Anna Szücs, femme écrivain hongroise, lauréate du prix littéraire SPG 2021

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Prix littéraire SPG

Souvenir de cinquante-six

13 Oct 2021 | Culture, histoire, philosophie

Le Prix littéraire SPG du premier roman romand récompense, chaque année depuis 2014, une première œuvre de fiction (roman) d’un auteur romand, écrite en langue française et éditée par une maison d’édition suisse. Cette année, c’est une femme écrivain hongroise qui a été distinguée, pour un roman évoquant la terrible répression soviétique du soulèvement démocratique magyar de 1956.

Le Prix littéraire SPG 2021 va donc à Anna Szücs – née à Budapest en 1988, elle vit à Singapour – pour son livre «L’anatomie d’une décision», publié aux Éditions Encre Fraîche. Ce premier roman, parfois illustré, se déroule au début de l’insurrection de Budapest, en octobre 1956, contre le régime communiste. Il suit à la manière d’une chronique le quotidien bouleversé d’Imre Spiegel, d’Irma et de leur fils Andris dans la ville hongroise de Zalaegerszeg. Imre se prend à rêver d’égalité et de liberté. Mais les affres de la Seconde Guerre mondiale ressurgissent chez celui dont la famille juive a déjà tant perdu. Durant sept jours, l’incertitude s’installe face à un dilemme cruel: rester ou fuir?
«Nous sommes heureux de constater que le Prix a acquis au fil des années une belle notoriété; celle-ci se concrétise par une multitude de sollicitations d’éditeurs suisses. Cette résonance nous réjouit, puisqu’il s’agit en finalité de promouvoir la création littéraire romande, mais également de soutenir l’édition romande et ses acteurs», commente Thierry Barbier-Mueller, administrateur-délégué du groupe SPG-Rytz.

Un roman en deux temps

Anna Szücs raconte: «J’avais écrit une première version de ce roman, plus courte, comme un travail de Maturité alors que j’étudiais au collège Rousseau, à Genève. A l’époque, je sortais de l’adolescence; ma motivation première était une recherche d’identité, moi qui suis d’origine juive et hongroise. Ma famille a énormément souffert pendant la Seconde Guerre mondiale. Beaucoup de ses membres ont disparu dans les camps de concentration. Il y a sept ans, je l’ai retrouvé sur mon disque dur, l’ai relu et il m’a ému aux larmes. Je me suis dit que c’était le moment d’en faire quelque chose de plus ambitieux».
Médecin, active en psychiatrie, l’auteur découvre dans son sujet bien davantage qu’une simple quête d’identité. Les protagonistes principaux de l’histoire sont des juifs qui se retrouvent dans un régime communiste qui tait les horreurs de la guerre. Ma question est de savoir comment on peut digérer un passé traumatique dont on ne peut pas parler? Comment les souvenirs de cette douleur sourde se réveillent-ils lorsque survient un événement tel que la Révolution hongroise de 1956, écrasée par Moscou? Un récit passionnant qui a convaincu le jury.

 

Vincent Naville