Dans de nombreuses régions, on constate que la location gagne en attrait par rapport à l’acquisition d’un logement.

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MARCHé IMMOBILIER - L’«Immo-Monitoring» est paru

Des pistes de réflexion pour prendre les bonnes décisions

5 Avr 2023 | Finance immobilière

Après la publication la semaine dernière de l’enquête exclusive de Wüest Partner pour le Journal de l’Immobilier (notre numéro 71, disponible sur www.jim.media), c’est le Rapport semestriel «Immo-Monitoring» de printemps 2023 qui vient de sortir. Très attendue par les acteurs de l’immobilier, cette étude de Wüest Partner SA présente des analyses et perspectives sur l’évolution des marchés immobiliers suisses. Les articles sont fondés sur des bases de données étendues et fournissent des conclusions pertinentes, tout en les nuançant selon les spécificités régionales.

Le marché suisse du logement locatif reste tendu, avec un recul de 17,7% du nombre de logements locatifs proposés par rapport au même trimestre de l’année précédente. Cela s’explique par la faible activité de construction et par des changements multiples au niveau de la demande. L’année dernière, des permis de construire n’ont été délivrés que pour 42 200 logements, le chiffre le plus bas depuis 2003. Les exigences imposées aux nouveaux projets de construction en raison des prescriptions, des oppositions et des longs processus d’autorisation entravent la construction de grands projets. Une situation accentuée par la hausse des prix de la construction et des taux d’intérêt.
La forte demande de logement est en grande partie due à la croissance démographique dynamique, mais d’autres facteurs jouent également un rôle et peuvent varier fortement d’un canton à l’autre. Ainsi, le solde migratoire peut expliquer en moyenne 67% de la croissance du nombre de ménages et donc de la demande supplémentaire de logement. Le vieillissement de la population et l’augmentation de l’espérance de vie ont entraîné un besoin supplémentaire de logement de plus de 9%. L’augmentation de la prospérité et les tendances à l’individualisation sont responsables de près de 24% des nouveaux ménages créés.
Dans le futur, l’écart toujours plus grand entre la croissance du nombre de ménages et l’activité de construction qui reste à la traîne aggravera la pénurie de logement. Les loyers ont déjà augmenté et devraient croître davantage que l’année dernière (prévision 2023: +3,2%). La plupart des baux seront également touchés par des hausses de loyer au cours du second semestre, en raison de la hausse du taux d’intérêt de référence prévue en juin 2023.

Le logement en propriété comme placement en capital

Dans de nombreuses régions, on constate que la location gagne en attrait par rapport à l’acquisition d’un logement. Cela s’explique principalement par la forte hausse des prix des logements en propriété, ainsi que par celle des taux d’intérêt hypothécaires. Ainsi, le logement en propriété a un peu plus de mal à s’imposer en tant que placement de capital: actuellement, les cash-flows résultant des loyers économisés et des frais encourus sont négatifs dans la plupart des communes. Mais la question de savoir si le logement en propriété reste un placement judicieux dépend en grande partie de l’évolution à long terme des rendements indirects. Une analyse de l’ensemble des communes suisses montre que dans 1687 des 2148 communes, il faut obtenir des rendements indirects annuels positifs allant jusqu’à 1% pour atteindre le seuil de rentabilité. Dans 47 communes, ce taux doit même dépasser 1,5% par an.
Si l’on compare les rendements indirects mentionnés à l’évolution intervenue depuis 1985, des plus-values de cet ordre de grandeur semblent tout à fait réalistes. La protection contre l’inflation est également assurée, du moins sur le long terme. La devise devrait en outre rester la même: plus la situation est bonne, plus les perspectives d’un rendement indirect élevé sont prometteuses. Il convient toutefois de noter que des rendements indirects plus élevés sont souvent associés à des fluctuations plus importantes.
A court terme, une stagnation des prix se dessine aussi bien pour les appartements en PPE (prévision pour 2023: ±0,0%) que pour les maisons individuelles (+0,5%). Compte tenu du taux de renchérissement prévu de 2,1%, des prix stables représentent un recul en termes réels. La raison principale de cette évolution reste l’augmentation des coûts de financement.

Surfaces commerciales:
le taux de vacance recule devant la croissance de l’emploi

L’an passé, l’économie suisse a bien progressé et créé de nombreux emplois, cela grâce aux exportations et à la consommation privée. Le phénomène a surtout profité aux services personnels, alors que le commerce de détail subissait une légère tendance à la baisse. Les faibles activités de construction dans le segment de la vente au détail ont engendré une diminution de 12% sur un an des nouvelles surfaces de vente proposées sur le marché suisse. Ce rétrécissement de l’offre a contribué au ralentissement de la baisse des loyers dans les centres économiques. Mais les loyers restent en recul au niveau suisse.
Sur le marché des surfaces de bureaux, en dépit de la généralisation du télétravail et du desk sharing, les vacants ont reculé l’an passé. Cette évolution favorable est due à la forte croissance de l’emploi et à de faibles activités de construction. Mais si le marché actuel du travail fait bonne figure, avec un taux des places vacantes supérieur de quelque 70% à la moyenne pluriannuelle, le nombre de personnes actives devrait diminuer à l’avenir, en raison de l’évolution démographique. Ce phénomène compromettra le rôle de moteur de la demande joué par la croissance de l’emploi.
Une analyse de contrats de bail montre que les entreprises des secteurs de bureaux typiques sont à nouveau plus nombreuses à louer des surfaces de bureaux. Cependant, la propension à payer varie largement selon les secteurs. Ainsi, les entreprises des secteurs des finances et du conseil paient des loyers nettement supérieurs à la moyenne. Il en va autrement pour les détaillants, les architectes ou les ingénieurs, qui paient quelque 10% de moins que la moyenne pour les surfaces de bureaux louées.

Appartements en PPE: rendements indirects annuels moyens nécessaires pour atteindre le seuil de rentabilité (2023–2038).
Surfaces de vente: évolution des loyers de l’offre par région de marchés des bureaux (base 100 = 1er trimestre 2013).
Surfaces de bureaux: évolution des loyers (baux conclus, corrigés de la qualité,
base 100 = 1er trimestre 2013).

L’infrastructure attise l’intérêt des investisseurs

L’Etat est généralement considéré comme responsable de la fourniture, de l’entretien et de la gestion de l’infrastructure. L’intérêt des investisseurs privés pour cette classe d’actifs s’est toutefois récemment accru en Europe, pour différentes raisons. Premièrement, le besoin d’infrastructures supplémentaires augmente dans le monde entier, d’où un grand potentiel pour des investisseurs privés et institutionnels. La croissance démographique mondiale, les mutations sociales, les progrès technologiques comme la nécessité du développement durable et d’une certaine autonomie énergétique stimulent fortement la demande d’infrastructures. Deuxièmement, ces investissements offrent une solide protection contre l’inflation, car les revenus des infrastructures y sont souvent liés et les exploitants peuvent adapter les prix. Cet effet est renforcé par l’importance systémique et la position monopolistique de certaines infrastructures. La protection contre l’inflation dépend toutefois des causes sous-jacentes de celle-ci et peut se révéler limitée dans certains cas.
Troisièmement, de tels investissements comportent un potentiel de diversification apprécié par de nombreux investisseurs. Quatrièmement, les investissements directs dans l’infrastructure assurent un cash-flow relativement stable et prévisible. Enfin, des investissements dans les infrastructures, surtout dans les énergies renouvelables ou la gestion des déchets, rendent les portefeuilles plus durables sur le plan environnemental. A noter toutefois que le risque varie selon le stade de développement des projets, ainsi que selon le type et la forme des investissements.

Placements immobiliers:
le marché immobilier suisse reste robuste dans les turbulences

Le marché immobilier suisse semble moins affecté par le revirement des taux que les autres marchés européens. En effet, grâce à une forte demande persistante de bureaux et de logements, ainsi qu’à un niveau parfois historiquement bas des taux de vacants, le marché immobilier suisse reste une alternative de placement stable et attrayante. Le marché actuel des transactions est toutefois marqué par des remaniements de portefeuille, qui s’accompagnent souvent de la vente de petits objets.
La fin de la politique de très bas taux d’intérêt a fortement affecté la performance des placements immobiliers indirects. Fin 2022, le WUPIX-F (fonds immobiliers cotés en Bourse) a enregistré sa plus mauvaise performance annuelle depuis le début des relevés en 1997, avec un recul de 15,5%. Les placements immobiliers indirects, surtout les fonds immobiliers, ont retrouvé des résultats positifs depuis le début du 4e trimestre 2022. Cette tendance devrait se maintenir cette année, grâce à la normalisation des agios et aux perspectives prometteuses du segment résidentiel. Il faut certes s’attendre à de nouvelles hausses mais, compte tenu de prévisions d’inflation beaucoup plus faibles, la Banque nationale suisse relèvera sensiblement moins les taux que d’autres banques centrales en Europe ou aux Etats-Unis.

Un optimisme modéré sur le
marché de la construction

Le marché suisse de la construction a souffert du renchérissement affectant le secteur l’an passé et il ne pourra pas non plus exploiter tout son potentiel de croissance en 2023. La hausse des coûts de financement et les pénuries, tant de personnel qualifié que de matériaux de construction, constituent toujours des défis d’envergure. Les permis de construire demandés et délivrés laissent prévoir une hausse des investissements en 2023 d’environ 2,4% (neuf) et 8,8% (transformations) en termes nominaux. Après déduction du renchérissement attendu de la construction, cela signifie une croissance nulle pour le neuf et une forte croissance en termes réels pour les transformations. Les transformations gagnent donc sans cesse du terrain par rapport au neuf, d’une part en raison d’investissements croissants dans la durabilité, généralement sous forme de rénovations énergétiques (remplacement du chauffage, isolation, photovoltaïque, etc.), mais aussi sous l’effet de la densification «vers l’intérieur» prônée par les autorités.
Si les analystes estiment que les investissements dans la construction d’immeubles multifamiliaux (habitat groupé) devraient évoluer latéralement cette année en termes nominaux, on remarque un net recul du nombre de logements prévus, pour les permis demandés et délivrés. Ainsi, moins de logements locatifs et d’appartements en PPE sont construits pour un même montant d’investissement. L’absence de baisse nominale des investissements dans la construction de logement est donc due au renchérissement de la construction et à la hausse des coûts de construction par logement, et non à une forte production de logement.
Outre ces grands thèmes, le rapport de Wüest Partner traite également de questions plus spécifiques, comme l’influence de l’Etat sur les marchés immobiliers. Les facteurs qui entrent en jeu – et dont les interactions ont parfois des effets inattendus – sont ainsi examinés, qu’il s’agisse d’aménagement du territoire (emplacement des réserves de zones à bâtir), de subventions pour les rénovations énergétiques (octroi des fonds variable selon les cantons) ou de réglementation des loyers (impact de la LDTR à Genève).

 

Véronique Stein

ERRATUM

Dans l’édition imprimée de notre No 71, du 29 mars 2023, deux légendes de graphique ont malencontreusement été interverties dans l’article sur l’analyse trimestrielle de Wüest Partner réservée à nos lecteurs. Il s’agit des Figures 4 et 5 en page 12.

La version en ligne d’Immo-Monitoring est disponible sur:

https://www.wuestpartner.com/ch-fr/publications/commande-immo-monitoring/