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ARCHITECTURE - Nuances de vert

De quelle couleur est Fribourg?

1 Fév 2023 | Articles de Une

La couleur d’une ville fait parfois référence à l’appartenance politique de telle ou telle Municipalité. Rien de cela avec la publication bilingue français-allemand «La culture de la couleur à Fribourg. La couleur de l’architecture au fil du temps». La Direction de l’édilité de la Ville de Fribourg a mandaté l’Institut zurichois Haus der Farbe pour déterminer les couleurs majeures du bâti de la capitale cantonale fribourgeoise.

Les couleurs changeantes de Fribourg.

Cette étude fait l’objet d’une publication bilingue, une première en Suisse, parue fin 2022, qui se veut à la fois un guide pour les services appelés à intervenir notamment sur les traitements de façades et pour les propriétaires, ainsi qu’un dossier patrimonial qui recense pour chaque époque constructive les coloris de la ville.
Si l’on parle d’Alger la Blanche ou de la Ville rose en évoquant Toulouse, l’on pourra bientôt donner aussi une note de couleur à la ville de Fribourg, fondée en 1152. Et si les Fribourgeois aiment leur ville, c’est également en raison des diverses couleurs de son domaine bâti, de ses façades, de ses murs, de ses toits, quartier par quartier. Le livre-dossier «La culture de la couleur à Fribourg», sous-titré «La couleur de l’architecture au fil du temps», permet de suivre les traces de son évolution dans le temps, qui sont parfois bien plus proches de nous que nous ne l’imaginons. Elles sont là, à portée de main, il suffit de savoir regarder. Et c’est à un regard que nous invite cette intéressante publication qui analyse Fribourg au fil des époques et nous raconte son histoire à travers la couleur. Cet outil sera également précieux pour le présent et l’avenir, car il permettra de concrétiser le futur Plan d’aménagement local révisé, la base légale en matière de planification du territoire à l’échelle de la ville.

Les couleurs d’une ville, du Moyen Age au XXIe siècle

Quelles sont les couleurs majeures de la Fribourg médiévale, de la Fribourg du début du XXe siècle, de la Fribourg des années 1950 ou de la Fribourg postmoderne? Quelles sont les teintes dominantes des quartiers de Beaumont, du Schoenberg ou du Jura? En publiant «La culture de la couleur à Fribourg», réalisé en collaboration avec l’institut Haus der Farbe à Zurich, l’Inspectorat des constructions de la Ville de Fribourg peut désormais disposer des palettes chromatiques qui caractérisent les différents quartiers de la ville à travers les âges.
Comme le relève la Conseillère communale Andrea Burgener Woeffray, «si la culture de la couleur à Fribourg constitue un outil de travail au service de la population et une base de conseil pour les services communaux, cette publication se veut avant tout une découverte de notre patrimoine local et une source d’inspiration dans notre relation à la substance bâtie existante».

L’analyse chromatique permettra à chaque propriétaire, à chaque architecte et chaque peintre de se situer dans l’histoire de la Cité.

Un nouvel outil adapté aux enjeux architecturaux

Fribourg est unique par sa topographie, son intégration dans le paysage et son tissu urbain. Sa spécificité est perceptible dans sa culture du bâti, intimement liée au lieu, au fil de sa longue histoire et particulièrement pendant les dernières décennies. Alors que la ville ne cesse de se renouveler, la préservation de l’identité du lieu est un enjeu fondamental du point de vue patrimonial, qui dépend principalement de l’impact des nouvelles interventions urbanistiques et architecturales. Selon les auteurs de l’étude, il importe de soigner l’intégration plutôt que la rupture. Le vaste choix des matériaux, des textures et des traitements de finition vient enrichir et compléter la diversité chromatique de la ville de Fribourg. Le recueil des teintes compilées dans la publication met en évidence les tendances perceptibles en matière de couleur et matériau dans les constructions de Fribourg.
L’analyse chromatique permettra ainsi à chaque propriétaire, à chaque architecte et chaque peintre de se situer dans l’histoire de la Cité. L’examen approfondi des façades des bâtiments qui constituent Fribourg a pour but d’objectiver les principaux traits de couleurs qui «habillent» la ville. La publication se veut une base de dialogue à l’intention des propriétaires de biens immobiliers impliqués dans des travaux de construction ou de rénovation et elle s’adresse aussi bien aux personnes qui traitent la thématique de la couleur dans le milieu de la construction qu’aux non-professionnels désireux de mieux connaître Fribourg à travers la culture de la couleur dans le bâti.

Pas seulement le vert

On dit que chaque ville possède sa propre identité chromatique. Mais Fribourg n’est pas simplement verte, pas davantage que d’autres villes suisses ne sont jaunes, beiges ou grises; le caractère chromatique d’une ville tient plutôt du dialecte. Il présente des aspects frappants, mais aussi de subtiles nuances et particularités, modifiant la langue de couleur principale. Le but de la publication est d’explorer et d’illustrer le coloris caractéristique de Fribourg.
Jusque vers 1880, les matériaux de construction locaux – notamment la molasse – ont donné le ton et formé la toile de fond sur laquelle s’est développée la culture chromatique des époques postérieures. Au fil du temps, les verts tendres et terreux de la molasse fribourgeoise ont inspiré des nuances variées, allant des verts clairs poudreux aux tons pastels frais et fleuris. Le vert de la molasse semble avoir toujours servi de référence.
Les modes, les nouvelles technologies de façade et la possibilité d’obtenir des surfaces aux couleurs toujours plus intenses ont constamment enrichi la physionomie de la ville. Mais le large éventail de teintes disponibles peut aussi être source de décisions malheureuses, surtout en rénovation. Aujourd’hui, par exemple, il est certes techniquement possible d’utiliser comme couleur de façade le jaune soutenu que l’on appliquait comme couleur d’accent sur le métal dans les années 1980, mais ce serait inapproprié d’un point de vue historique.
La méthode utilisée par l’Institut Haus der Farbe repose sur une étude minutieuse de l’état actuel de la ville et sur une connaissance approfondie de l’histoire esthétique et technique de la mise en couleur. Pour composer les palettes, les teintes typiques des différentes époques sont référencées sur place, puis reproduites manuellement en atelier – qu’il s’agisse des couleurs principales ou des accents de couleur. Afin de bien faire ressortir les tons vraiment caractéristiques, il est impératif d’opérer une sélection rigoureuse parmi la masse des données observées. Les planches qui accompagnent la publication reflètent en conséquence le caractère chromatique actuel de la ville et servent d’outil pour introduire de nouveaux arrangements dans le coloris caractéristique du lieu. Les palettes proposées ne sont pas conçues comme des sélections parmi lesquelles choisir telle ou telle teinte, mais comme base de travail et de discussion.
Nul doute que cette publication bienvenue et scientifiquement irréprochable sera fort utile pour colorer subtilement et dans l’intégration du bâti la belle ville de Fribourg.

 

Laurent Passer

«La culture de la couleur à Fribourg. La couleur de l’architecture au fil du temps», édité par la Ville de Fribourg, Service d’urbanisme et d’architecture. En vente auprès des services concernés et en librairie.