Adrian Chebutiu.

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Portrait

«J’étais un communiste exemplaire»

10 Nov 2021 | Articles de Une

La trajectoire assez étonnante d’Adrian Chebutiu commence en 1989, lors de la chute du régime de Nicolae Ceaușescu. «J’étais un communiste exemplaire, explique en souriant celui qui parle aujourd’hui – entre autres langues – un français parfait. J’avais terminé mes études et me destinais à l’ingénierie automobile». Le jeune homme, à l’époque, se rappelle avoir été étonné d’apprendre qu’il était désormais autorisé à chacun de quitter son lieu de travail sans attendre que le garde d’immeuble l’ait ordonné. «La Roumanie s’est brusquement retrouvée en démocratie, mais sans savoir du tout ce que cela voulait dire. Trente ans plus tard, tout n’est d’ailleurs pas réglé dans mon pays natal». Au changement de régime, le jeune ingénieur travaille effectivement dans l’automobile, mais ne se sent pas à l’aise dans un système instable où les politiciens décident des stratégies économiques et tiennent de fait la vie des entreprises entre leurs mains.
L’avantage des économies déstabilisées est qu’elles offrent des opportunités à ceux qui savent les saisir. Très vite, en 2002, on retrouve Adrian Chebutiu dans le rôle de cofondateur de la première société de trading énergétique de Roumanie, qui fournit le tiers de l’électricité du pays. Il se lance ensuite dans le tertiaire et la gestion de diverses entreprises industrielles, avec des activités à l’international et notamment en Suisse, nation dont il découvre la stabilité politique et économique, ainsi que la qualité des infrastructures. A la naissance de ses enfants, il est déjà actif en terres helvétiques, et en 2018, quand ceux-ci ont une dizaine d’années, il franchit le pas et s’installe en Romandie. «Etajoint SA était en grande difficulté; j’ai décidé de la racheter et de conserver ses collaborateurs, des gens de confiance qui avaient des valeurs, et de réorganiser les activités autour de trois domaines de travaux spéciaux: l’assainissement du béton, l’étanchéité de grands bâtiments et les sols en résine sans joint».

Assurer les bases

Adrian Chebutiu rappelle que l’étanchéité du bâtiment, qui ne représente que 2% du budget global d’une construction, en est pourtant l’élément le plus important. Son entreprise connaît ce qu’il nomme une «démocratie contrôlée», c’est-à-dire que toutes les idées comptent, mais qu’à la fin, quelqu’un assume la décision. L’organisation vise à un respect absolu de la qualité et des délais. «Nous voulons nous développer, mais pas à n’importe quel prix. Il y a une différence entre progrès et croissance, dit l’entrepreneur, qui dit avoir été ému de la confiance de la Ville de Genève, qui a confié à GTS la réfection des pataugeoires. «Ce n’était pas un très gros mandat, mais il signifiait beaucoup pour nous, parce que nous étions nouveaux et parce que la sécurité des enfants est une responsabilité sociale. Cette confiance nous oblige», dit-il. Rien d’étonnant à ce que GTS attache beaucoup d’importance à la présence locale: «Nous savons que certains font venir de la main-d’œuvre d’assez loin pour arrondir leurs marges. Ce ne sera jamais notre cas».
Au début de l’année prochaine, GTS devrait ouvrir sa succursale genevoise. Notons enfin que l’administration de la société-mère du petit empire Chebutiu est dirigée par… son épouse. «C’est elle qui gère tout. On se partage les rôles: j’investis et elle essaie de m’arrêter».

 

Thierry Oppikofer

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