Votation genevoise du 18 mai 2025 - Panneaux solaires
Initiative et contre-projet: comment ne pas se (laisser) tromper
Le 18 mai prochain, le corps électoral genevois sera appelé à se prononcer sur deux textes visant un but apparemment noble et vertueux: accélérer la transition vers l’énergie solaire dans le canton. Les Verts libéraux ont en effet lancé une Initiative populaire «Pour une transition rapide vers le solaire à Genève» (IN 191), dont le caractère excessif a suscité un contre-projet plus réaliste intitulé «Dynamisons la production d’énergies renouvelables».
L’objectif paraît commun, mais les approches sont bien distinctes. Le parti des Verts libéraux, dont les résultats électoraux restent loin des ambitions affichées, semble sans cesse hésiter entre virer plus «verts» et grapiller quelques voix sur les terres des écolos perdus dans les luttes de genre ou tenter de séduire des libéraux sensibles à la cause environnementale. Le moins que l’on puisse dire est que l’IN 191 relève de la première stratégie. Exigeant une transition rapide et généralisée vers l’énergie solaire, l’Initiative prévoit entre autres l’obligation généralisée d’installer des panneaux solaires photovoltaïques sur l’ensemble des surfaces des constructions existantes ou futures, y compris les façades et balcons; l’application minimale du droit fédéral en matière de protection du patrimoine; la garantie théorique, par le canton, du prix de vente de l’électricité produite pendant toute la durée de vie des installations.
Cette approche ambitieuse, théorique et radicale, s’est heurtée à une série d’obstacles, tant techniques que pratiques.
Coercition générale
L’Initiative impose l’installation généralisée de panneaux photovoltaïques sur toutes les constructions existantes et neuves. Toutes les surfaces adaptées sont concernées: les toitures, mais aussi les façades et balcons. Le texte contraint également les propriétaires à réaliser ces travaux avant le 31 décembre 2034. Il s’agit en somme d’une obligation légale générale d’installer un seul type de panneaux solaires dans tout le canton de Genève! Voilà qui, selon le Conseil d’Etat pourtant acquis à la promotion des énergies renouvelables, n’est pertinent ni d’un point de vue énergétique, ni sur le plan économique.
L’obligation généralisée d’installer des panneaux solaires photovoltaïques sur toutes les surfaces disponibles ne tient pas compte de l’efficacité réelle des installations. Certaines surfaces, comme les façades nord ou les balcons ombragés, ne sont pas optimales pour la production d’énergie solaire. De plus, cette approche ne distingue pas les différents types de panneaux solaires (photovoltaïques et thermiques) et leurs utilisations spécifiques. Les auteurs de l’Initiative, dont les buts paraissent plus politiques que pragmatiques, ignorent visiblement les avancées technologiques les plus récentes. Sans compter que la pose systématique de panneaux solaires sur tous les bâtiments, y compris les façades, pourrait avoir un impact esthétique considérable sur le paysage urbain et rural du canton, transformer en exposition d’ersatz de l’œuvre de Pierre Soulages, pape du monochrome noir!
Un patrimoine bradé
En se tenant à la protection minimaliste du patrimoine définie par le droit fédéral, les Verts libéraux entendent clairement compromettre ce qui reste de la beauté du patrimoine bâti de nos rues et de nos villages.
La garantie du prix de rachat de l’électricité pendant toute la durée de vie des installations est jugée peu réaliste et difficilement applicable. Les fluctuations du marché de l’énergie sur une période de 20 ans rendent cette garantie risquée pour le canton. Rappelons également que c’est en application du droit fédéral que le Conseil fédéral fixe le prix maximal de rachat de l’électricité pour éviter des distorsions de concurrence.
Un contre-projet équilibré
Bien que souscrivant à la nécessité d’accélérer la transition énergétique, le Conseil d’Etat a exprimé plusieurs objections au dispositif proposé par les initiants. Afin de tenir compte des réalités techniques, esthétiques et patrimoniales cantonales, il a demandé au Grand Conseil d’élaborer un contre-projet à l’IN 191.
Fruit d’un travail approfondi et d’un consensus politique, il offre une option alternative permettant d’atteindre des objectifs très ambitieux en matière de production solaire, tout en respectant les spécificités du territoire genevois, ainsi que les contraintes techniques et économiques. Le contre-projet se concentre sur les surfaces les plus productives, notamment les grands consommateurs d’électricité (plus de 0,2 GWh par an, essentiellement en zone industrielle), qui devraient s’équiper d’ici 2030: l’électricité produite sera prioritairement destinée à leur autoconsommation, favorisant ainsi leur indépendance énergétique; les toitures des immeubles neufs; les immeubles et toitures en rénovation.
Viser l’efficacité
Cette approche ciblée permet de maximiser l’efficacité des installations, tout en limitant l’impact visuel. À l’heure où la pénurie de main-d’œuvre, de panneaux solaires photovoltaïques et d’ingénieurs susceptibles de suivre ces travaux est avérée, il est essentiel de pouvoir réaliser des installations d’une taille relativement importante et générant une quantité d’électricité significative, plutôt que de multiplier les projets de petite taille qui sont, par définition, consommateurs de ressources à outrance.
Ce contre-projet sera bien plus susceptible d’atteindre les objectifs d’une forte augmentation de l’énergie photovoltaïque produite à Genève. Les cas où une autorisation de construire est nécessaire pour l’installation de panneaux solaires sont clairement définis, permettant de préserver le patrimoine tout en facilitant le développement du solaire.
Financement et aides de l’Etat
En lieu et place d’une garantie de rachat de l’électricité, le contre-projet propose des mesures de soutien plus réalistes, passant par des subventions, des dégrèvements fiscaux, des prêts et des cautionnements. Le Canton pourra notamment octroyer une caution solidaire sur l’intégralité du financement des installations solaires pour les biens appartenant à la fortune privée des propriétaires.