Un bâtiment pour briser les «silos» du monde de la santé

Le Genolier Innovation Hub tient son écrin de luxe. Le centre de recherche et développement de nouvelles solutions médicales a sorti de terre un édifice de 25 000 m² sur le campus hébergeant déjà les cliniques de Genolier et Nescens. Après avoir posé la première pierre en novembre 2021, le hub – porté par le groupe Swiss Medical Network et son investissement de 100 millions de francs (dont 65 pour la construction) – a coupé le ruban. Ses quartiers ont été inaugurés le 27 septembre dernier lors d’une soirée officielle à laquelle a notamment participé le Conseiller fédéral Guy Parmelin. L’événement s’est prolongé par un week-end Portes ouvertes destiné au grand public.
La nouvelle infrastructure s’étend sur trois niveaux (11 000 m² de surface utile); elle est notamment composée d’un espace modulaire de 7000 m², aménageable en bureaux, laboratoires et espaces de formations. Plus de 1000 m² seront également dédiés à l’accueil de conférences, séminaires et autres événements médicaux. «Nous avons un plan qui prévoit que l’on soit en vitesse de croisière en 2027, a expliqué Antoine Hubert, président et initiateur du hub. Et d’ajouter: Nous allons commencer par remplir les événements, l’objectif est d’en faire entre 60 et 80 par année».
Pensé comme un «hôtel à entreprises», selon sa directrice Anna Gräbner, la plate-forme fera également sa spécialité de l’hébergement temporaire de sociétés actives dans le domaine de la santé, en privilégiant celles qui sont avancées dans leur développement. En accueillant industries et chercheurs, la directrice a précisé que la valeur ajoutée du hub serait «l’application clinique, ainsi que la proximité directe avec les médecins et les patients».

Structure collaborative

«Dans le monde de la santé, le problème principal est que tous les acteurs vivent et travaillent dans des silos, que cela soit les constructeurs, les prestataires, les hôpitaux ou les assurances», a poursuivi Antoine Hubert. Bâti pour répondre à ce défi structurel, le centre accueille déjà plusieurs pointures internationales dans ses locaux, notamment les Américains Accuray et GE Healthcare. Les deux sociétés, respectivement actives dans la radiothérapie et l’imagerie moléculaire, ont conclu un partenariat de la première heure avec le nouveau centre de Genolier, avant même sa construction. Aujourd’hui, Accuray y a déjà installé deux «bunkers» de radiothérapie pour accueillir ses machines, dont une traite des patients atteints du cancer. Les deux sociétés implantent aussi chacune leur centre de formation au sein du hub et pourront profiter des salles de cours du complexe.
Contrairement à ces deux locataires de long terme, les autres partenariats devraient en général se limiter à une durée de six mois à cinq ans. «Des start-ups plus petites pourront également être accueillies», a souligné Anna Gräbner. Il a par ailleurs été relevé que les aménagements sur mesure qui sont proposés aux entreprises ne permettaient pas de donner un nombre de locataires maximal, ni de fourchette de prix quant aux loyers qui seront demandés.

Antoine Hubert, président et initiateur du Genolier Innovation Hub; Guy Parmelin, conseiller fédéral et Anna Gräbner, directrice du Hub.

La tâche de traduire le paradigme collaboratif du centre dans le bâti est revenue à l’architecte Gabriele Rossi, du cabinet Archilab SA.

Infrastructure polyvalente

La tâche de traduire le paradigme collaboratif du centre dans le bâti est revenue à l’architecte Gabriele Rossi, du cabinet Archilab SA. «Il s’agissait de créer cette osmose, cette communication entre les différents bâtiments», a-t-il expliqué. Cette philosophie s’est incarnée par «un jeu de transparence et de liaison permettant – grâce à un bâtiment à l’image forte – de créer un lien entre R & D (recherche et développement) et pratique».
En plus de la nécessité d’une infrastructure communicante, le Genolier Innovation Hub a misé sur une construction polyvalente. «La grosse difficulté était de créer une infrastructure de base qui puisse accueillir toutes les fonctions qui vont évoluer avec le temps, a indiqué le maestro italien. Nous ne connaissons pas aujourd’hui les machines qui pourront être accueillies ici demain». Cerise sur le gâteau: le bâtiment a fait de sa toiture un jardin des cinq sens de 6000 m² qui fait référence à ceux de la Renaissance. La surface revêt une fonction écologique, en plus d’offrir une vue imprenable sur le Léman et les Alpes.
Comment ce grand projet immobilier s’harmonise-t-il avec les structures déjà en place? Le syndic de Genolier André Darmon a déclaré que certaines craintes avaient été émises avant la construction par les habitants de la petite commune vaudoise, quant à la potentielle «défiguration» du paysage. Il n’en a rien été, selon lui, notamment grâce à l’attention particulière accordée à l’intégration du bâtiment. «Ce n’est pas quelque chose qui sort en hauteur, mais qui est intégré dans cet écrin de nature», a affirmé le syndic.

Intérieur chaleureux

L’entrée du bâtiment génère une ambiance qui n’a rien de médical et évoque plutôt un lobby hôtelier chaleureux, ce qui reflète d’ailleurs le fonctionnement du centre. Les visiteurs sont accueillis dans une grande bibliothèque; celle-ci contient plus de 8000 livres installés avec soin sur des étagères de chêne, éclairées par des leds.
Antoine Hubert a précisé que l’idée était «d’amener quelque chose de disruptif au niveau du style», le blanc usuel du milieu hospitalier ne faisant «qu’ajouter au stress». Voilà la mission de Kristian Gavoille, architecte d’intérieur du projet. Autre pièce maîtresse de l’intérieur du hub: un auditorium futuriste d’une capacité de 300 places.

Jean Friedrich