La pensée d’un vendeur n’est pas celle d’un acheteur.

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Les experts : L'immobilier

L’un des pièges de la pensée en matière d’estimation

28 Juin 2023 | Articles de Une

Nous attribuons à un bien que nous possédons plus de valeur que si nous ne le possédions pas. Il s’agit d’un biais cognitif, c’est-à-dire une déviation de notre jugement qui nous amène à une perception erronée de la réalité. Et de surcroît, nous faisons cela en toute bonne foi. Cela porte même des noms scientifiques: l’effet de détention ou l’aversion à la dépossession.

L’économiste Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie en 2002, a mis ce phénomène en évidence. Mais tout comme les pommes tombaient déjà des arbres bien avant que Newton ne formule la loi de la gravité, ce défaut de raisonnement existait déjà bien avant qu’un prix Nobel ne mette le doigt dessus.
Prenons l’exemple de Dominique, propriétaire d’une villa jumelée construite en 1980, qu’elle a entretenue avec amour pendant toute sa vie. Elle est veuve et retraitée depuis belle lurette. Ses enfants sont déjà propriétaires de leur logement et ne s’intéressent pas à la maison de leur enfance.

Erreur d’estimation

Cette dame envisage de vendre sa villa, devenue une grosse charge pour elle, et regarde un peu les prix des maisons dans les environs. Un promoteur a acheté une vieille maison dans la rue il y a deux ans de cela. Et maintenant, des villas jumelées toutes neuves sont mises à la vente dans le quartier. Dominique va se baser sur le prix de vente de ces villas modernes afin d’estimer la valeur de son propre bien.
Cette adorable dame estime qu’elle mérite une prime pour accepter de se défaire de sa possession. Mais cette prime est calculée inconsciemment, sans tenir compte des différences de performances énergétiques, de confort, de taille des pièces, de luminosité, etc.
Et je le répète, ce manque d’objectivité est tout à fait normal. Ce piège de la pensée est renforcé par certains courtiers malveillants qui utilisent cette faiblesse pour obtenir un mandat de vente. Ils font miroiter un prix totalement irréaliste. Ce qui est toxique pour la propriétaire, car elle risque de vendre à bas prix après avoir «grillé» son bien (voir Le Journal de l’Immobilier No 79, du 31 mai 2023).
Mais ne mettons pas tout le monde dans le même sac. Certains propriétaires ont les pieds bien sur terre et ne se font pas avoir par ce défaut de raisonnement. Et heureusement, beaucoup de mes confrères estiment la valeur de marché des biens immobiliers en toute objectivité.

Quelle est la solution?

Mettre un défaut de raisonnement en évidence sans fournir la solution n’est certainement pas productif. Alors regardons ensemble quelle est la solution à ce problème.
La question que Dominique s’est posée était: «A combien est-ce que j’estime la valeur de mon bien?». Ce qui l’a amenée à tomber dans le piège!
Pour éviter cette erreur d’estimation, la solution consiste à se poser la question suivante: «Si je n’étais pas propriétaire de cette maison ou de cet appartement, à quel prix serais-je désireuse de l’acheter?».
Eh oui! Il y a un corollaire: si ce que nous possédons vaut plus cher (point de vue du propriétaire), ce que nous ne possédons pas vaut moins cher (point de vue de l’acheteur).
Cela ne signifie pas que les propriétaires doivent brader leur bien pour arriver à le vendre. Cela veut dire qu’un prix de vente intelligent est un point d’équilibre délicat entre les intérêts des vendeurs et ceux des acheteurs. De plus, le risque de sous-estimation est lui aussi bien réel, d’où l’utilité de faire appel à un professionnel qualifié pour réaliser une estimation correcte. Cet estimateur professionnel ne sera pas sujet à ce type de défaut de raisonnement et pourra vous fournir une estimation qui défende vos intérêts, sans vous faire de fausses promesses.

par Vincent Grognard
Courtier avec Brevet Fédéral
Immo 4G
Cossonay/VD

Davantage d’informations sur ce sujet :

https://ressources.immo4g.ch/piege-estimation

 

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