On ne trouve que très peu de surfaces vacantes dans les lieux prisés par les entreprises à la recherche de bureaux.

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IMMOBILIER D’ENTREPRISE - L’analyse de JLL

Immobilier de bureau en Suisse: du nouveau en 2023

18 Jan 2023 | Articles de Une

Offre en baisse, loyers «prime» attractifs, revirement sur le marché des investissements… tels sont les thèmes centraux de l’étude annuelle réalisée par Jones Lang LaSalle (JLL). Avec une grande clarté, la publication dresse un tableau de l’immobilier de bureau en Suisse, tout en s’attachant aux spécificités régionales. L’étude fait également un rapide état de la question en Europe.

Les plus gros marchés de l’immobilier de bureau suisses – Zurich, Genève, Berne, Bâle et Lausanne – affichent un taux d’offre de surfaces disponibles en baisse, de 4,7% à 4,5%, sur douze mois. A titre comparatif, en Suisse, 1,3% des logements sont vacants. L’étude de JLL insiste toutefois sur le fait qu’il est usuel d’avoir des taux d’offre plus élevés sur le marché de l’immobilier de bureau, d’autant que la disponibilité de surfaces est une condition essentielle à l’arrivée de nouvelles entreprises et à la croissance économique.

Moins de surfaces disponibles, mais des opportunités de
développement

Fin 2022, les cinq zones suisses les plus importantes offraient un total de 878 200 m2 de surfaces de bureau disponibles (soit
33 800 m2 de moins qu’un an auparavant), ce qui correspond à 123 terrains de football ou environ 60 000 places de travail. Quelque 36% des surfaces vacantes comptabilisées se concentrent dans quatre zones: Opfikon-Glattbrugg/ZH, Wallisellen/ZH, l’aéroport de Genève (arrivée sur le marché de nouvelles surfaces à Blandonnet et à l’Etang) et Lausanne Ouest/Crissier (livraison de nombreux bâtiments commerciaux au cours des deux dernières années). La diminution de 33 800 m2 de l’offre de surfaces de bureaux disponibles est surtout liée à l’important recul enregistré par la région de Zurich (-52 900 m2). Genève (-5000  m2) et Lausanne (+1700 m2) n’ont connu que de faibles variations par rapport à l’année dernière.
Dernièrement, les activités de construction ont subi un net ralentissement. En effet, de 2023 à 2025, 581 000 m2 devraient voir le jour dans les cinq zones principales du marché de l’immobilier de bureau suisse. Un chiffre nettement inférieur à celui des années 2020 à 2022 (903 000 m2). L’étude cite néanmoins des grands projets en cours de développement, comme Quai Vernets
à Genève. Dans la région lausannoise, les livraisons prochaines du Parc du Simplon à Renens et de Central Malley (gare de Prilly-Malley) offriront un stock renouvelé de surfaces administratives. Dans la périphérie fribourgeoise, le site d’innovation Blue Factory comprendra plus de 14  000  m2. Pour ces projets, des critères tels que la gestion de l’énergie, l’environnement, la mobilité/accessibilité – auxquels s’ajoute la qualité des bâtiments – seront déterminants dans les choix des futurs locataires.
La majorité des marchés européens enregistrent une solide demande de bureaux durant les derniers trimestres. Après l’important repli lié à la pandémie subi par le marché de la location, la demande de bureaux a fortement rebondi en 2022. Comparé au reste de l’Europe, les taux de vacance en Suisse (1,3% en moyenne) restent très bas. Le taux de vacance moyen observé dans quelques 24 villes européennes au troisième trimestre 2022 se situe à 7,2%, sachant que Bucarest, Helsinki, Varsovie, Milan et Dublin sont à 12% ou plus.

Pénurie au centre-ville

On ne trouve que très peu de surfaces vacantes dans les lieux prisés par les entreprises à la recherche de bureaux. En effet, toutes ciblent des bâtiments modernes et durables, situés dans des zones centrales bien desservies. A contrario, les surfaces de bureau disponibles se trouvent généralement sur d’anciens sites, en zone périphérique.
Toute région confondue, le niveau des loyers aux meilleurs emplacements est resté constant. Cependant, une légère hausse est identifiable, due à une forte demande pour les bureaux bénéficiant d’une situation centrale. Les loyers du centre-ville genevois sont restés stables, frisant les
CHF 850.-/m2 par an, malgré une baisse du taux de vacance à 1,9%. Le loyer «prime» a également augmenté à Lausanne, où il est passé de CHF 480.- à 500.-/m2, pour un taux d’offre dans le centre-ville à 1,5%. Certains districts comme Pully ou Vidy ont enregistré d’importantes transactions, illustrant le dynamisme de ces régions moins centrales, plus discrètes, mais offrant des surfaces de qualité.

Perte de vitesse des investissements dans la construction

Si la demande de surfaces de bureau est restée stable dans les zones principales du marché, un revirement s’est indubitablement opéré sur le marché des investissements. Durant les premiers mois de l’année écoulée, il n’y avait certes toujours aucune réelle alternative aux investissements immobiliers. «Mais les taux d’intérêt ont soudainement commencé à augmenter, comme les marchés immobiliers et financiers le redoutaient depuis longtemps. Le contexte des investissements a évolué dans un sens de plus en plus défavorable aux objets sensibles aux taux d’intérêt dans le segment ‘core’, expliquant le report, voire le retrait pur et simple de certaines transactions. Dans les conditions tendues du second semestre 2022, un certain nombre de véhicules d’investissement n’ont plus été en mesure d’atteindre pleinement leurs objectifs de volume d’émission; quelques-uns ont même reporté leurs plans d’émission en raison de la volatilité du marché», constate JLL.
L’écart entre les rendements «prime» de l’immobilier de bureau et celui des obligations fédérales à 10 ans s’est détérioré de près de 100 points de base en l’espace d’un an, ce qui a eu une incidence négative sur la volonté d’investir dans des surfaces de bureau aux meilleurs emplacements. Lors des transactions, les investisseurs faisaient des offres moins nombreuses et moins élevées que dans la première moitié de l’année. La compression des rendements a donc pris fin, et une hausse des rendements «prime» a été enregistrée pour la première fois depuis 2009. Fin 2022, ils se sont établis à 2,2% à Zurich et à 2,5% à Genève.
Jan Eckert, CEO Suisse et Head Capital Markets (Allemagne, Autriche et Suisse) chez JLL, commente les évolutions du marché: «La priorité des investissement n’est plus de fuir les taux d’intérêt nuls ou négatifs, mais plutôt de se protéger contre l’inflation et de couvrir l’exposition aux taux d’intérêt réels. Plus le contexte d’inflation perdurera, plus les assureurs, les instituts de prévoyance et les épargnants privés, confrontés à une perte de pouvoir d’achat et de patrimoine, se concentreront sur des placements offrant la meilleure protection possible contre l’inflation. Dès la phase de réorientation du marché immobilier et le recalibrage des niveaux de prix terminés, on devrait voir à nouveau affluer plus de capital dans les investissements immobiliers».

 

Véronique Stein