Me Poncet est passionné de culture indienne.

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Dans la bibliothèque de…

Charles Poncet: «Ma vie avec les livres»

1 Déc 2021 | Articles de Une

Il vit parmi les livres depuis toujours et plus que jamais! Dans son grand appartement, Charles Poncet, le célèbre avocat et maître du Barreau genevois, a installé des bibliothèques partout (living, escalier, cuisine…) et il passe sans cesse de l’une à l’autre, au gré de ses envies et de ses humeurs, dans une sorte de vagabondage d’une souveraine liberté. Rencontre.

Il nous accueille chaleureusement dans son grand duplex, sur les hauts de Frontenex, en face du légendaire stade de foot d’UGS. Charles Poncet est avocat, mais oserait-on dire qu’il est déjà, à son jeune âge (74 ans), un avocat à l’ancienne, c’est-à-dire un humaniste pétri de littérature et de culture, un lecteur insatiable qui ne pourrait vivre une seule journée sans ouvrir un livre, ou plutôt plusieurs livres, et cela du matin au soir. Chez lui, partout, des bibliothèques, organisées et classées selon ses thèmes de prédilection: l’histoire au sens large, avec la Deuxième Guerre mondiale en particulier, et l’Inde, sa grande passion discrète. Plusieurs bibliothèques dans le salon et le séjour, d’autres dans la cuisine, l’escalier… D’autres aussi dans sa chambre à coucher, dont l’une est réservée aux dizaines de livres qu’il a achetés en se disant qu’il n’aurait peut-être pas le temps de les lire.

«Je lis plusieurs bouquins à la fois»

«Les livres sont nos amis les plus fidèles et je ne pourrais pas vivre sans eux, dit-il en souriant. J’ai toujours aimé lire, depuis que je suis enfant, et si je devais résumer ma vie, ce serait: je lis, j’écris… Je lis toujours plusieurs bouquins à la fois, dans des genres différents. Je ne m’endors jamais sans avoir lu quelques pages et quand j’en ai vraiment marre de tout, je me pose sur le canapé avec un livre. J’ai aussi plusieurs dictionnaires que je consulte avec plaisir et qui font partie de mon amour de la langue. J’aime préciser le sens exact des mots, connaître leur origine, leur évolution».
Charles Poncet connaît ses grands classiques, rassemblés dans la belle collection de la Pléiade, mais il ne passe pas son temps à les relire. Il n’aime pas tellement les romans, sauf Balzac qu’il place au-dessus de tout. Sur un mur du séjour, d’ailleurs, des dizaines de gravures représentent les personnages de la Comédie humaine. «Je suis un balzacien inconditionnel. Je relis ses bouquins régulièrement. A part Balzac, je dirais un peu Proust, peu Flaubert, pas très Camus… Mais j’adore Colette qui est admirable et puis, dans un tout autre style, Giraudoux, Montherlant, Anouilh…».
Avocat mais aussi ex-conseiller national à Berne, Charles Poncet a une insatiable curiosité pour l’histoire. L’histoire de France, d’abord, mais aussi celle du continent européen, à commencer par l’empire romain, et celle du vaste monde, surtout l’Asie. Toute l’histoire de l’humanité depuis la nuit des temps, mais aussi l’histoire contemporaine: l’Afghanistan, le Moyen-Orient, la guerre du Vietnam, la guerre froide, les livres d’Henry Kissinger, les mémoires des uns et des autres…
Immense personnage pour Charles Poncet, le cardinal de Richelieu (1585-1642), qui a forgé et renforcé les structures de l’Etat français. «J’ai un rayon entier sur Richelieu. Un homme prodigieux et d’une intelligence fantastique! Je l’ai découvert quand j’étais adolescent en lisant sa biographie par Philippe Erlanger et je n’ai jamais cessé de m’intéresser à lui. Il était à la fois un homme cruel, retors, et un théologien. Il avait cette capacité d’être l’homme rouge que tout le monde craignait, mais de s’accommoder aussi de Louis XIII qui pouvait le saquer du jour au lendemain. Et il a tout fait avec un corps malade qui le faisait terriblement souffrir».
Dans le registre de la tragédie, l’avocat genevois ne cesse de relire des ouvrages sur la Deuxième Guerre mondiale. Citons notamment l’énorme biographie en deux volumes d’Adolf Hitler de l’historien anglais Ian Kershaw; le livre référence de Raul Hilberg sur l’Holocauste – La destruction des Juifs d’Europe; la grande saga d’Henri Amouroux sur la France occupée…

Des cours de sanscrit par Zoom

Mais la grande passion de Charles Poncet, c’est l’Inde, cette civilisation née il y a 5000 ans, qui a donné naissance notamment à l’hindouisme et au bouddhisme. Un pays auquel il a commencé à s’intéresser paradoxalement… aux Etats-Unis quand il était étudiant à Georgetown où il préparait son Master en droit comparé, de 1972 à 1975. «C’était l’époque hippie, free love, yoga… Je suis revenu inconditionnellement pro-américain et totalement fasciné par l’Inde où je suis allé ensuite très souvent. J’y suis allé en touriste, mais aussi avec un ami indien qui m’a aidé à découvrir la réalité du pays. Je trouve que la vision du monde des Indiens est remarquable: l’idée du karma, c’est que nous vivons dans notre vie actuelle les conséquences des actes commis dans nos vies antérieures. D’où les réincarnations…».
Charles Poncet a commencé à apprendre le sanscrit depuis longtemps, mais c’est une tâche sans fin, un exercice toujours recommencé, une forme de méditation. «Depuis sept ou huit ans, je prends une heure de cours par semaine avec un prof en Inde, par Zoom. C’est un hobby absolument génial que je recommande, plutôt que le Sudoku. Le problème en vieillissant, c’est que la mémoire d’acquisition tend à se détériorer, mais j’ai l’impression qu’avec le sanscrit, j’absorbe les choses plus lentement et que je les retiens mieux. Je me réjouis d’arrêter de travailler pour ne faire plus que cela».

 

Robert Habel

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