Mystérieuse et magique…

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LA fête des maires - Joachim Rausis, Président de la commune d’Orsières/VS

«Il faut savoir s’adapter»

16 Août 2023 | Articles de Une

Contrainte par l’entrée en vigueur de la Lex Weber en 2012 de réorienter son économie, la commune valaisanne d’Orsières fait preuve aujourd’hui d’une grande créativité et d’un fort dynamisme. «Notre commune se porte bien, reconnaît son président Joachim Rausis, mais nous avons encore des défis à relever, tels que garantir des emplois et nous diversifier en attirant des entreprises du tertiaire et de services». Idéalement située sur le Tour du Mont-Blanc et l’itinéraire de la Via Francigena vers Compostelle, qui connaît un succès grandissant, Orsières entend également renforcer sa position de destination de tourisme des quatre saisons.

– Comment la commune a-t-elle évolué ces dernières années?
– Avec un territoire de 165,02 km2, Orsières est l’une des plus grandes communes de Suisse. A titre de comparaison, elle est plus grande que le Liechtenstein. Nous sommes une commune qui n’a jamais fusionné tout au long de son histoire et dont la population connaît chaque année une légère hausse, de l’ordre d’une dizaine d’habitants. Aujourd’hui, la population est de 3200 résidents, dont 1600 habitent dans le village même d’Orsières. Les autres habitants se répartissent entre les vingt-cinq villages et hameaux de la commune. Nous avons aussi 50% de résidences secondaires et, pendant l’été, la population totale passe à quelque 10 000 personnes.
Cette progression du nombre d’habitants nous a obligés à adapter nos infrastructures. En 2020, nous avons inauguré une Unité d’accueil pour écoliers (UAPE)-crèche-nurserie pour accueillir les enfants de quatre communes de l’Entremont, soit Bourg-Saint-Pierre, Liddes, Sembrancher et Orsières.
Il y a 15 ans, nous avions réalisé un sondage auprès des habitants: personne ne voulait de crèche et aujourd’hui, nous avons environ 200 enfants inscrits. Si nous voulons garder notre population, il est indispensable de fournir aux couples des structures de garde. Désormais les deux parents travaillent, même si ce n’est pas toujours à plein-temps, et souvent les grands-parents aussi. A 50 ou 55 ans, les grand-mères sont encore actives professionnellement. Maintenant, nous couvrons l’ensemble des besoins, de la petite enfance jusqu’au cycle d’orientation, et c’est vraiment un atout.

– Quelles sont les motivations des nouveaux habitants?
– Il y a, bien sûr, le cadre de vie, mais également l’emploi qui est indispensable. Notre commune est tournée vers la construction, mais malgré le frein subi par le secteur en raison de la Loi Weber, nous avons du travail avec les rénovations de chalets. Par ailleurs, nous offrons aussi des emplois dans l’énergie, notamment avec les usines électriques, dans le tourisme et également dans l’agriculture, particularité de notre commune. Nous avons beaucoup de jeunes agriculteurs, très bien formés et dynamiques. Fin 2019, nous avons inauguré leur nouvelle laiterie, située à l’entrée d’Orsières, sur l’axe routier du Grand-Saint-Bernard. Elle a été réalisée dans le cadre du Projet de développement régional (PDR) du Grand Entremont. Il s’agissait d’un investissement de 6,4 millions de francs, dont la moitié d’aides fédérales, cantonales et communales. Le reste était à la charge de la Société de la laiterie d’Orsières. Avec la Covid, les débuts de la laiterie ont été un peu difficiles, mais maintenant elle fonctionne bien. La part des ventes directes, surtout pour le fromage, a augmenté, ce qui se traduit par une hausse de la marge pour les agriculteurs sociétaires.

– Vous avez évoqué une part importante de résidences secondaires dans la commune. Quel a été l’impact de la Lex Weber sur Orsières?
– Ce fut un coup brutal, suivi d’une période d’incertitude. Suite à la votation, plus de 80 demandes d’autorisations de construire ont été déposées dans la commune durant l’année. Les gens avaient peur des conséquences, ils redoutaient aussi la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT), ce qui les incitait à déposer toute sorte de projets.
A Orsières, nous avons dû redéployer toute une économie, nous adapter. Nous avons, par exemple, la chance d’avoir un grand savoir-faire dans le bois, acquis grâce à la construction de chalets. Les artisans ont donc pu exporter leurs compétences jusque sur la Côte et l’Arc lémanique, dans l’ébénisterie fine et les charpentes.

– Comment se porte l’immobilier orserin?
– Avec la pandémie, les gens ont beaucoup acheté, car avec la fibre optique qui est installée pratiquement jusque sur les alpages, ils pouvaient facilement télétravailler. Les prix ont nettement augmenté et même les biens qui stagnaient sur le marché ont trouvé des acheteurs. Les chantiers de transformation sont aussi nombreux, puisque l’on peut agrandir un chalet dans une limite de 30% de surface supplémentaire.

– Quelle est la politique de la commune en matière de protection de l’environnement?
– Nous venons d’être labellisés Cité de l’énergie. Nous avons toujours œuvré à la protection de l’environnement, mais ce label nous permet de mieux situer notre action. Nous l’avons facilement obtenu; le fait d’avoir installé le chauffage à distance dans le bourg nous a permis de gagner beaucoup de points. Actuellement, une centaine de bâtiments sont raccordés au chauffage à distance et le raccordement est obligatoire pour les nouvelles constructions. La Bourgeoisie possède 4000 hectares de forêts. Elle vend chaque année à la Municipalité pour 400 000 francs de copeaux de bois pour le chauffage à distance. Ce système permet de garantir des emplois aux bûcherons. Nous travaillons aussi avec le canton du Valais afin de créer une réserve forestière.
Par ailleurs, la commune mise sur l’énergie hydroélectrique. Elle détient 16% du capital des Forces motrices d’Orsières (FMO) et compte augmenter ce pourcentage en 2027, lors du retour de concession. Notre démarche environnementale passe aussi par la préservation des paysages. Il y a deux ans, par exemple, quand nous avons électrifié les alpages du haut Val Ferret, nous avons choisi de le faire en enterrant les câbles pour ne pas planter de pylônes qui dénaturent le paysage.

– Qu’en est-il de l’énergie photovoltaïque?
– Nous avons un projet de parc solaire sur les hauts d’Orsières, à la limite du Val de Bagnes. La situation géographique permettrait d’évacuer l’électricité via Téléverbier. Le parc serait installé sur une surface de 150  000  m² de surface à 2300 mètres d’altitude et permettrait d’assurer la consommation de 4000 ménages environ. Nous en sommes au début et le projet doit encore convaincre.

– Avez-vous un projet qui vous tienne particulièrement à cœur?
– Oui, le vieux bourg d’Orsières abrite plusieurs bâtiments décrépits. Nous avons donc voté en 2020 un budget de six millions de francs pour redynamiser le centre et y faire intervenir des investisseurs privés.
Le village a un fort potentiel de développement. Il est situé sur le Tour du Mont-Blanc et il fait partie des étapes de la Via Francigena, itinéraire pédestre qui relie Cantorbéry à Rome en passant par la France et la Suisse. Le nombre de randonneurs sur la Via Francigena est toujours plus important. Actuellement, l’offre hôtelière est insuffisante. Il manque déjà des lits pour héberger les personnes qui font le Tour du Mont-Blanc.

– Orsières compte-t-elle orienter son développement touristique sur l’été?
– En fait, contrairement au reste du Valais, notre tourisme est déjà largement concentré sur l’été, ce qui est un avantage. Il est plus facile de faire du tourisme des quatre saisons lorsque votre point fort est l’été, car on peut déborder sur le printemps et l’automne. Nous avons aussi la chance d’avoir plusieurs itinéraires de trails et notamment le célèbre Ultra-Trail du Mont-Blanc considéré comme le championnat du monde de la discipline. Il attire un vaste public national et international. Une des courses part d’Orsières et passe par Champex-Lac avant de rallier Chamonix. C’est un atout indéniable pour notre tourisme et notre économie en général.

 

Propos recueillis
par Virginia Aubert

Joachim Rausis.

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