JAGUAR TYPE 00
Coup de poker
Comment passer d’une marque quasi moribonde dont plus personne ne parlait à LA marque dont tout le monde parle, même au-delà du monde automobile? Grâce à une vidéo, un post sur Instagram et un logo revu, le tout faisant table rase du passé. Si la manière de communiquer est discutable, un «bad buzz» volontaire peut facilement être à double tranchant, la stratégie produit sous-jacente peut fonctionner.
Donc derrière la campagne de communication aux relents wokistes se cache le concept Jaguar Type 00 (prononcez «zéro zéro») en référence au zéro émission de sa propulsion et le statut de point 0 du concept-car dans la gamme réinventée du constructeur. Si le nouveau manifeste de la marque réactualise le «copy nothing» attribué en son temps à Sir William Lyons, fondateur de la marque, le moins que l’on puisse dire est que le concept Type 00 n’est pas sans rappeler… le passé.
Impossible de ne pas y déceler ici quelques traits – modernisés, certes – des E et F-Type, dont le long capot, le toit fuyant, l’habitacle reculé et les ailes arrière fortement galbées. Certains y voient aussi un profil de Rolls-Royce. Copy nothing, donc. Crime de lèse-Lyons, l’emblème du félin en façade est renvoyé aux oubliettes… ou plutôt en tout petit sur les flancs pour laisser place à un banal lettrage Jaguar, comme Skoda. Copy nothing, certes. Quant à l’arrière, la lunette disparaît purement simplement… façon Polestar 4. Copy nothing, vraiment?
A l’intérieur, le minimalisme de l’agencement fait écho à la sobriété du dessin extérieur. Point de cuir ou de boiserie, ce sera textile, roche et laiton, alors que les écrans de l’instrumentation s’escamotent à l’arrêt. Les dessous de la Type 00 sont constitués d’une plate-forme électrique inédite développant autour de 1000 ch pour une autonomie de 770 km (WLTP) et capable de recharger 321 km en 15 minutes.
Donc il faudra s’y faire; en empruntant certains codes de la mode ou de l’horlogerie, Jaguar quitte le premium pour devenir une véritable marque de luxe et de niche s’adressant aux happy few capables de se délester d’au moins 100 000 livres sterling (112 000 francs) pour un carrosse. Reste à savoir si cette réorientation lui réussira.
Marc Devion