Mais qui donc a bu l’eau des poissons?

Là est la question. Ici la pluie, j’ai rendez-vous avec la nappe phréatique, les toits et les tuyaux. Je viens de la mer d’où je me suis évaporée. Je vole et revole, de remplissage en remplissage. Mes complices les plombiers me canalisent à façon. Les robinets mes amis me régulent et m’économisent. Toute une logistique est de mise, raccourcir les circuits, augmenter la vitesse, prise en charge et livraison, arriver à l’heure à chaque destination. Je prends à cœur de bien faire mon métier, je suis l’âme et l’esprit de la planète verte et bleue de l’arc-en-ciel.
Source de vie, je remplis les fontaines, je cultive les prés et les jardins, je nourris les amibes et les bactéries, je colorie les fleurs des prairies. Amazone, j’irrigue les forêts d’Amazonie. Rhône, je fais Brigue-Marseille à merveille. Nil, je verdis le pays des Pharaons. Yang Tsé Kiang, je navigue entre le Yin et le Yang. Venoge, je me fais fleuve tranquille. Loire, je couronne les rois de France de châteaux en châteaux. Arno, j’offre à Machiavel, Michelangelo, Léonard de Vinci, la Renaissance. Dniepr, après la guerre, les rivages et les méandres de la paix.
A l’examen d’humanité, les experts ont dit à l’homme: «Tu peux mieux faire». Le vert d’eau est un immense potentiel d’entreprise et de conquête. Le Soleil l’a bien compris, lui qui a souscrit en obligations de partenaire à court et très long termes. Quand je turbine, je développe mes énergies. Je prends mes vacances dans les barrages et l’apéro dans les glaciers. De berge en cale sèche, j’économise mes courants d’eau en lâcher-prise. Les sécheresses, les déluges, les réchauffements climatiques, les dérèglements météorologiques m’ont rendue stoïque. Limpide, claire ou salée, en lacs, en ruisseaux ou en rivières, je suis l’amoureuse éternelle des petits et gros poissons.