Dans une récente interview à quatre grands quotidiens européens, Carlos Tavares, le CEO du groupe Stellantis, mettait en garde contre l’impact social qu’aurait très probablement l’électrification de l’automobile. Il s’agit de savoir si la classe moyenne pourra accéder d’une manière ou d’une autre à la mobilité individuelle électrifiée dans un futur proche avec les prochaines interdictions de vente des véhicules thermiques. C’est une conséquence de la volonté politique de foncer tête dans le guidon dans l’électromobilité.
Comment est-ce possible? Quand bien même la multiplication des modèles électriques sur le marché est synonyme de massification d’une technologie, donc théoriquement une baisse du prix de revient, les surcoûts engendrés par cette transition énergétique contrainte demeurent élevés pour les constructeurs. En moyenne, dans l’industrie, un véhicule électrifié ajoute 50% de coûts à un véhicule conventionnel. Facture qu’il est impossible, pour l’heure, de répercuter entièrement au consommateur final, déjà fortement sollicité.
Pour illustrer le propos, reposons-nous sur la statistique que tiennent chaque année nos confrères français de «L’Argus». A euros constants, donc corrigés de l’inflation, le prix moyen d’une voiture familiale est passé de 11 312 euros en 1970 à 26 789 euros en 2020. La hausse s’explique bien sûr aussi par l’adjonction de technologies de confort, par les réglementations diverses en termes de sécurité, dépollution, ou encore par l’augmentation de la taille des véhicules. Ramené au salaire minimum français, le SMIC, il fallait 17,1 mois pour acquérir une voiture en 1970. Cette équivalence a graduellement diminué jusqu’en 2010, pour atteindre un peu plus de 14 mois. Dès 2010, le ratio a repris l’ascenseur pour arriver, à fin 2020, à 17,6 mois. Entre 2010 et 2020, le prix moyen d’une voiture s’est accru de 7000 euros, soit presque autant qu’entre 1970 et 2010! La chasse au CO2 coûte cher, très cher, et la tendance n’est pas près de s’inverser.
En parallèle, les constructeurs de luxe et les «premium» comme Mercedes-Benz ou Audi, soit explosent littéralement leur chiffre d’affaires et de vente, pour les premiers, ou augmentent significativement leur marge pour les seconds, avec un chiffre d’affaires quasi équivalent pour des ventes en chute de 30%. Le prix moyen d’une Mercedes, par exemple, est passé de 38 000 euros en 2020 à 54 000 euros en 2021.
Les partis politiques qui prônent la transition énergétique à tout-va – but éminemment louable s’il en est – sont les mêmes qui, dans leur discours, souhaitent défendre la classe moyenne, les familles et leur pouvoir d’achat. Sans un minimum de réflexion sur les enjeux globaux de la transition énergétique de la mobilité et le poids colossal de leurs décisions politiques prises à l’emporte-pièce, nos chantres du «mieux respirer et mieux vivre pour les générations futures» buteront irrémédiablement et plus vite qu’ils le pensent sur un clivage encore plus profond entre classe moyenne et nantis. Aucun n’en a fait pour l’heure une priorité…
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