Une des plus grandes communes de Suisse.

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LA fête des maires - Virginie Gaspoz – Présidente de la commune d’Evolène/VS

«La future maison de santé me tient à cœur»

5 Juil 2023 | Articles de Une

Connue pour son attachement aux traditions, notamment l’utilisation du patois, et son architecture typique, la commune d’Evolène s’étend sur 20 983 hectares, faisant d’elle l’une des plus grandes communes de Suisse en superficie. Dynamique face aux défis à relever, la commune va construire un important complexe comprenant une maison de la santé et des infrastructures pour la petite enfance. Par ailleurs, pour assurer l’avenir de l’agriculture, Evolène étudie la possibilité d’un remaniement virtuel des parcelles sur lequel exploitants agricoles et propriétaires de terrain seront bientôt appelés à se prononcer, comme l’explique Virginie Gaspoz, Présidente de la commune.

– A quoi devez-vous votre engagement politique?
C’est un domaine qui m’a toujours intéressée. Je viens d’ailleurs d’une famille attachée à la vie locale et à l’actualité politique. J’ai fait des études en sciences politiques, mais je pensais plutôt travailler dans l’administration. C’est ce que j’ai fait en travaillant à Berne. Ensuite la section locale du Centre m’a proposé de la rejoindre et de me présenter aux élections en vue de briguer la présidence de la commune. C’était l’occasion pour moi de revenir habiter à Evolène, ce que je souhaitais, et d’y travailler, alors que je pensais que j’allais devoir trouver un travail dans la région de Sion.

– Quelles étaient vos attentes?
– Je n’avais pas vraiment d’attentes concrètes, si ce n’est de faire quelque chose pour la commune, de permettre la réalisation de projets. En fait, sans expérience dans un Exécutif, je me suis en partie laissé surprendre. Quand j’ai commencé, j’étais enceinte et j’étais donc encore un peu plus animée, comme je le suis toujours, par l’envie de transmettre à la génération suivante. Dans la commune, la politique est faite plutôt par des hommes qui ont déjà un parcours bien établi. J’arrivais en cassant les codes: j’étais jeune, sans expérience, j’étais une femme, et même enceinte. Je reconnais avoir eu un peu peur des réactions de la population. Mais au contraire, des hommes – même âgés – m’ont dit que le fait que je sois une future mère leur avait donné confiance en mon envie de bien faire.

– Quel dossier vous tient particulièrement à cœur?
– Le principal défi pour Evolène réside dans l’aménagement du territoire. Nous avons notamment une zone à bâtir surdimensionnée. Mais le projet prioritaire était pour moi la réalisation d’un complexe comprenant un centre de santé, une crèche/UAPE (unité d’accueil pour écoliers) et une salle polyvalente. Il s’agit d’un budget de 11,5 millions de francs, largement accepté par la population en avril dernier. La maison de santé était vraiment obligatoire, car nous voulions donner aux Evolénards des conditions-cadres favorables pour la relève médicale. Elle accueillera trois cabinets, dont deux pour des généralistes, ainsi que des cabinets pour des physiothérapeutes ou un dentiste, par exemple. Nous avons pu avancer sur ce projet en collaborant avec deux jeunes médecins déjà prêts à s’installer.
Le deuxième bâtiment accueillera les différentes structures liées à la petite enfance, qui jusqu’à présent étaient disséminées dans le village et abritées dans des locaux mal adaptés. Il est impératif d’offrir de bonnes possibilités d’accueil extrafamilial, si l’on veut garder les familles dans notre fond de vallée!
Les travaux pourraient commencer au printemps 2024. Nous n’avons pas encore tous les détails, mais nous allons évidemment installer des panneaux solaires et étudions la mise en place d’un chauffage à distance qui serait alimenté par la nappe souterraine. Nous avons déjà des résultats provenant d’un forage exploratoire, qui semblent prometteurs.

– Comment la population évolue-t-elle?
– Elle est stable, avec environ 1660 habitants, mais vieillissante. Maintenir l’effectif et attirer de nouveaux habitants est un défi, car il y a peu de places de travail. Le tourisme attire des saisonniers étrangers qui ne s’installent pas sur la durée dans la commune. Il faudrait que des gens de la région s’investissent dans les professions liées au tourisme. La situation est la même dans l’agriculture, où la moyenne d’âge augmente. La relève au sein des exploitations agricoles est un véritable challenge, ce qui nous a incités à lancer un projet de remaniement virtuel de la surface agricole, sur la base de celui qui a déjà eu lieu dans la Vallée de Conches (Lötschental), dans le Haut-Valais. L’idée est de rassembler les parcelles et qu’un syndicat s’occupe de répartir cette surface auprès des exploitants. Grâce à ce remaniement, les exploitants bénéficieraient de surfaces plus grandes et plus intéressantes, permettant une rationalisation des ressources humaines et techniques. Nous allons bientôt organiser un vote à ce sujet. Pour que cette idée soit acceptée et mise en œuvre, il faut que la majorité des exploitants, ainsi que celle des propriétaires, acceptent ce principe.

– Quelle est la situation de l’immobilier?
– Nous sommes riches de notre patrimoine bâti authentique et préservé, mais cela signifie aussi que nous avons un parc immobilier ancien et peu lumineux. Il ne correspond plus aux attentes d’aujourd’hui. Il y a peu d’appartements disponibles, compte tenu des résidences secondaires réservées aux périodes touristiques. Des jeunes vont donc s’installer à Sion, à 30 kilomètres d’Evolène, pour vivre dans des logements plus modernes.
En Valais, les communes n’ont traditionnellement pas de biens immobiliers propres. Evolène n’a donc pas d’appartements qu’elle puisse mettre en location. Maintenant, compte tenu des contraintes consécutives à la Lex Weber, il est très difficile de construire de l’habitat collectif, puisque le futur occupant de chaque bien doit être connu avant la construction et s’engager à n’utiliser son appartement que comme résidence principale. Cela fait beaucoup d’embûches et représente un véritable effet pervers de la Lex Weber.
Par ailleurs, après la pandémie et le retour de l’engouement pour les résidences secondaires, il n’y a que très peu d’objets sur le marché. A Evolène, les habitants vendent rarement leurs terrains; ils les gardent afin de les transmettre à la prochaine génération, ce qui explique qu’Evolène ait connu un développement très modéré au regard de certaines autres communes de montagne.

– Comment se porte le tourisme?
– Assez bien. Nous sommes surtout une destination d’été recherchée pour son authenticité et son environnement préservé. A l’époque, nous avions un peu manqué le train du développement, ce qui se révèle aujourd’hui une force. Notre clientèle est surtout romande, mais nous avons de plus en plus de Suisses alémaniques. Traditionnellement, Evolène accueille également de nombreux Français et Belges.

– Quelle est l’offre culturelle?
– Nous avons plusieurs associations très actives et des manifestations importantes comme le carnaval, très suivi, et la fête de la mi-été le 15 août. A cette occasion, tout le monde porte le costume traditionnel. Nous sommes aussi la patrie de la race d’Hérens.

– Un souhait pour l’avenir d’Evolène?
– Que les Evolénards tirent tous à la même corde pour l’avenir de la commune, en mettant de côté ce qui divise, afin de maintenir et même d’améliorer la qualité de vie locale!

 

Propos recueillis
par Virginia Aubert

Virginie Gaspoz.

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