Un millésime 2023 aussi caniculaire que frais pour Genève

Après le coup de chaud, le soulagement, et la dégustation d’un millésime tout en fraîcheur. Tel était le constat lundi passé au restaurant de la Société Nautique de Genève, où 39 producteurs de vins du canton présentaient aux médias et experts de la branche les produits de l’année passée.
La saison de croissance avait bien débuté, alors qu’aucun gel n’avait été déploré durant le printemps sur les parcelles genevoises. L’été cependant, les vignes ont été mises à rude épreuve par les températures caniculaires, mais sans jamais céder à la sécheresse. Grâce au savoir-faire des vignerons de la région, de leur résilience et des quelques pluies salvatrices de septembre, les étiquettes genevoises estampillées 2023 devraient retenir l’attention de plus d’un amateur de vin.
Elles ont en tout cas su conquérir l’œnologue cantonal Dorian Pajic, lui aussi présent lors de la dégustation, et sous le charme d’un millésime qui en dépit d’une météo pas toujours favorable «ne manque jamais de fraîcheur». A cela s’ajoute, selon l’expert, un équilibre qui révèle l’ossature particulière de cette production 2023 et apporte au millésime «une buvabilité et une sapidité plaisante pour les dégustateurs». Ceux-ci pourront découvrir toutes les nouveautés du terroir viticole genevois le samedi 25 mai, lorsque quelque 80 caves du canton ouvriront leurs portes au public.

Moins de volume… plus de plaisir

Le stress hydrique qui a découlé de la canicule a engendré des pertes de volume notables chez certains vignerons genevois. Au total, le canton de Genève fait état d’une production 2023 de 10% inférieure à la moyenne décennale. Certaines exploitations ont toutefois souffert plus que d’autres. Du côté d’Anières, Clément Desbiolles, du domaine des Ménades, a indiqué avoir déploré entre 10 et 15% de volume en moins avec «un côté sud du domaine qui s’est retrouvé grillé». Pour Adeline Wegmüller, vigneronne au domaine de La Gara à Jussy, les pertes se situent entre 30 et 40%.
«Je me suis demandé si je ramassais des raisins ou des myrtilles», s’est amusé Alain Graber du domaine Les Gondettes à Satigny. Mais la diminution des grains n’a pas eu d’incidence sur la qualité de la production, bien au contraire. «On profite de la concentration des arômes avec des vins qui sont un peu plus intenses, ça donne des rouges un peu plus structurés et opulents», a expliqué Fabien Desbaillet du domaine des Molards à Russin. Un constat corroboré par l’œnologue cantonal, qui a analysé «un bon épanouissement des cépages rouges sous le soleil». Pour ce qui est des blancs, l’expert a également évoqué un bon équilibre entre fraîcheur et générosité.

Le Genevois boit de plus
en plus chauvin

Et si le vin genevois devenait enfin prophète en son pays? Au fil des millésimes, les vignerons du bout du lac convainquent les réticents et font disparaître la mauvaise réputation parfois prêtée aux bouteilles du canton par les Genevois eux-mêmes. Voilà ce que montre une étude menée par l’Office de promotion des produits agricoles de Genève (OPAGE) et l’Institut MIS Trend sur les habitudes de consommation des Genevois du fil des années.
En effet, le taux global des consommateurs de vins de Genève apparaît en hausse depuis une vingtaine d’années, et a gagné presque 10% entre 2018 et 2022, pour attendre 79%. En plus d’être davantage consommé, le vin genevois est également plus que jamais jugé digne d’être offert ou ouvert lors d’un bon repas, comme en attestent 94% des sondés en 2022, contre quelque 80% vingt ans plus tôt.

Jean Friedrich