Une quarantaine de marques chinoises, émois, émois, émois…

En 1966, Jacques Dutronc s’émouvait face à 700 millions de Chinois. On y a pensé, puis oublié. Or 60 ans plus tard, c’est face à la prochaine déferlante de marques automobiles chinoises en Europe qu’il convient de s’inquiéter. Pourquoi? D’abord parce que l’Union Européenne, en promulguant la fin du moteur thermique pour 2035, a ouvert une autoroute de la soie à huit voies à la Chine, qui maîtrise mieux que quiconque toute la chaîne de valeur de la voiture électrique, y compris l’approvisionnement des matières premières indigènes comme africaines. Du côté des constructeurs européens, on réfléchit encore ou, pour les plus avancés, on adapte péniblement son outil industriel ou on cherche des solutions alternatives pour s’approvisionner ailleurs en technologies ou matériaux, tout en essayant de maintenir ses marges.
Ensuite, il y a une distorsion de concurrence en matière douanière: les importations chinoises en Europe ne sont imposées qu’à hauteur de 10%, alors que les biens européens importés en Chine le sont à 25%. Pas besoin d’être un Prix Nobel en économie pour comprendre le problème. Alors oui, l’Europe peut se glousser d’avoir conclu ces dernières années des contrats de plusieurs milliards d’euros pour des TGV ou des Airbus avec l’Empire du Milieu… sauf que de son côté, la Chine vient de livrer ses premiers Comac C919, clone du bestseller A320 de… Airbus. C’est à y perdre son mandarin.
Mais revenons sur terre: certes, à ce jour les marques chinoises présentes en Europe ne sont pas légion. On en compte environ une demi-douzaine, mais toutes dépendent de grands groupes chinois à la force de frappe importante. D’ailleurs, leur implantation est réelle et le développement de leurs réseaux de vente avance au pas de charge. Peu à peu, c’est la place des véhicules d’accès de gamme que prendront les voitures chinoises. Laissé vacant par les constructeurs traditionnels européens en raison des coûts importants imposés par l’électrification et la dépollution de ces modèles par les règles de l’UE, ce segment draine malgré tout une clientèle importante. Ajoutez à cela l’inflation galopante du prix des voitures neuves comme d’occasions et vous obtenez un blanc-seing en faveur de l’industrie chinoise! L’industrie européenne deviendra tout simplement le pigeon du commerce mondial. Et tout ça pour une décision dont l’origine est purement idéologique…

Jérôme Marchon