Frédéric Blum.

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Frédéric Blum, Syndic de Rougemont/VD

«Il faut préserver la vie villageoise»

2 Nov 2022 | Articles de Une

– Pourquoi avez-vous refusé l’éventualité d’un fusion avec Château-d’Œx et Rossinière?
– Nous n’avons pas donné suite, car la fusion entre communes ne constitue pas, selon nous, une solution aux problèmes. La beauté du fédéralisme suisse est justement de permettre le maintien de l’autonomie. Par ailleurs, une étude de 2016 portant sur le canton de Glaris et la fusion entre communes, passées là-bas de vingt-cinq à trois, ne relève aucun changement sur le plan économique. En revanche, les auteurs font état d’un désintérêt des habitants pour la vie politique.

– Avez-vous ce problème à Rougemont?
– Ce n’est pas toujours simple, mais il y a des personnes prêtes à s’engager. Nous sommes une petite communauté, il n’y a pas de partis politiques. La seule motivation est de permettre à la commune de vivre. Afin de concilier plus facilement vie professionnelle et vie politique, nous avons fait le choix d’avoir sept élus municipaux, ce qui permet une meilleure répartition des tâches entre eux.

– Comment se développe la commune?
– Très bien. Ces dernières années ont notamment été marquées par la rénovation des hôtels et des restaurants de Rougemont. Nous avons aujourd’hui trois hôtels de différentes catégories – cinq, quatre et trois étoiles – et cinq restaurants. Ces projets de rénovation sont souvent nés de la volonté d’associations d’amoureux des lieux. Nous tenons aussi à être une station accessible à tous, donc nous avons réfléchi, pendant cette législature, à la construction d’un établissement de type «appartements hôteliers». Nous tenons absolument à la mixité dans notre commune, c’est très important pour la vie villageoise. La pandémie du Covid a entraîné une baisse des touristes étrangers, mais elle s’est doublée d’une hausse des nuitées de la part de la clientèle suisse. Notre politique vise à développer le tourisme doux, en collaboration notamment avec le Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut. Il ne s’agit pas forcément d’une clientèle à très haut pouvoir d’achat, mais elle est désireuse de découvrir la région et achète des produits locaux. C’est notamment le cas pour les produits du Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut, qui a été l’un des premiers parcs suisses à avoir labellisé diverses spécialités du terroir.

– Comment évolue la population de la commune?
– Elle est aujourd’hui de 860 habitants, ce qui représente une légère hausse. Cette progression s’explique par la pandémie, qui a incité des personnes ayant une résidence secondaire à Rougemont à s’y installer définitivement. L’arrivée de ces nouveaux habitants n’a pas d’impact sur les infrastructures car, durant la saison de ski, la population passe à 4000 personnes. La forte hausse des résidents durant les périodes de vacances nécessite des frais considérables pour maintenir et renouveler les infrastructures du réseau d’eau et des stations d’épuration, qui doivent être dimensionnées en conséquence.
Cela étant, nous sommes dans une région de montagne et le développement de la commune est donc forcément limité.

Le territoire de la commune comprend de très importantes surfaces forestières qui assurent un rôle de protection, notamment en matière de prévention des avalanches.

– Justement, quelles sont les mesures prises en faveur de l’environnement?
– Rougemont est située aux confins du canton de Vaud, dans un territoire comprenant de très importantes surfaces forestières qui assurent un rôle de protection, notamment en matière de prévention des avalanches. Ces surfaces exigent un entretien et nous pouvons valoriser les vastes volumes de bois prélevés en produisant de l’électricité, par exemple. Nous sommes en train de finaliser le chauffage à bois à distance pour la commune, qui devrait être opérationnel d’ici deux ans environ.
Par ailleurs, lors de la rénovation de bâtiments communaux, nous plaçons des panneaux solaires sur les toits. Mais Rougemont est un village et son patrimoine architectural est protégé. Nous avons le règlement le plus strict du canton de Vaud. Il s’agit de chalets dont les toits sont à deux pans, auxquels il faut intégrer de manière harmonieuse des panneaux solaires. La difficulté est de trouver le bon équilibre entre préservation de l’environnement et esthétique du village.
En matière de biodiversité, Rougemont travaille avec le Parc naturel régional Gruyère Pays-d’Enhaut, notamment pour une partie de la gestion des forêts, qui se fait dans le respect de la biodiversité. Il en est de même pour l’élimination des plantes néophytes. Nous surveillons aussi grâce au monitoring certaines espèces d’animaux, afin de maintenir, d’améliorer voire d’augmenter leur habitat.

– L’intérêt pour la montagne suscité par la pandémie a-t-il eu un impact sur les prix de l’immobilier?
– Les prix n’ont pas flambé. Ils sont restés plutôt stables, mais il y a très peu de biens en vente. En matière de projets, il y a celui de la clinique ABRA, pour Active Burnout Recovery Academy, dédiée à la prévention et au suivi des personnes victimes d’un burn-out. Ce projet est mené par l’ancien champion de natation Dano Halsall et Chris Christiansson*, installé à Rougemont, et qui fut également un sportif d’élite. L’ouverture de la clinique est prévue au printemps prochain. Il s’agira d’un établissement d’une vingtaine de chambres. La commune contribue, en mettant à disposition un terrain. Par ailleurs, la commune a aussi le projet de construire un immeuble aux loyers raisonnables. Avec la Lex Weber, tout ce qui se construit aujourd’hui a pour vocation d’être habité à l’année.

– Quel regard portez-vous sur cette loi?
– La commune était déjà dans cette réflexion visant à limiter le nombre de lits lorsque la loi a été acceptée. Cependant, nous aurions préféré une solution qui permette de tenir compte du développement de nos localités. Un quota par commune aurait été une meilleure option.

– Avez-vous des projets pour développer l’offre culturelle?
– Avec le Festival Menuhin de Gstaad, dont certains concerts se déroulent dans l’église de Rougemont, nous avons constaté l’intérêt de la clientèle pour la musique classique, le chant et l’art. Nous réfléchissons actuellement à une possibilité de développer notre offre culturelle et artistique.

 

Propos recueillis par Virginia Aubert

 

*Voir Le Journal de l’Immobilier No 40, du 13 juillet 2022: «Le burn-out se traite à Rougemont», de Robert Habel.

La Fête des maires, c’est toute l’année!

 

Petite commune aux confins du canton, Rougemont/VD cultive un charme authentique avec ses chalets, dont certains ont plus de 400 ans, son église romane du XXIe siècle et son château du XVIe siècle. La commune, qui a décliné cette année un projet de fusion avec les communes voisines de Château- d’œx et de Rossinière, mise sur le tourisme doux et propose une offre hôtelière variée, afin de préserver la mixité sociale et d’âge dans la commune, un élément essentiel pour le Syndic Frédéric Blum.