A gauche Sylvain Roch, à droite Claude Roch.

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V. Guimet fils SA

La passion en héritage

18 Mai 2022 | Articles de Une

Que ce soit une villa ou un appartement, votre chez-vous est ce cocon, ce vaisseau spatial suivant sa course solitaire dans l’univers, dont vous êtes seul maître après Dieu. Sylvain Roch a une autre approche: comme le sang alimente nos organes, l’eau irrigue chaque construction à travers des réseaux qu’il faut entretenir, nettoyer, surveiller et restaurer. La société V. Guimet Fils SA, qu’il dirige depuis 2018, s’en charge.

L’an prochain, Guimet fêtera 150 ans. Une belle longévité pour cette entreprise familiale née quand Genève jetait bas ses remparts et descendait de sa colline. A la fin du XIXe siècle, la ville possède déjà un réseau d’égouts moderne et innovant, qu’il faut nettoyer. Etienne Guimet en fait l’une de ses spécialités. Aujourd’hui, V. Guimet Fils SA est leader à Genève pour l’entretien des canalisations.
Insuffler de l’eau suffit à maintenir ce réseau invisible et pourtant essentiel, indique Sylvain Roch, directeur général, représentant la 7e génération issue de la famille fondatrice. Pas de produits chimiques, pas d’additifs: l’environnement est une préoccupation constante. Entre autres projets, il travaille à réduire les volumes d’eau utilisés, ainsi que l’empreinte CO2 de ses véhicules. Il promet du nouveau à cet égard lors du 150e anniversaire.

Un modèle d’affaires en évolution

Sylvain Roch a fait évoluer le modèle d’affaires en réduisant la part des interventions d’urgence au profit des contrats d’entretien, ainsi que des diagnostics sur l’état des canalisations. Ceux-ci sont réalisés par des caméras miniatures couplées aux buses de nettoyage. Désormais, le monitoring de l’état des conduits et les interventions planifiées représentent l’essentiel du volume d’affaires.
L’évolution du secteur a amené en 2015 la création du CFC de «technologue en assainissement». Jusque-là, le métier s’apprenait sur le tas, chaque entreprise formant son propre personnel. Sylvain Roch a collaboré à la définition de ce CFC et siège dans ses commissions d’examen.
Travailler dans la société familiale a été une évidence pour Sylvain Roch, qui se dit mû par la passion. Depuis toujours, il entend parler de l’entreprise, où son père l’amenait alors qu’il était encore à l’école. Tous les employés le voient depuis l’enfance. La maisonnée ne s’arrête pas aux liens de sang, elle inclut les quelque 100 collaborateurs de la société, qu’il connaît tous personnellement.

Un moment d’échange quotidien

«J’ai la responsabilité de faire vivre ces familles. Cette exigence m’habite quand je décide d’un nouvel investissement: est-ce que cela contribuera à pérenniser l’entreprise?», explique-t-il. Durant les deux années de pandémie, il a organisé un moment d’échange quotidien avec son personnel, pour rassurer et écouter. «Il est essentiel d’être à l’écoute. Aujourd’hui, le monde du travail est exigeant, il va vite. Nous devons être proches, mettre en confiance. Je sens un fort besoin de valorisation et de sécurisation après la Covid», confie-t-il.
«Je parle aussi beaucoup avec mon père, Claude Roch, président de la société. Nous arrêtons ensemble les choix stratégiques», explique encore Sylvain Roch. Ces échanges sont empreints de respect et de bienveillance, ajoute-t-il. Et si, parfois, le fils s’écarte de l’avis de son père, celui-ci ne lui en tient pas rigueur.
Un exemple? «Nous avions trois responsables qui géraient chacun deux services. J’ai doublé leur nombre pour que chacun n’ait qu’une unité en charge. Cela permet une meilleure écoute du personnel et des clients. Mon père avait la vue inverse: je créais un écran entre l’opérationnel et moi». Dans les faits, assure Sylvain Roch, ce changement a revalorisé le rôle des cadres, qui sont désormais plus autonomes et s’appuient moins sur lui dans leurs décisions quotidiennes. Il a ainsi libéré du temps et responsabilisé ses collaborateurs.

 

Cesare Accardi

BRÈVES

Recettes pour une succession réussie

 

Y a-t-il des clefs pour réussir une transmission d’entreprise? Question posée à Claude Roch, président du Conseil d’administration de V. Guimet Fils SA et père de Sylvain. «Les clefs sont le partage et l’écoute. J’amène mon expérience et Sylvain l’innovation», répond-il simplement.
A la demande de savoir si l’on peut coacher son successeur, Claude Roch affirme que l’on peut le mettre sur les rails et lui transmettre les valeurs de l’entreprise. La génération montante doit cependant faire ses expériences et avoir ses propres références, car le modèle économique d’hier n’est pas celui d’aujourd’hui. Sylvain dit avoir reçu de son père l’exemple de l’enthousiasme et de l’écoute des collaborateurs, joint au sérieux et au sens des responsabilités.
Claude Roch ne prépare «pas encore» la 8e génération. Pour l’heure, son objectif est de conserver sa place de numéro un à Genève en termes de nombre d’employés et de parts de marché. Pour cela, dit son père, sa réactivité est son principal atout. «Sylvain s’adapte rapidement. Il sait anticiper les besoins, avoir une vision du futur, connaître les plans d’action, anticiper leur mise en œuvre».
Claude Roch a aussi innové lorsqu’il dirigeait l’entreprise. «J’ai été le premier à mettre en place un service de caméras pour aller dans les canalisations, raconte-t-il. Au début, nous utilisions des appareils photo, aujourd’hui ce sont des robots avec une vision en full HD, ce qui permet des rapports et des photos irréprochables».
Peut-être plus encore que de ces apports techniques, il est fier d’avoir su mériter la confiance du personnel. «Souvent, nos collaborateurs commencent très jeunes et restent jusqu’à la retraite», souligne-t-il. Si les patrons aussi passent leur vie dans l’entreprise, c’est bon signe!

BRÈVES

V. Guimet Fils SA en quatre chiffres

 

1873: fondation
Septième génération aux
commandes
100 collaboratrices et collaborateurs
20 ans: ancienneté moyenne des collaborateurs dans l’entreprise

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