Gilbert Vonlanthen.

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Gilbert Vonlanthen, maire de Bernex

«De village à ville, il faut prendre le temps»

12 Jan 2022 | Articles de Une

– En l’espace d’une quarantaine d’années, le village de Bernex est devenu une ville. Comment gère-t-on une telle évolution?
– En prenant le temps! Quand mes parents sont arrivés de Zoug, j’avais 3 ans. C’était en 1964 et Bernex comptait moins de 2000 habitants, contre plus de 10 300 aujourd’hui. Le développement de Bernex a vraiment débuté dans les années 70 et 80. avec la création de nouveaux quartiers, et l’intégration des nouveaux habitants s’est faite de manière harmonieuse, mais il a fallu pour cela un peu de patience et laisser passer les années. Je me suis intégré facilement grâce à l’école, j’étais un enfant comme tous les autres, mais, pour mes parents, il a fallu vingt ans pour qu’ils soient considérés comme de vrais Bernésiens.
Aujourd’hui, les autorités bernésiennes ne sont pas opposées au développement. Le Plan directeur cantonal ne pose aucun problème sur le fond, mais sur le tempo. Celui du canton de Genève est beaucoup trop rapide pour la commune. L’intégration liée à l’arrivée importante de nouveaux habitants a été une réussite par le passé, parce que les maires précédents ont pu temporiser.

– De nouveaux projets immobiliers vont démarrer. Quelle en est l’ampleur?
– Il s’agit de projets très importants. Le quartier Saint-Mathieu prévoit 380 logements, soit environ 800 habitants de plus, et celui de Vailly-Sud 600 logements, ce qui représente 1300 habitants. Au total, Bernex aura gagné plus de 2000 habitants en une décennie, ce qui est jouable pour une commune comme la nôtre. Par contre, nous sommes opposés au développement au nord de Bernex, car celui-ci doit s’accompagner d’abord d’infrastructures adaptées.

– Justement, le tram représente-t-il maintenant un atout important pour Bernex?
– Il facilite indiscutablement le quotidien. Mais il n’en va pas de même pour les liaisons routières existantes, dont la route de Chancy qui est complétement saturée. A ce propos, la construction d’une nouvelle route (boulevard des Abarois) est indispensable pour desservir les nouveaux quartiers, en particulier notre nouvelle zone industrielle et artisanale des Rouettes, qui devrait amener environ 1000 emplois. Pour chaque logement supplémentaire, la commune a négocié avec le canton l’équivalent en emplois, afin d’augmenter les revenus communaux et d’éviter de devenir une cité dortoir. D’autres infrastructures importantes vont voir le jour, comme une nouvelle crèche et une maison de la santé. Mais ce changement est difficile pour des habitants âgés qui ont toujours vécu dans un village et qui se retrouvent, à plus de 80 ans, dans une ville en devenir.

– Comment Bernex fait-elle face financièrement à ce développement?
– Bernex fait partie des communes présentant centime additionnel parmi les plus élevés du canton; il est donc hors de question d’augmenter les impôts afin de financer le développement. Une des solutions pour Bernex, mais aussi pour d’autres communes, passe par une plus grande collaboration entre elles. La mise en place de la péréquation financière intercommunale a été difficile au début, mais maintenant le principe de solidarité entre les communes est globalement bien accepté. Il doit néanmoins être renforcé. Si l’on prend l’exemple de Bernex, l’effort très important concédé par la commune pour la création de logement bénéficie à l’ensemble de la République.

Un village qui s’est beaucoup agrandi, mais qui garde une belle part de campagne.

– Les nouveaux quartiers vont attirer une population différente de celle d’aujourd’hui. Comment bien l’accueillir?
– Effectivement, en Suisse et particulièrement à Genève, nous avons fait le choix de la mixité sociale dans le cadre des projets immobiliers, ce qui est positif. Le quartier Saint-Mathieu comprendra des logements en PPE, des appartements en location à loyer libre, et d’autres en logement d’utilité publique (LUP). Les nouveaux habitants sont attendus dès le mois de septembre 2023.

– L’architecture joue aussi un rôle important dans la réussite ou l’échec d’un nouveau quartier. Quel a été le rôle de la commune sur ce plan?
– La commune n’est pas propriétaire des terrains, mais nous avons évidemment pu donner notre avis, puisque les projets doivent nous être soumis. Nous avons eu plusieurs rencontres fructueuses avec les promoteurs. Actuellement, la densité dans le village de Bernex est de l’ordre de 0,8% et elle passera à 1,2%, voire 1,4% dans les nouveaux quartiers. Les hauteurs des futurs immeubles seront cependant supérieures à ceux existants, ce que je regrette. En effet, certains bâtiments comprendront de 6 à 7 étages avec attique.
En contrepartie, la commune a obtenu des promoteurs la mise à disposition, sous la forme de servitudes, de suffisamment de terrain pour construire des équipements publics, (crèche, école, restaurant scolaire, maison de quartier…), ainsi que des espaces publics pour des fêtes de quartier, par exemple.

 

Propos recueillis
par Léa Tremblay

La Fête des maires, c’est toute l’année!

 

A 60 ans, Gilbert Vonlanthen entame son quatrième – «et dernier», dit-il – mandat de conseiller administratif de Bernex, «sa commune de cœur». Il débute sa carrière politique à 31 ans au Parti radical bernésien: «Un jour, un ami de mes parents m’a dit: «Tu devrais faire de la politique, alors je me suis lancé». Il devient trésorier de la section communale, puis conseiller municipal en 1995 pendant douze ans, avant de rejoindre l’Exécutif en 2007. Depuis octobre dernier, Gilbert Vonlanthen est également président de l’Association des communes genevoises (ACG). Avec plusieurs grands projets immobiliers, Bernex connaît un développement spectaculaire dont la réussite à venir résidera dans sa capacité d’intégration. Le maire et les autorités communales veulent faire les choses de manière méthodique et harmonieuse.