Nicolas Di Maggio.

/

FINANCE

La hausse des coûts de financement, un nouveau défi pour les fonds immobiliers

22 Mar 2023 | Articles de Une

Après plusieurs années de baisse constante des taux, et même parfois la possibilité d’emprunter à un taux négatif, l’augmentation des coûts de la dette entraîne de nouvelles difficultés pour les fonds immobiliers – et de nouveaux risques pour les investisseurs.

Fin 2014, la Banque nationale suisse (BNS) a adopté des taux d’intérêt négatifs, avec effet immédiat, pour réagir à la stabilisation du taux de change. Grâce à ces taux d’intérêt négatifs, les fonds immobiliers ont pu se refinancer à des conditions toujours plus avantageuses. Comme le montre l’illustration 1, la BNS a mis un terme à son expérience en septembre 2022, avec un relèvement exceptionnel de 0,75% qui a hissé le taux directeur à 0,25%. Ce taux s’établit actuellement à 1% et, d’après les prévisions, il devrait encore augmenter au cours des prochains trimestres.

Stratégies de financement variées

La montée des taux frappe les fonds immobiliers à différents degrés selon leur type de financement, c’est-à-dire, d’une part, la proportion de capitaux d’emprunt qu’ils utilisent dans leurs activités et, d’autre part, la structure de ces capitaux (voir illustration 2). La réglementation impose un plafond maximal d’un tiers d’endettement aux fonds immobiliers.Les fonds en cours de constitution ont parfois été amenés à se financer à court terme, afin de préserver leur flexibilité pour de nouvelles acquisitions. De surcroît, les agios élevés du passé permettaient aux fonds de faire redescendre systématiquement leur endettement croissant au moyen d’augmentations de capital – après une période d’activités d’acquisition intenses. Avec des agios faibles, voire négatifs dans certains cas, cette stratégie n’est plus réalisable.

1. Taux d’intérêt à court et long terme.
2. Part de l’indice selon le taux d’endettement.
3. Evolution de la rémunération du financement par l’emprunt (en %).
4. Structure et coûts de l’endettement.

Conséquences des coûts d’intérêt accrus

Les coûts d’intérêt plus lourds se font d’ores et déjà ressentir dans les premiers comptes semestriels et annuels (voir illustration 3). Plus la durée résiduelle des financements externes est longue, plus un fonds est «protégé» contre la hausse des taux (voir illustration 3).
Pour les investisseurs, la question se pose instamment de savoir comment les coûts d’intérêt accrus influenceront les revenus à l’avenir et, partant, la base des dividendes.
La bonne nouvelle est que grâce à un recours modéré à l’endettement, cette catégorie de placement est bien positionnée pour résister au renversement de la tendance des taux (voir illustration 4).
D’après nos études, en supposant que le taux de refinancement s’élève à 2% pendant les trois prochaines années et que tous les autres paramètres des comptes de résultat demeurent «ceteris paribus», la charge d’intérêt supplémentaire représentera une part de 3,1% des loyers ou 5,7% du cash-flow opérationnel dans 12 mois et 3,9% des loyers ou 7,3% du cash-flow opérationnel après trois ans.

Conclusion

Après plusieurs années de coûts d’intérêt de plus en plus bas et d’accès facile à des capitaux propres, les fonds immobiliers sont aujourd’hui confrontés à de nouveaux défis. Leur priorité ne doit plus être l’ingénierie financière, mais la discipline des coûts. De leur côté, les investisseurs doivent mener des analyses approfondies et examiner l’évolution probable des revenus des sociétés de fonds face à la hausse des coûts, pour s’éviter de mauvaises surprises.

 

Nicolas Di Maggio
CEO, SFP SA