événement - Cent trente deuxième édition
La Revue genevoise nous embarque
«Une invitation à rire de nous-mêmes, tout en réfléchissant aux enjeux de notre temps»: voilà comment Frédéric Hohl, incontournable organisateur d’événements et patron emblématique de la Revue genevoise, présente cette édition. Et force nous est de constater que ce 132e numéro atteint la quasi-perfection. Un (nouveau) saut qualitatif salué lors de la première par un public genevois debout – ce qui est rare chez Calvin où lorsqu’on dit «c’était pas trop mal», cela se comprend comme un accès d’enthousiasme.
Claude-Inga Barbey, ancienne victime de la haine wokiste – elle avait dû renoncer à son blog du «Temps» – et Laurent Deshusses, co-auteurs des textes, ont vraiment franchi un nouveau cap avec leur paquebot. Les gags font mouche, la musique est parfaite, la mise en scène de Pierric Tenthorey originale et limpide. Les thèmes, moins politiques que de coutume, collent à l’actualité. La conseillère administrative de la Ville Frédérique Perler, l’ex-conseillère d’Etat Fabienne Fischer en prennent pour leur grade, le népotisme décomplexé des deux Vertes ayant défrayé la chronique ces derniers mois. Leur collègue Antonio Hodgers a droit à un sketch sur le PAV avec des personnages aussi délirants que leurs extraordinaires costumes. La caisse maladie Sinistras, les différences entre gens normaux (entendez: d’âge mûr) et jeunes instagrameurs obsédés par la dénonciation du sexisme, le sort des retraités suisses et le mollah Molard, toutes ces scènes et ces personnages défilent dans un joyeux pêle-mêle.
Chorégraphie et voix: le nirvana
Le barman Christian Savary, flanqué de sa mouette géante, la femme de ménage (en congé) Claude-Inga Barbey et le génial polymorphe Laurent Deshusses (incarnant tour à tour Depardieu, Hodgers et un officier SS transfuge du film de Mel Brooks «Les Producteurs», entre autres) développent un talent indéniable. Il convient de saluer la chorégraphe Molly Hirt: on atteint l’excellence dans la variété des ambiances et des rythmes, avec même une incursion poétique du côté de Jérôme Bosch et de sa Danse macabre. On admirera plusieurs nouveaux venus, quelques figures familières (Jean-Phillipe Meyer ne pouvait abandonner son ami Vladimir P.) et des voix fabuleuses, à commencer par celle de Virginia Sirolli, comédienne et meneuse de revue.
Quelques grognons parleront de tel ou tel gros mot ou de «relents de machisme»: ne les écoutez pas et profitez de cet espace de liberté qui résiste miraculeusement à tous les nouveaux dogmes bien-pensants. Si les nouvelles dames patronnesses et autres pasteurs ratés baignant dans la moraline woke détestent la Revue, c’est pour de bonnes raisons. Celles qui font que chaque année, des milliers de spectateurs et de spectatrices l’apprécient!
Vincent Naville
Au Casino-Théâtre de Genève,
42, rue de Carouge,
jusqu’au 31 décembre 2024.
Représentations tous les jours
(sauf le lundi)
à 19 h 30., dimanche à 16 h.
Renseignements et réservations :
www.larevue.ch