISES FAMILIALES - Prologis Sarl à Oron/VD

«Le bonheur clé en main»

23 Août 2023 | Articles de Une

Depuis 1997, la société Prologis, basée à Oron, propriété de la famille Poularas, construit des villas sous le slogan «le bonheur clé en main». En plus d’un quart de siècle d’activité, Prologis a réalisé plus de 2500 villas et appartements, principalement dans les cantons de Vaud, de Fribourg et du Valais, où elle compte une succursale à Aproz. La deuxième génération est en cours d’intégration dans cette entreprise au modèle d’affaires original.

Ni promoteur, ni entreprise générale, Prologis a développé un modèle d’affaires original qui a séduit une vaste clientèle. L’acheteur choisit la région dans laquelle il aimerait bâtir sa villa, Prologis s’occupe du reste. «Nous sommes arrivés très vite avec un service complet et nous nous sommes positionnés en prestataires de service, pas en promoteurs», explique le fondateur et administrateur de cette Sàrl familiale, qui voit dans cette attitude la raison de son succès.
«Notre matière première, ces sont les terrains, expose-t-il, nous juxtaposons un terrain, un client et un projet. Quand tout est aligné, nous déposons une mise à l’enquête». La société propose à ses clients les parcelles dont elle dispose dans la zone qu’ils ont choisie, soit qu’elle les ait acquises, soit qu’elle fasse équipe avec un propriétaire qui vendra son bien-fonds avec la future villa. Le client peut aussi apporter lui-même la parcelle sur laquelle il fera édifier son logement. Financement hypothécaire, plans, mise à l’enquête, aspects techniques, toutes ces prestations sont effectuées en interne par Prologis.

Inclassable

«Les banques n’arrivent pas à nous classer, nous avons un métier unique», témoigne Emmanuel Poularas. S’il devait définir ses prestations, il parlerait d’accompagnement à la clientèle, laquelle peut être l’acquéreur d’une villa ou l’apporteur d’un terrain. Il ne se voit en tout cas pas comme promoteur; bâtisseur est en revanche un mot qu’il accepte.
Parmi ses trente collaborateurs, Prologis compte des spécialistes en financement, des architectes, de chefs de travaux et des conseillers à la clientèle. La société s’est en outre entourée d’un réseau d’entreprises partenaires, dont certaines collaborent avec elle depuis plus de vingt ans.
N’est-il pas étonnant que Prologis ait un statut de Sàrl, alors que l’immobilier est une activité intensive en capital? «La structure juridique n’a aucune importance, la solidité d’une entreprise se mesure à celle de son bilan. Nous n’avons aucune dette», répond Emmanuel Poularas.

Un «P» de Prologis très humain….

Trop rares terrains

La raréfaction des terrains, consécutive aux modalités de mise en œuvre de la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT) par le Canton de Vaud est un défi pour Prologis. Le Canton a en effet décidé de concentrer les logements dans les centres et de remettre en zone de verdure nombre de parcelles situées dans des villages ou bourgades. «Nous sommes en contact avec 1200 familles, souvent de jeunes couples, qui voudraient bâtir, mais faute de terrain nous ne pouvons réaliser qu’une septantaine de villas par an», constate Emmanuel Poularas.
La raréfaction des terrains augmente leur valeur et éloigne la perspective de devenir propriétaire pour de nombreux Vaudois. On a cru résoudre le problème de la mobilité en concentrant le logement, mais c’est un leurre, affirme Emmanuel Poularas. Les gens ne vivent pas nécessairement là où ils travaillent, ni là où ils étudient. Et faute de pouvoir bâtir des locaux artisanaux ou industriels, les villages perdront des emplois et se dépeupleront, s’insurge notre interlocuteur: «Il est devenu impossible de bâtir dans près de deux tiers des 300 communes du canton».
En vingt ans, les prix des réalisations de Prologis ont augmenté de 13%. Le prix moyen d’une villa, hors terrain, est d’environ 500 000 francs pour 180 m2 de surface habitable. Les terrains, eux, ont plus que doublé de valeur. Le coût cumulé des deux, terrain et villa, a changé le profil des clients de la société.

Pas peur de l’avenir

Depuis quelques années, Prologis s’est lancé dans la réalisation d’immeubles en PPE, le plus souvent pour le compte de propriétaires fonciers désireux de valoriser leur avoir. «Nous avons construit septante immeubles et sept sont en cours de réalisation. Ce segment représente 10% à 12% de notre chiffre d’affaires», commente Emmanuel Poularas.
Lorsqu’on lui dit que le concept de la villa individuelle aboutit à étaler le bâti et «manger» des terres, Emmanuel Poularas rétorque que chaque propriété peut devenir une oasis de verdure propice à la biodiversité. «De plus en plus, nos clients cherchent à planter des espèces indigènes et à créer des biotopes vivants. Je suis commerçant: s’il y a un demande, je cherche à la satisfaire. C’est pourquoi Prologis va aussi dans cette direction».
L’avenir? «Nous saurons toujours nous adapter, je n’ai pas peur pour notre entreprise, répond Emmanuel Poularas. La peur que j’ai, c’est pour les générations futures: l’accès à la propriété est terriblement freiné, principalement à cause du prix du foncier».

 

Cesare Accardi

GROS PLAN

«Je suis né patron»

 

«Je suis né patron, raconte Emmanuel Poularas. A onze ans, je voulais acheter le boulanger du coin». À vingt ans, il construit sa première villa. L’entreprise mandatée fait faillite et il termine le chantier lui-même. Après cette première expérience, il achète et vend quelques terrains, ce qui l’amène à s’interroger: pourquoi ne pas en faire un métier? Il se lance, avec son épouse Solange.
Prologis est née la même année que Steven, le troisième fils du couple. «L’équipe a vu ma femme venir au bureau avec la poussette, c’est aussi cela la dimension familiale», relève Emmanuel Poularas, avant d’ajouter: «Nous avons eu deux bébés cette année-là, mon fils et l’entreprise, mais nous n’avons jamais mis nos enfants en compétition avec cette dernière, même si je travaillais beaucoup».
«Je n’ai jamais voulu imposer quoi que ce soit à mes enfants au-delà de leur inculquer des principes de droiture et d’honnêteté», souligne-t-il. «Mes parents ne nous ont pas poussés à reprendre Prologis. C’est un choix porté par les valeurs transmises dans mon éducation et par la passion», témoigne de son côté Kevin Poularas, le fils aîné. Reste qu’entre jobs d’été dans l’entreprise, visites de chantiers le samedi et récits à la table familiale, les trois garçons du couple fondateur sont jetés dans le bain de la construction dès l’enfance.
Kevin a rejoint Prologis en 2015, après un séjour aux États-Unis, où son choix de reprendre, avec ses frères, l’entreprise familiale s’est cristallisé. «Il faut du temps pour bien comprendre Prologis, explique son père; nous avons soixante à septante chantiers en permanence, nos collaborateurs exercent de nombreux métiers distincts, nous sommes en contact avec toute sorte de personnes, il faut une vue d’ensemble pour prendre les bonnes décisions».
Arrivé en 2021 dans la société, Steven, le troisième fils, est encore en phase de découverte. Il a payé sa formation d’ingénieur du son en travaillant chez Prologis et s’y est trouvé si bien, qu’il a décidé de s’associer à ses deux frères, dont le second, Dylan, a terminé ses études et rejoindra Prologis en août 2023.
«L’esprit familial est quelque chose que les clients sentent et apprécient, assure Emmanuel Poularas, ne serait-ce que parce qu’une PME familiale pense à long terme».

EXPLOREZ D’AUTRES ARTICLES :