Les idées creuses, ça peut faire grimper…

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hors champ

A quoi pense un(e) ministre de l’emploi?

18 Mai 2022 | Culture, histoire, philosophie

L’économie genevoise… helvétique… traverse les trous d’air sans trop de dommage, depuis un siècle. Grâce au génie de nos élites… ou parce que les dieux du ciel ont ici leur pied-à-terre? Pour la ministre genevoise actuelle, pas de doute: «Les choses vont bien mieux depuis que je tiens les rênes à la fois de l’économie et de l’emploi». Mais elle voit les choses de très haut… qu’elle parle de transition écologique et numérique, d’emploi à l’aéroport ou de gestion des chômeurs.

«Un lieu de contact utile pour les chômeurs seniors: les salons de Palexpo!»… d’autant que les chômeurs seniors sont – paradoxe – ceux des «métiers d’avenir»: hi-tech, comm’, finance. Qui a fait cette suggestion? Pas le «Département», mais un participant à un atelier «Level+» au festival Open Geneva. Atelier organisé par la très officielle Fongit (sans consulter la très méritante association «50etplus» qui plaide pour ces victimes).

Hormis celui du livre ou de l’auto…

La suggestion – perçue comme «très utile» par le public présent – n’aura pas de suite: le seul nom de Palexpo a été jugé «hors sujet» par la ministre et sa cour lors de la récente conférence de presse «bilan». D’ailleurs – sinon couper les rubans – les ministres de l’Economie ne manifestent guère d’intérêt pour ce qui se dit ou fait au Palais d’exposition et au Centre de congrès (hormis les deux cités plus haut): même le récent «Climate Show» a laissé la ministre écologiste d’une étonnante indifférence. Pourtant, des «synergies» pourraient faire de Genève le «hub» technique du monde. A ce jour et en règle générale, salons, écoles, médias… se tournent le dos: rares sont les congrès à parler à la presse… rares sont les profs qui mènent leurs troupes en ces lieux… dont la «gouvernance» – à la Place des Nations comme au Chemin des Mines – est d’ailleurs très opaque… ce serait un sujet en soi.

Banquiers muets, ministres
prêcheurs

Un article publié il y a un siècle a fait du bruit en associant protestantisme et capitalisme. Juste ou faux, en tout cas le «Post tenebras lux» de nos ministres a un arrière-goût d’évangélisme. «On sent déjà un basculement» de l’esprit Max Weber à l’esprit Impact Hub», peut-on entendre dans les Fondations des zones industrielles. Les discours ressassés sur la transition nous font étouffer plus vite que le dioxyde de carbone: un patron est le premier à souffrir du gaspi d’énergie… il n’a pas besoin là de maîtres à penser. Bref, face aux médias, les ministres se présentent en état de lévitation et refusent de mettre pied à terre… un incident lors du «bilan» l’a fait voir: la presse «de qualité» monte avec eux au paradis, les médias trop lourds sont jetés par-dessus bord: «Depuis que je suis à Genève, j’ai bien vu comment ça marche ici: les uns sont attaquables et les autres, intouchables»… tel est le verdict d’un prof d’une grande école privée. Mais comme on parle du ciel, autant le regarder en face, avec ses étoiles et ses lunes. Le climat semble avoir peu profité de deux ans de vols réduits, mais les employés de l’aéroport profitent de l’évangélisme… on va le voir.

Un métier d’avenir: syllogiste

Le travail «décent» à l’aéroport est un cas d’école pour les évangiles roses et verts. Tout ce qui est «social» sonne bien, mais est-il pour autant «juste»? Depuis des années, les petits boulots – à l’aéroport ou dans la livraison – sont la bête noire des milieux «sociaux». Mais au fond, la «sous-enchère» n’est-elle pas la vraie amie du chômeur? «Je peux faire mieux et/ou moins cher!»… c’est le seul argument de vente des laissés-pour-compte. Seuls les ministres savent tout «faire pour plus cher» en tentant de faire croire qu’ils/elles font «mieux». En tout cas, un salaire «décent» sera bon pour qui a un job… mais n’en donnera pas à qui n’en a pas! Pis: même pour passer le balai… tant qu’à payer le même prix fort… les employeurs ne prendront que des gens «aux normes»: diplôme, genre, couleur, label au-dessus de tout soupçon. Les «hors-normes» – malgré le double sens – sont condamnés à s’aigrir… on l’a encore vu ces jours à l’assemblée de l’Association de défense des chômeurs… avec ou sans compétences «standards».

Ville «modèle» comme…
les enfants sages?

Palexpo «hors sujet»… Aéroport «autre sujet»… à la rencontre de presse, le soussigné a tenté sa chance avec une dernière officine sous tutelle du Département… la plus opaque de toutes: Genève Tourisme. Si son impact direct sur l’économie a des hauts et des bas, cet Office est le miroir de ce fameux «Esprit de Genève» qu’on n’arrive plus à cerner. Etait-il – à l’origine – un esprit de tolérance envers les points de vue autres et les savoir-faire hors cadre? Là encore à la rencontre médiatique, la question est vite mise «hors d’usage» car hors des usages. Et tout cela se passait au seuil de la «Journée pour la liberté d’expression». «Dire que Genève passe son temps à faire la leçon au monde!», ironisait ces jours un élu lassé du Cirque de l’Hôtel-de-Ville.

 

Boris Engelson